Nouveaux équilibres politiques dans les commissions scientifiques du Congrès suite aux élections de mi-mandat

L’inauguration du 118e Congrès des Etats-Unis, élu lors des élections de mi-mandat de novembre dernier, charrie son lot de nouvelles nominations au sein des commissions parlementaires des deux chambres. En particulier, la chambre des Représentants, désormais à majorité républicaine, voit ses commissions scientifiques entièrement renouvelées. La composition des nouvelles commissions permet de prendre la mesure des priorités du parti républicain pour les deux prochaines années.
Hearings - House Committee on Science Space & Tech - Republicans
© House Science Committee

Le 118e Congrès des Etats-Unis, réuni pour la première fois le 3 janvier dernier, a commencé avec l’élection du speaker de la Chambre des représentants, passée aux mains des Républicains. Il a fallu quatre jours de débats, trois nuits de négociations et quinze tours de scrutin pour que le favori Kevin McCarthy, élu de Californie, soit finalement élu président de la chambre basse du Congrès. La frange d’extrême droite du parti républicain, des héritiers de Donald Trump que lui-même ne parvient plus à faire plier, faisait obstruction au vote en considérant M. McCarthy comme trop modéré. En imposant ses lois comme ses méthodes, cette minorité d’élus a pu démontrer toute l’étendue de sa capacité d’obstruction pour les deux années à venir.

Les élus se sont ensuite attelés à la répartition au sein des 20 commissions de la Chambre et des 21 commissions du Sénat. Celui-ci n’a été renouvelé qu’au tiers à l’issue des élections de mi-mandat, et la majorité démocrate a réussi à se maintenir, mais des changements importants ont tout de même été constatés dans les commissions sénatoriales.

Chambre des représentants

La commission pour la science, l’espace et la technologie de la Chambre a été entièrement renouvelée conformément aux nouveaux équilibres politiques. Le représentant Frank Lucas, de l’Oklahoma, a été désigné pour occuper le poste de chair (président), en remplacement d’Eddie Bernice Johnson, représentante afro-américaine du Texas qui siégeait à la Chambre depuis 30 ans. “Le travail de notre commission permet aux États-Unis de rester le leader mondial de la science et de la technologie et de rester compétitifs dans l’économie mondiale”, a-t-il déclaré. “En tant que président, j’ai hâte de me mettre au travail sur des questions d’avenir, notamment la sécurisation de notre chaîne d’approvisionnement pour les technologies de pointe, le renouvellement de notre leadership dans l’espace et l’aéronautique, la recherche de moyens pour rendre l’énergie américaine plus propre et plus abordable, et la lutte contre les menaces auxquelles nous sommes confrontés de la part du Parti communiste chinois.

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Si Frank Lucas ne remet pas en cause la réalité du changement climatique, contrairement à un certain nombre de ses collègues républicains, il s’est largement concentré à promouvoir des politiques d’adaptation plutôt que d’atténuation des effets du changement climatique. L’agence de presse américaine E&E News relève qu’il n’a jamais été en faveur de politiques visant à réduire la dépendance des Etats-Unis aux énergies fossiles. « Notre objectif devrait être de réduire les émissions grâce à des partenariats de recherche et développement entre le gouvernement et l’industrie, à des solutions pilotées par l’industrie et à des investissements dans l’avancement de technologies telles que la capture du carbone, les biocarburants et les systèmes à haut rendement énergétique », a-t-il écrit, prônant ainsi une vision fondée sur le solutionnisme technique. La démocrate Zoe Lofgren occupe le poste de ranking member, le poste de numéro deux d’une commission, dévolu au parti minoritaire. 

Parmi les autres membres désignés dans cette commission se trouve George Santos, qui a récemment défrayé la chronique après les révélations de ses multiples mensonges sur sa carrière et sa vie personnelle tout au long de sa campagne législative. Des élus de tous bords appellent à sa démission et une enquête devrait être ouverte prochainement. La nomination d’un élu controversé dans cette commission est une confirmation du rang secondaire que le parti républicain dans sa globalité accorde aux enjeux des sciences et technologies (S&T). Au moment de la rédaction de cet article, George Santos a décidé de se retirer provisoirement des deux commissions dans lesquelles il siégeait, après une entrevue privée avec le speaker Kevin McCarthy et pour le temps que dureront les enquêtes autour de sa campagne

Les Républicains ont nommé les responsables de l’élaboration des budgets des agences scientifiques. Le représentant Mike Simpson, champion de l’énergie nucléaire, quitte son poste de principal républicain au sein de la sous-commission chargée d’élaborer le budget du département de l’Énergie pour présider la sous-commission chargée du Geological Survey (USGS) et de l’Environmental Protection Agency (EPA). Il est remplacé par Chuck Fleischmann, partisan des laboratoires nationaux du DOE, dont le district comprend le laboratoire national d’Oak Ridge. Le représentant Robert Aderholt a quitté son poste de principal républicain au sein de la sous-commission qui élabore les budgets de la NASA, de la National Science Foundation, de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) et du National Institute of Standards and Technology (NIST), et il dirige désormais celle qui élabore le budget des National Institutes of Health (NIH). Aderholt est remplacé par le représentant Hal Rogers, ancien président de la commission des crédits, qui représente un district rural de l’est du Kentucky et qui est actuellement le plus ancien membre de la Chambre des représentants.

Sénat

Au Sénat, les sujets scientifiques sont traités par la commission du Commerce, de la Science et des Transports, un portefeuille beaucoup plus vaste que son équivalent à la Chambre. La démocrate Maria Cantwell conserve son poste de chair, qu’elle occupe depuis deux ans. Le ranking member Roger Wicker part à la commission des forces armées et cède sa place au sénateur Ted Cruz, un des ténors du parti républicain, candidat aux primaires de son parti pour l’élection présidentielle de 2016. Si ses positions sur les enjeux de S&T devraient refléter celles de son parti (la compétition avec la Chine s’affirmant comme la boussole du parti républicain), les deux sénateurs ont déjà présenté une proposition de loi bipartisane : une obligation de transparence pour les produits comportant des éléments d’enregistrement audio ou vidéo qui ne sont pas jugés évidents – comme l’électroménager.

La commission du Commerce est composée d’une sous-commission de l’espace et de la science dont la composition devrait rester inchangée. 

Rédacteur : Julian Muller, chargé de mission scientifique, [email protected]

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