La question de la neutralité pour l’Internet

En août 2005, la Federal Communications Commission (FCC) dérégulait les services d’accès haut débit (voir Revue TIC n°103). Néanmoins, l’Agence précisait à l’époque les principes de son action sur ce marché, pouvant aboutir éventuellement à des décisions réglementaires ex-post (voir ci-contre). Ainsi, la Commission s’attachait au principe de neutralité pour l’Internet, le consommateur devant pouvoir accéder à toutes les applications et services qu’il souhaite, notamment les services de voix ou de vidéo sur IP de fournisseurs indépendants. Depuis, le débat sur cette question de neutralité occupe de plus en plus le devant de la scène. A l’occasion du Consumer Electronics Show (CES) qui s’est tenu du 5 au 8 janvier 2006 à Las Vegas, Kevin Martin, Président de la FCC, a expliqué que l’Agence ne disposait pas de l’autorité nécessaire pour faire respecter ce principe de neutralité. Même si la FCC s’opposerait, dans la limite de ses pouvoirs, au blocage de contenu spécifique, Kevin Martin considère normal la mise en place d’offres d’accès différenciées en fonction du débit et de classe de service, nécessaires par exemple pour la bonne utilisation de services de téléchargement de contenu "concurrents" de ceux développés par les fournisseurs d’accès Internet. Alors que de nombreux services de téléchargement de contenu audiovisuel se mettent en place, notamment par Google, AOL ou Microsoft, ces derniers souhaitent que le Congrès intervienne et définisse de manière claire et précise un cadre pour cette neutralité. Si la menace d’un blocage pur et simple reste relativement hypothétique, celle d’une différenciation entre services du fournisseur d’accès et service de fournisseurs tiers apparaît plus probable, sachant que les principaux fournisseurs d’accès Internet haut débit aux Etats-Unis, opérateurs de télécommunications et câblo-opérateurs, ont investi énormément pour déployer des services avancés (Video-On-Demand, DVR, IPTV), fortement rémunérateurs. S’exprimant aussi à l’occasion du CES, le Chairman & CEO de Verizon, Ivan Seidenberg, a ainsi déclaré que les fournisseurs tiers de contenu (Google et Microsoft par exemple) devraient participer à l’effort de financement lié au déploiement des réseaux à très haut débit, pour permettre à leurs abonnés de disposer d’une bande passante suffisante à la bonne exploitation des services – sans quoi la mise en place de forfaits différenciés apparaît inéluctable. Néanmoins, les fournisseurs d’accès ont tout intérêt à s’entendre avec les fournisseurs de contenus, une bataille commerciale n’ayant pas de sens alors que les complémentarités semblent évidentes (Verizon et SBC collaborent ainsi déjà de manière étendue avec Yahoo). Par ailleurs, le rapport de force n’est pas forcément en faveur des opérateurs de télécommunications ou des câblo-opérateurs. Si les capitalisations boursières de Google et Yahoo par exemple, ont progressé en 2005, celle de Verizon a fortement diminué. Verizon a ainsi indiqué ainsi être en discussion avec Google pour que ce dernier rétribue l’opérateur en contrepartie d’une garantie sur les débits à destination de ses clients. De même BellSouth vient d’entamer des négociations avec MovieLink, pour son service de téléchargement de vidéo et films par Internet.

Source :

Revue TIC n°103

Rédacteur :

Michel Combot, [email protected] (ME)

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