Polémiques autour du mariage Comcast-NBC

Une fusion verticale entre acteurs majeurs

Comcast, le plus gros câblo-opérateur des Etats-Unis, a annoncé jeudi dernier ses plans de rachat de 51% des parts du groupe NBC Universal. Ce rapprochement donnerait naissance à un géant des média qui produirait non seulement une grande partie des divertissements télévisés les plus populaires mais contrôlerait également l’accès à ces contenus.

Les conséquences d’une telle transaction ont cependant rapidement déclenché la montée au créneau des législateurs et associations de consommateurs, annonçant le début d’une épique bataille autour de la trop grande concentration de pouvoirs au sein d’une même compagnie. Comcast revendique plus de 25 millions d’abonnés à ses services et NBC Universal possède entre autres les chaînes Telemundo, MSNBC, Bravo, CNBC, les séries "Heroes" et "The Office", les droits des Jeux Olympiques 2010 et 2012 et les studios de cinéma Universal. A l’heure actuelle les deux compagnies réunies contrôlent un cinquième des heures de programmes télévisés diffusées chaque jour aux Etats-Unis.

Un mariage qui inquiète

La consolidation de ces deux acteurs majeurs fait craindre à certains une hausse du montant des factures et une limitation des contenus disponibles pour ceux qui ne disposent pas d’abonnements aux services de Comcast. Les sénateurs John D. Rockefeller IV (Dém, Virginie Occidentale), président du Commerce Committee, et Herb Kohl (Dém, Wisconsin), président du Judiciary antitrust subcommittee, ont par conséquent lancé un appel pour la tenue d’auditions visant à mesurer l’impact du rapprochement sur la concurrence et les consommateurs. Habité de la même inquiétude, le commissaire démocrate de la Federal Communications Commission (FCC) Michael J. Copps a fait part de son scepticisme sur la question de l’intérêt public de la fusion.

L’opération devra donc faire face à une longue étude des instances de régulation avant d’être entérinée et, si l’autorisation venait à être accordée, elle sera vraisemblablement assortie de strictes conditions. Une grande partie du débat entre les régulateurs concernera l’impact de cette fusion sur l’avenir des programmes télévisés et sur la manière dont ceux-ci pourront être visionnés dans un paysage où les téléphones mobiles et les ordinateurs grignoteront peu à peu la part du bon vieux téléviseur. La transaction devra par ailleurs survivre au triste historique des précédentes fusions entre géants de médias et notamment de l’association désastreuse d’AOL et Tim Warner.

Du point de vue de l’organisation du processus d’évaluation de la fusion, la FCC sera en charge d’estimer si le rapprochement est bénéfique pour les consommateurs pendant que le Department of Justice et/ou la Federal Trade Commission devront déterminer si la fusion est susceptible de compromettre la concurrence sur le marché.

Les arguments de Comcast

Le PDG de Comcast, Brian Roberts, s’ingénie de son côté à vanter les synergies offertes par la fusion et affirme que l’opération sera bénéfique pour les consommateurs : "ils auront accès à des types de contenus variés sur différentes plateformes accessibles à différents instants". Afin d’apaiser les régulateurs, Comcast s’est engagé sur un certain nombre de mesures d’équité du marché : la conservation des stations locales de NBC, la diversification de ses offres et le partage de programmes et de chaînes avec ses concurrents.

Impacts sur la vidéo en ligne

Les défenseurs des consommateurs s’inquiètent tout particulièrement de l’impact de la transaction sur le marché à forte croissance de la vidéo en ligne, où les nouveaux opérateurs Hulu, Youtube, Vuze, Roku et Netflix sont en train de modifier le paysage des média grâce à des produits gratuits ou très bon marché. Propriété à 27% de NBC, le site de vidéo à la demande Hulu continuera, au moins dans un premier temps, à proposer son répertoire de programmes gratuits à tous et ne devrait pas être directement victime de la stratégie de Comcast et de son service "TV everywhere" proposant différentes offres de vidéo en ligne pour ses abonnés.

Cette fusion servira par ailleurs de test pour observer la façon dont les régulateurs traitent le marché vidéo sur Internet, qui ne tombe pas directement sous la juridiction de la FCC. L’agence explore cependant la concurrence sur la vidéo en ligne et pourrait se servir de la fusion Comcast-NBC pour mettre en place des conditions établissant des règles de conduite pour ce marché bourgeonnant. En 2005, la FCC avait imposé des conditions sur la fusion entre AT&T et Bell South qui avaient empêché le groupe de contrôler l’accès à Internet et les associations de consommateurs espèrent qu’elle agira dans le même sens en adoptant des règles similaires en échange de l’autorisation de la transaction de Comcast.

Source :

– Cable giants to put shows online, 3 décembre 2009 – https://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2009/12/02/AR2009120203676.html
– Merger plans for Comcast, NBC ignite battle over television access, 4 décembre 2009 – https://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2009/12/03/AR2009120300947.html?hpid=moreheadlines
– Comcast-NBC Universal: Same old media merger, or something different? 1er décembre 2009 – https://voices.washingtonpost.com/economy-watch/2009/12/in_my_previous_life_before.html

Pour en savoir plus, contacts :

Les dernières actualités autour de la fusion du point de vue de Comcast : https://blog.comcast.com/
Code brève
ADIT : 61547

Rédacteur :

Franz Delpont, [email protected]

Partager

Derniers articles dans la thématique