Dernières avancées scientifiques sur le changement climatique : audition au Sénat dans une atmosphère tendue

Selon une étude publiée le 23 février par le PNAS ("Proceedings of the National Academy of Sciences"), les risques associés au réchauffement climatique seraient bien plus importants que ceux présentés dans le cadre du rapport de l’IPCC ("Intergovernmental Panel on Climate Change") paru en 2001. En effet, les travaux du PNAS présentent des analyses complémentaires basées sur les observations des impacts visibles du changement climatique ainsi que sur une meilleure compréhension des risques associés. Ce travail a été incorporé au rapport de l’IPCC sous forme d’amendement.

D’après les résultats de Hans-Martin Füssel (chercheur au "Postdam Institute for Climate Impact Research" et corédacteur de l’amendement), toute augmentation de la température, aussi petite soit-elle, peut impliquer des changements à grande échelle et nécessite une attention particulière. La compréhension de principes tels que la répartition du réchauffement climatique à l’échelle planétaire ou encore la notion de discontinuité entre les écosystèmes sera l’un des facteurs clés dans l’analyse des risques environnementaux. Par exemple, le concept d’échelle sera primordial pour l’évaluation du devenir d’écosystèmes tels que les barrières de corail.

Ces conclusions ont par ailleurs été complétées par le travail de Chris Field (directeur du département "Global Ecology" à l’université de Stanford et membre de l’IPCC), publié le 15 février dernier. D’après ses recherches, les GES (Gaz à Effet de Serre) se seraient accumulés bien plus rapidement que prévus dans l’atmosphère depuis les années 2000.

Afin d’informer les politiques sur ces derniers résultats scientifiques, Chris Field a présenté ce mercredi 25 février au Sénat les différents types d’impacts prévisibles en réponse au changement climatique et leurs coûts pour la société. Il était invité par la commission "Environment and Public Works" aux côtés de Rajendra K. Pachauri (directeur de l’U.N. IPCC), Howard Frumkin (directeur du "National Center for Environmental Health" et du "Center for Disease Control and Prevention") et de William Happer (professeur de physique à l’université de Princeton).

Alors que l’audition devait porter sur "les dernières avancées scientifiques sur le changement climatique", la thématique centrale abordée fut la controverse portant sur l’origine anthropique du changement climatique. Les débats ont ainsi mis en évidence la présence de deux clans : d’une part des sénateurs démocrates pro environnement menés par la sénatrice Boxer (D, Californie) et souhaitant des actions fortes dans le but de réduire l’impact du changement climatique, et d’autre part un nombre plus restreint de sénateurs (républicains) menés par le sénateur Inhofe (R, Oklahoma), dont le scepticisme concernant l’origine du réchauffement climatique est apparu tout au long de l’audition.

Au coeur de cette polémique se situe la notion d’incertitude. Si tout un faisceau d’indices concorde à prouver l’origine anthropique du réchauffement climatique, il n’en reste pas moins pour le sénateur Inhofe que les actions préconisées pour lutter contre le changement climatique sont le résultat de modélisations provenant de l’IPCC et ne sont donc qu’une image partielle de la réalité, ne tenant compte que de certaines variables. Il conteste notamment le montant des aides financières à accorder à la lutte contre le réchauffement climatique (qu’il estime à 6 700 milliards de dollars contre 787 milliards pour le plan de relance de l’économie américaine) dont l’origine anthropique n’est pas avérée à ses yeux. Selon lui, ces dépenses ne doivent pas être considérées comme l’une des priorités du gouvernement à un moment où l’économie américaine connaît une crise profonde. En réponse à ces arguments, la sénatrice Boxer a justement rappelé qu’il s’agit là d’investissements, citant sa volonté de mettre en place un marché de permis d’émissions de GES pour relancer l’économie américaine. A ce sujet, le président Barack Obama a annoncé lors de son discours du 24 février 2009 sa ferme intention de valider une loi sur les permis d’émissions de GES ("Carbon Cap and Trade") dans le courant de l’année.

Cette controverse a aussi fait l’objet d’un débat parmi les invités. William Happer s’est montré sceptique quant aux actions proposées par C. Field, R.K. Pachauri et H. Frumkin. Selon lui, les institutions soutenant l’IPCC font une "grave erreur", l’augmentation de la concentration du dioxyde de carbone pouvant avoir des répercussions positives sur l’économie américaine comme par exemple dans l’agriculture. Cette audition reflète ainsi la division toujours présente au sein de la communauté scientifique et politique et l’ampleur du travail à accomplir pour mettre en place une réglementation du dioxyde de carbone avant la fin de l’année.

Source :

– Audition au Sénat "Update on the Latest Global Warming Science." (25/02/2009)
– Site de la commission "Environment and Public Works" :
https://epw.senate.gov/public/index.cfm?FuseAction=Hearings.Hearing&Hearing_id=864d3319-802a-23ad-46a0-15d3b819178d
– Climate change risk underestimated: study. (24/02/2009) – https://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5i5oM4YQeSH565Cdm2UTUdlXIO6kA
https://www.grist.org/news/2009/02/24/climatestudy/index.html?source=rss#
– The President’s address (Update: photos, video, full remarks, and excerpt translations). 24/02/2009 – https://www.whitehouse.gov/blog/09/02/24/The-Presidents-address-Excerpt/

Pour en savoir plus, contacts :

Site de l’ "Intergovernmental Panel on Climate Change". https://www.ipcc.ch/
Code brève
ADIT : 57984

Rédacteur :

Agathe Dumas ([email protected])

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