La publication d’un nouveau rapport sur la projection des besoins en matières premières agricoles d’ici 2050

Selon les dernières estimations publiées vendredi 19 juin par la FAO, la faim dans le monde aurait atteint un niveau historique en 2009 avec près de 1,2 milliards de personnes touchées. Un nouveau rapport, publié le 25 juin dernier par la Deutsche bank et l’université du Wisconsin de Madison, révèle que les besoins en énergie et en nourriture de la planète devraient augmenter de 50% d’ici les 40 prochaines années. Ceci en raison de l’augmentation de 75% de la demande mondiale de céréales et du doublement de la demande mondiale de viande prévus entre 2000 et 2050. Ces résultats mettent en évidence la nécessité d’actions énergiques en matière de planification et d’investissement dans le secteur agricole à l’échelle mondiale.

La Deutsche Bank, une des premières des banque d’investissement dans le monde, a rédigé ce rapport en collaboration avec David Zaks, chercheur au centre SAGE ("Center for sustainability and the global environment") de l’Institut Nelson’s Center à l’université du Wisconsin à Madison. Le document a pour objectif de fournir un plan d’investissement pour l’agriculture durable dans un contexte de croissance démographique massive et de demande croissante en nourriture, fibres et combustible.

Selon le rapport, un écart, déjà observable aujourd’hui, apparaît entre la production et la demande agricole à l’échelle mondiale. Ce décalage est appelé à augmenter en raison du changement climatique, de la demande croissante pour les biocarburants, et de la raréfaction de l’eau. Paradoxalement, on observe une très forte croissance de la production agricole et de l’accès à la nourriture par habitant depuis 50 ans. Au cours de la seconde moitié du 20eme siècle, la production agricole et alimentaire a été multipliée par 2,6, progressant davantage en 50 ans qu’en 1.000 ans. Le rapport montre combien la recherche agricole et le développement technologique ont connu des avancées significatives aux Etats-Unis et en Europe, notamment lors de cette dernière décennie, alors que ces progrès ne se sont malheureusement pas traduits par une augmentation de la production à l’échelle mondiale. L’agriculture des pays en voie de développement, a, au final, peu profité des retombées de ces développements et de ces investissements dans les différents secteurs de l’agriculture.

Pour répondre à ce problème d’augmentation rapide de la demande en matières premières, le rapport présente différentes solutions potentielles et identifie un certain nombre de stratégies visant à accroître la production agricole mondiale de manière durable:
(1) l’amélioration de l’irrigation, de la fertilisation et du matériel agricole,
(2) l’application de technologies sophistiquées de gestion à l’échelle mondiale afin d’étendre la recherche et les investissements aux régions en voie de développement,
(3) l’investissement dans l’éducation afin d’optimiser l’utilisation des nouvelles technologies, grâce à des services de formation, et de vulgarisation, (4) l’augmentation des rendements de production grâces à l’utilisation des nouvelles biotechnologies, y compris les cultures génétiquement modifiées.

Notons toutefois que ces stratégies et solutions potentielles sont connues et validées par les pouvoirs politiques et décisionnels et qu’elles sont à l’étude dans plusieurs pays du Sud. Il est important de rappeler que les retombées des actions entreprises jusqu’à présent sont loin d’être suffisantes.

Le rapport de la "Deutsche Bank" s’appuie en partie sur les travaux et méthodologies développées par les chercheurs de l’"Université of Wisconsin", plus particulièrement du centre Madison pour le développement durable et l’environnement mondial et de l’unité SAGE de la "Nelson Institute for Environmental Studies". Les outils analytiques, cartes, modèles et bases de données ont été initialement développés dans le cadre d’un programme de recherche plutôt académique visant à dresser un tableau "global" de l’agriculture à l’échelle mondiale. Les principaux axes de recherche de cette unité concernent la mise en place de stratégies énergétiques pour la lutte contre le changement climatique, les pratiques agricoles qui n’affectent pas les besoins en eau, ou encore l’impact de la croissance urbaine sur la santé publique. La problématique au coeur des travaux de cette unité concerne la compréhension de l’impact des activités humaines sur l’environnement mondial. Pour atteindre cet objectif, cette unité a mis au point des cartes, des modèles informatiques et des données pour décrire les écosystèmes terrestres ainsi que les systèmes hydrologiques et climatiques. Sage a ainsi développé une nouvelle génération d’outils de modélisation des différents écosystèmes à l’échelle mondiale : IBIS Integrated BIosphere Simulator: https://www.sage.wisc.edu/download/IBIS/ibis.html) et THMB Terrestrial Hydrology Model with Biogeochemistry: https://www.sage.wisc.edu/download/HYDRA/hydra.html).

Ces prévisions, fondées sur la poursuite des politiques et pratiques actuelles, prennent en compte l’évolution de la démographie mondiale et la modification de l’architecture de distribution des revenus au cours des 50 prochaines années. Celles ci devraient entraîner un changement des habitudes alimentaires et un accroissement de la demande de nourriture notamment dans les pays en développement. L’effort d’accroissement de production sera très inégal : entre 2000 et 2050, l’Afrique devrait plus que quintupler sa production et l’Asie devrait plus que la doubler.

Le 10 juillet dernier, les dirigeants du Groupe des huit principales puissances économiques du monde (G8) se sont engagés à mobiliser 20 milliards de dollars américains sur trois ans pour une initiative visant à promouvoir le développement de l’agriculture dans les pays pauvres et à réduire les pénuries alimentaires. L’initiative aidera également les pays en développement à faire avancer la recherche scientifique dans le domaine de l’agriculture, promouvoir les collaborations internationales et améliorer la dissémination de la recherche. Il n’est pas inutile de rappeler que les précédents engagements pris sur cette question ont été difficiles à tenir par les huit principales puissances économiques du monde !

Source :

– "1,06 milliards d’humains ont faim!" 20 juin 2009 – https://www.populationdata.net/index2.php?option=article&aid=535&article=-1-milliard-dhumains-ont-faim-!
– Projected Food, Energy Demands Seen To Outpace Production, 25 juin 2009, https://www.sciencedaily.com/releases/2009/06/090625152936.htm
– La production agricole dans le monde: https://www.bretagne-solidarite-internationale.org/accueil/abcis/temps-forts/assises-2009/donnees-chiffrees/production-agricole/var/lang/FR/rub/4795.html
– Le G8 promet 20 milliards de dollars pour l’agriculture, 14 juillet 2009: https://www.merid.org/fs-agbiotech/fr/more.php?id=7608

Pour en savoir plus, contacts :

– Le website du professeur David Zaks: https://www.sage.wisc.edu/people/zaks/zaks.html
– Le website du Center for sustainability and the global environment: https://www.sage.wisc.edu/
– Le website du Nelson Institute for environmental studies: https://www.ies.wisc.edu/
Code brève
ADIT : 60032

Rédacteur :

Lila Laborde, [email protected]; Adèle Martial, [email protected]

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