Le cloud computing et Google Apps, enjeux politiques

Le cloud computing [1] est en train d’introduire une dimension politique dans l’informatique. Les électeurs débattent parfois de l’utilité d’une nouvelle bibliothèque mais préfèrent déléguer les questions d’infrastructure informatique aux responsables des systèmes d’information. Les solutions de SaaS (Software as a Service) offertes par les plateformes de "cloud computing" sont en effet de plus en plus utilisées par les consommateurs et ces derniers se demandent pourquoi le Gouvernement ne se tourne pas vers ces services efficaces et très bon marché.

L’Etat de Washington inaugure ce mois-ci un nouveau centre de traitement de données qui est déjà décrié par certains parlementaires de l’Etat. Ces derniers auraient préféré déléguer une partie des ressources informatiques de l’Etat à des opérateurs privés du cloud tels que Google, Amazon ou Microsoft. "L’externalisation des solutions logicielles est sans aucun doute l’avenir" affirme le représentant démocrate de Seattle Reuven Carlyle.

Le débat public sur les choix technologiques met petit à petit sur le devant de la scène les responsables des systèmes d’information, tels que Tony Totorice, ancien responsable des systèmes d’information (CIO) du Los Angeles Unified School District et désormais CIO de l’Etat de Washington. La décision de construire le nouveau centre de traitement de données de 6.000 mètres carrés n’est pas de son fait et a été prise bien avant sa prise de fonction, mais il aura peu de marge de manoeuvre pour initier une transition vers le cloud puisqu’à proximité directe du Capitole tournent déjà plusieurs milliers de serveurs X86 non-virtualisés et sous utilisés au sein d’une demi-douzaine de centre de traitement de données. L’externalisation auprès d’un fournisseur de services du cloud n’est par ailleurs pas possible de façon massive pour des raisons de sécurité et de compatibilité avec les applications utilisées jusqu’à présent par l’Etat.

Selon M Totorice, l’objectif sera donc de consolider le nombre de centres de données et de standardiser les serveurs sur Microsoft Exchange 2010. Quant à la question du passage au cloud, M. Totorice estime que l’hypothèse ne doit pas être écartée et reste conscient des économies budgétaires possibles mais n’est pas encore convaincu que les critères de sécurité soient aujourd’hui réunis pour pouvoir envisager une transition.

Les groupes de pression installés dans la capitale fédérale pèsent également sur les débats. "Citizens Against Government Waste", un groupe de réflexion cofinancé par Microsoft et militant notamment contre l’utilisation de logiciels libres par le Gouvernement, a averti que l’adoption de Google Apps par la ville de Los Angeles aurait un "impact négatif" sur les contribuables.

A Los Angeles, un comité municipal devait remettre à l’étude la proposition de migration des 30.000 employés municipaux vers Google Apps en août mais la réunion a été repoussée à une date ultérieure. La ville estime que certains risques subsistent autour de cette migration. Dans un récent rapport [2], des experts en systèmes d’information font savoir qu’un abandon des services de Microsoft Office et de Novell GroupWise serait une décision importante en raison des coûts prohibitifs d’un retour à la situation antérieure où la structure est gérée par la Ville. Le département informatique de la ville a cependant vanté les mérites d’une transition vers Google, mettant en avant des services de meilleure qualité que ceux offerts par la Ville et les économies budgétaires pour les finances municipales.

Concernant la sécurité, Pam Dixon, directrice exécutive du World Privacy Forum s’interroge sur la façon dont le stockage en ligne de données médicales peut remplir les critères fédéraux de respect de la vie privée. "La migration vers le cloud signifie que les données vivent dans réalité juridique complètement différente" affirme-t-elle. La question de la sécurité se pose aux instances gouvernementales comme elle s’est déjà posée aux entreprises et l’intérêt d’une migration vers le cloud varie selon la taille de la structure, la sensibilité des contenus hébergés et les moyens financiers à disposition. Il n’existe pas de solution unique au problème, l’enjeu étant un arbitrage entre d’un côté économies réalisables et robustesse de l’infrastructure et de l’autre confidentialité et fonctions spécifiques.

Le Gouvernement fédéral, quant à lui, a déjà commencé à s’orienter vers les services de SaaS. L’armée utilise Salesforce.com pour son recrutement et le CIO fédéral Vivek Kundra [3] a adopté Google Apps au District de Columbia lors de son précédent mandat.

Source :

– Gouvernement 2.0 – https://www.bulletins-electroniques.com/actualites/58159.htm
– Panel examines security hurdles on road to successful cloud computing adoption – https://www.it-director.com/business/change/content.php?cid=11510
– Los Angeles gets its Google Apps groove – https://news.cnet.com/8301-27080_3-10313846-245.html
– Cloud computing, Google Apps turn into an election issue – https://www.computerworld.com/s/article/9136291/Cloud_computing_Google_Apps_turn_into_an_election_issue_?source=rss_gov

Pour en savoir plus, contacts :

– [1] Le cloud computing : https://fr.wikipedia.org/wiki/Informatique_dans_les_nuages
– [2] Le rapport : https://cityclerk.lacity.org/lacityclerkconnect/index.cfm?fa=ccfi.viewrecord&cfnumber=09-1714
– [3] Vivek Kundra et les nouveaux visages de la politique technologique d’Obama : https://www.bulletins-electroniques.com/actualites/58862.htm
Code brève
ADIT : 60446

Rédacteur :

Franz Delpont, [email protected]

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