Médecine spatiale à UCLA : Vers une médecine de l’infini et de l’au-delà

UCLA Space Medecine fellowship program logo / Credits : UCLA Health

Au vu de l’augmentation du nombre de missions spatiales, de l’ambition de voyages spatiaux plus longs, et de l’émergence potentielle du tourisme spatial, le développement d’une médecine spécialisée est nécessaire pour accréditer, préparer, accompagner et suivre les voyages dans l’espace. Voilà l’ambition de l’Université californienne à travers ce nouveau programme de formation.

Ce programme de deux ans inclut : 

  • Des immersions dans la compagnie aérospatiale Space Exploration Technologies Corporation (SpaceX), basée près de Los Angeles à Hawthorne (CA), fondée par Elon Musk il y a 20 ans et spécialisée dans la production d’objets spatiaux, dans le transport spatial et dans la recherche. Elle dispose également d’établissements à Redmond Washington, au Texas, en Virginie et à Washington DC. Son objectif est de réduire le prix des voyages interplanétaires pour rendre la colonisation de Mars possible.
  • Des cours en ingénierie aérospatiale à Pasadena (CA), dans la banlieue de Los Angeles, au sein de l’institut Technologique de Californie Caltech et de son centre de recherche Jet Propulsion Laboratory (JPL) porté par la NASA. Le JPL développe des robots d’exploration spatiale pour la NASA. Caltech est l’une des plus grandes universités d’ingénierie au niveau mondial, comptant plus de 40  lauréats de prix Nobel.
  • Des cours d’ingénierie bio-mécanique à la Samuel School of Engineering de UCLA, sur le campus localisé à Los Angeles (CA), en lien avec le Ronald Reagan UCLA Medical Center, classé dans le top 10 des centres médicaux américains.
  • Des mises en situation dans l’Utah, dans des conditions physiques similaires à celles sur Mars, ainsi que dans des environnements polaires isolés où les futurs médecins pourront expérimenter le manque de ressources, une pression atmosphérique plus faible et l’éloignement de la vie humaine.

Le premier médecin à bénéficier de ce programme est Dr. Haig Aintablian, chirurgien urgentiste diplômé de la David Geffen School of Medecine de UCLA.

Courtesy of Haig Aintablian / Credits : UCLA Newsroom

Cette formation a pour objectif de préparer des médecins à surveiller les voyageurs dans l’espace, mais aussi à les y entraîner et à s’assurer qu’ils n’encourent aucun risque à sortir du système terrestre. Les conditions physiques en dehors de l’atmosphère ne sont en effet pas sans danger, tant sur la santé physique que sur la santé mentale (éloignement humain, soutien émotionnel, perte des repères et des habitudes aux conditions terrestres, etc.).

Les différences, voire l’absence pendant le transport, de gravité engendre des difficultés musculaires et osseuses sur le moyen et long terme. Cela oblige les astronautes à s’entraîner physiquement 2h par jour durant leurs voyages. De plus, leurs fluides corporels ne circulent plus de la même façon : ils se retrouvent par exemple avec de très fines jambes et des têtes gonflées. Le système de pompe cardiaque est lui aussi fortement mis en l’épreuve. La différence de pression entraîne un aplatissement oculaire, et donc des dérèglements de la vision. Les radiations du soleil sont également bien plus dangereuses que sur Terre, car elles ne sont plus filtrées par l’atmosphère : on estime qu’en 6 mois de mission, les astronautes perdent 60% de leur capital solaire vital. 

Ces différences de conditions physiques sont des risques médicaux, mais sont aussi des facteurs pouvant altérer les modes de vie : imaginez une vie où vous ne marchez plus mais flottez et sautillez… et quelles conséquences cela aurait-il sur le développement des bébés : apprendraient-ils à se déplacer comme des grenouilles ? 

De nombreuses recherches sont encore nécessaires avant de pouvoir promouvoir le tourisme spatial, dont les tarifs ne le rendrait accessible qu’aux millionnaires en bonne santé physique et psychique. Aujourd’hui, il faut compter 1,3 million de dollars pour envoyer un kilogramme sur Mars, soit 90 millions de dollars pour une personne de 70 kg, sans compter l’embarcation des ressources vitales et la prise en charge une fois sur place. 

Enfin, si quelques pistes de recherche sont déjà en cours pour mieux appréhender les préparations physiques à de tels voyages et leurs supervisions médicales, les essais jusqu’alors ne se concentrent que sur des profils adultes de genre masculins et ayant une santé de fer. Bien que la NASA prévoit d’envoyer pour la première fois une femme astronaute sur la Lune en 2024, la question de la santé féminine dans l’Espace reste floue. Les menstruations pourraient notamment devenir dangereuses pour les femmes à cause de l’absence de gravité. Par ailleurs, dans une perspective de voyages touristiques, aucune donnée n’est disponible sur les accouchements en conditions extra-terrestres, sur le développement des bébés, et sur les personnes fragiles. 

Au King’s College (Londres, Royaume-Uni), des cycles de formation en médecine aérospatiale existent depuis 2016, et des médecins gynécologues se penchent sur ces questions. 

Enfin, un cursus de formation pour une médecine interplanétaire en partenariat avec la NASA existe déjà au Texas depuis quelques années, au sein de la branche médicale de l’Université du Texas (UTMB). Néanmoins, il semble moins orienté “terrain” que celui proposé par UCLA qui comporte de nombreuses mises en situation.

Références :

Rédactrice :

Clara Devouassoux, Attachée adjointe pour la Science et la Technologie à Los Angeles, [email protected]

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