Se salir : une bonne chose pour la santé des enfants

Selon une équipe de recherche de la Faculté de Médecine de l’University of California, San Diego, laisser les enfants se salir aurait des effets bénéfiques sur leur santé. Ils ont en effet découvert qu’une famille de bactérie commune, Staphylococci, possède la capacité de réduire les réponses inflammatoires violentes, plus connues sous le nom d’allergies. Les allergies sont devenues une maladie chronique très répandue dans les pays développés. Elles se traduisent dans le cas des plaies cutanées par un gonflement anormal associé à des rougeurs. Dans les cas les plus graves, appelés anaphylaxies, la mise en contact avec un allergène provoque une réaction violente dans l’ensemble du corps, qui se traduit par une vasodilatation généralisée (dilatation des vaisseaux sanguins provoquant une chute de tension sanguine brutale) et des troubles respiratoires sévères pouvant être mortels s’ils ne sont pas traités rapidement [1]. Le traitement d’urgence consiste en une injection d’épinéphrine, plus connue sous le nom d’adrénaline, qui permet de réduire les symptômes et de maintenir le patient dans un état stable le temps d’obtenir une aide médicale complète.

La bactérie étudiée par l’équipe de recherche de San Diego ne provoque pas de réaction inflammatoire lorsqu’elle se développe sur la peau. Elle synthétise une molécule chimique appelée acide lipotéichoïque (LTA), qui agit sur les kératinocytes (la principale famille de cellules constituant la peau) et les empêche de déclencher une réaction allergique. Les kératinocytes expriment un récepteur appelé Toll-like receptor 3 (TLR3) qui déclenche une cascade de réactions dans la cellule lorsqu’il est mis en contact avec l’ARN de cellules voisines endommagées par une blessure. Cette cascade de réactions provoque la libération de cytokines, les molécules chimiques à l’origine de la réaction inflammatoire et, à posteriori, de la réaction allergique. Lorsqu’elle est présente sur la peau, la bactérie bloque cette cascade de réaction par le biais de LTA et empêche ainsi l’apparition des symptômes allergiques. Cette étude a été publiée dans la version électronique du journal Nature Medicine [2].

D’après le Professeur Richard Gallo, qui a mené l’étude à San Diego, cette découverte donne une base scientifique à l’ "Hypothèse hygiénique" [3]. Cette théorie, proposée par David P. Strachan en 1989 dans le British Medical Journal [4] trace un parallèle entre l’augmentation importante du nombre de personnes souffrant de syndromes allergiques (eczéma et rhume des foins) et la réduction du temps passé au contact d’agents pathogènes. Selon Strachan, une mise en contact avec des agents pathogènes au cours de la petite enfance permet de réduire les risques d’apparition de syndromes allergiques. L’hypothèse développée aujourd’hui est que le mode de vie très aseptisé des pays développés empêche ce contact précoce. L’organisme devient alors beaucoup plus réactif à tout élément extérieur, même les plus bénins, ce qui favorise l’apparition de syndromes type asthme, rhumes des foins, allergies respiratoires ou alimentaires.

De nombreuses associations et groupes de pression soutiennent l’Hypothèse hygiénique en se basent sur l’augmentation des cas d’allergie dans les pays développés. On estime aujourd’hui à plus de 50 millions le nombre d’Américains souffrant d’allergies et à plus de 18 milliards de dollars le coût des traitements. En France, l’Association Française pour la Prévention des Allergies (AFPRAL) (5) donne des conseils sur la gestion quotidienne des allergies.

Source :

Dirt can be good for children, say scientists, BBC News Online, 23 November 2009 : https://newsvote.bbc.co.uk/2/hi/health/8373690.stm

Pour en savoir plus, contacts :

– [1] Sur l’anaphylaxie : https://www.urgences-serveur.fr/Anaphylaxie,31.html
– [2] Publication (abstract) : https://www.nature.com/nm/journal/vaop/ncurrent/full/nm.2062.html
– [3] Sur l’hypothèse hygiénique : https://www.hygienehypothesis.com/
– [4] Publication : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1838109/pdf/bmj00259-0027.pdf
– (5) Site de l’AFPRAL : https://www.afpral.asso.fr/index.php
Code brève
ADIT : 61378

Rédacteur :

Thomas Biedermann, [email protected]

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