Régulation des nanotech : le point de vue des scientifiques

Beaucoup de Scientifiques s’accordent à définir les nanotechnologies comme la technologie du 21e siècle. Que cette affirmation se confirme sur le long terme ou non, il n’en est pas moins que l’utilisation des nanotechnologies a déjà infiltré une grande variété de produits [1] dans bon nombre de domaines des sciences : biotechnologies, électronique, para médecine ou médecine pour ne citer qu’eux. Les revenus générés par ces produits sont estimés à 2.8 trillions de dollars d’ici 2015, d’après Global Industry Analysts Inc. C’est seulement récemment que les spécialistes en nanotechnologies en sciences sociales et les décideurs politiques ont commencé à s’intéresser aux dimensions sociales et aux régulations des nanotech. La plupart des études concernant ces aspects sont des analyses descriptives ou proposent des suggestions pour établir des normes ou réformer les régulations existantes. Une équipe de trois chercheurs en politique publique et éthique des nouvelles technologies de Arizona State University et de University of Wisconsin, menée par Dietram Scheufele a publié une étude qui cherche à aller plus loin en s’intéressant à la manière heuristique dont les scientifiques explorent les données encore incomplètes et leur points de vue personnel sur les risques des nanotech pour influer les nouvelles régulations. L’étude a été menée sur 363 scientifiques américains provenant des divers domaines couverts par les nanotech, sous forme de questionnaire. A titre d’exemple, les entrées sont du type : "Les nanotech pourraient déteriorer la vie privée avec de nouveaux systèmes de surveillance" ou "Les nanotech pourraient être utilisées par des terroristes contre les USA" ou encore "les nanotech pourraient mener à détecter et soigner des maladies plus efficacement".

Les auteurs ressortent de l’étude que les scientifiques voient les régulations comme des protections pour la société, et que c’est en partie la raison pour laquelle ils s’intéressent aux risques potentiels, alors que le public voit plutôt ces régulations comme contraignantes et limitant le nombre de produits consommables sur le marché et d’autres aspects bénéfiques des nanotechnologies. D’après l’étude, les scientifiques pensent que l’urgence de la régulation se situe dans le domaine de la protection de la vie privée et la surveillance, la médecine et la protection de l’environnement. Dans d’autres domaines, comme l’électronique et les machines mécaniques, il ressort que les scientifiques pensent que le contrôle est bien moins nécessaire voire inutile. Pour établir les nouvelles règles liées à cette technologie émergente, les décideurs politiques n’ont d’autre choix que de s’appuyer sur les recherches et les avis des scientifiques, malgré le fait que les données sur les risques sont loin d’être complètes. S’ils avaient toutes les clés en main pour prendre des décisions, les nouvelles régulations seraient faciles à mettre en place ; cependant, le manque de connaissance laisse beaucoup la place à l’avis personnel des scientifiques, d’où des discordances entre différents groupes. Les scientifiques plus conservateurs économiquement sont moins en faveur de la régulation. Bien que certains scientifiques affirment qu’ils prennent des décisions objectives dans leur domaine d’expertise, il est clair que leurs suggestions politiques prennent en compte leurs valeurs économiques personnelles. Si les scientifiques perçoivent que le marché est le mécanisme le plus efficace pour le développement d’une technologie, il supporteront moins la régulation.

D’après Scheufele, les décideurs politiques ont besoin de réaliser que quand ils demandent aux scientifiques d’apporter leur expertise et de donner des suggestions, comme ils se basent sur des résultats incomplets, ils vont donner leur jugement et leur vision personnelle.

Source :

– Accès à l’étude (19 Juin 2009) : https://www.springerlink.com/content/627323076677745q/fulltext.html
– Article sur Physorg : https://www.physorg.com/news164642077.html 19 Juin 2009

Pour en savoir plus, contacts :

[1] Inventaire des produits du marché considérés "nano" : https://www.nanotechproject.org/inventories/consumer/
Code brève
ADIT : 59723

Rédacteur :

Alban de Lassus, [email protected]

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