Séminaire des lauréats nord-américains du programme « Make Our Planet Great Again » à Washington D.C.

L’action phare de l’initiative “Make our Planet Great Again” (MOPGA) lancée par le Président Macron en juin 2017, à savoir le programme d’accueil dans des laboratoires français de scientifiques du climat et de l’environnement du monde entier pour des séjours de recherche “longs”  (trois ans minimum), arrive à son terme. L’Allemagne, qui a rejoint MOPGA dès juillet 2017, accueillera la conférence de clôture à Berlin les 6-7 décembre 2022.

Quarante-quatre séjours de recherche longs ont été financés par la France, pour un montant total de 60M€ (30M€ par l’ANR, et autant par les laboratoires d’accueil des lauréats). Les lauréats ont reçu un financement jusqu’à 1M€ pour un chercheur junior et 1,5M€ pour un chercheur senior. Leurs spécialités se répartissent en trois grandes catégories : “sciences du système Terre”, “changement climatique et développement durable”, “sciences et technologies de la transition énergétique”.

Le Service pour la Science et la Technologie (SST) de l’Ambassade de France, en partenariat avec le CNRS,  a convié les 24 lauréats du programme issus d’institutions nord-américaines à un séminaire dans ses locaux de Washington, les 17-18 octobre 2022. Douze d’entre eux ont pu faire le déplacement.

Les lauréats du programme MOPGA et les représentants d’institutions nord-américaines présents à l’Ambassade pour le séminaire.

 

Etaient également représentés, côté français, le Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères (MEAE), le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (MESR), l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et les organismes de recherche dont les laboratoires ont accueilli des lauréats (CNRS, IRD, INRAE, CEA) ; et côté américain, l’Office for Science and Technology Policy (OSTP) de la Maison Blanche, la National Science Foundation (NSF), principale agence de financement de la recherche publique américaine, ainsi que la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA).

La session du 17 octobre a été principalement consacrée aux retours d’expérience et résultats obtenus par les lauréats. Après les mots d’accueil de l’Ambassadeur, l’historique du programme a été rappelé par M. Stéphane Blanc, Directeur de l’Institut Ecologie et Environnement (INEE) du CNRS, et M. Yvan Lagadeuc, Conseiller Scientifique à l’ANR. Ils ont souligné que MOPGA avait été une expérience pilote pour les “Programmes et Equipements Prioritaires de Recherche” (PEPR) lancés depuis par le gouvernement français dans le cadre du plan France 2030.

Echanges et réflexions lors de la table ronde sur les sciences de la terre et du climat.

 

Sur le plan scientifique, la productivité du programme est attestée par près de 360 publications dans des revues internationales, parmi les plus prestigieuses : Nature, Science, Proceedings of the National Academy of Sciences, Sustainable Renewable and Sustainable Energy Review, One Earth, Applied physics review, Science advances, etc.

Au-delà de leurs résultats de recherche, les lauréats ont été invités à témoigner de l’apport du programme au développement de leurs carrières et de leurs collaborations.

Outre le financement, la sélection par MOPGA a apporté aux chercheurs une visibilité dans leur communauté, qui a aussi profité à l’attractivité de leurs enseignements.

Un atout distinctif de MOPGA, souligné par les lauréats, est une souplesse dans l’orientation et la conduite des recherches plus grande que dans les appels à projets classiques des agences américaines et françaises. Ils ont eu la liberté d’aborder des sujets risqués, de réorienter leurs recherches, de s’investir dans des actions de dissémination et de médiation scientifique en direction de la société et du jeune public. Ils ont également salué la relative faible charge administrative du programme, en comparaison d’autres subventions, qui leur a permis de se consacrer pleinement à leurs recherches.

Les lauréats ont construit de facto des collaborations transatlantiques, en mobilisant les ressources humaines et matérielles de leurs universités et centres de recherche d’origine, en les complétant avec d’autres sources de financements. L’impact des projets et leur acceptation par les établissements américains d’origine des chercheurs s’en sont trouvés augmentés.

Le mot de clôture de la session du 17 octobre a été délivré par M. Philip Duffy,  Conseiller de la Maison Blanche pour la recherche sur le climat, qui a salué la qualité de la collaboration franco-américaine et souligné l’urgence d’agir, notamment face aux possibles “points de basculement” du système climatique  évoqués dans plusieurs interventions des lauréats.

En soirée, un public nombreux est venu assister à la conférence de Susan Solomon, professeure de chimie atmosphérique et de sciences du climat au MIT, présidente du Groupe I du 4e rapport d’évaluation du GIEC. Dans son exposé “Solvable:  How We’ve Repaired the Planet Before, and Why We Can Do It Again”, Susan Solomon a tiré les leçons de deux antécédents de menaces environnementales majeures, induites par des activités humaines, qui ont pu être contrées grâce à l’alerte donnée par les scientifiques, la mobilisation de la société, l’envoi de signaux incitant l’industrie à anticiper les changements de régulations et à mettre en oeuvre des solutions alternatives : la destruction de l’ozone stratosphérique par les émissions de chlorofluorocarbones, et le “smog” urbain chargé en ozone résultant des gaz d’échappement. La conférence et les discussions ont porté sur la transposition de ces leçons à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, notamment dans le secteur de l’énergie.

La professeure Susan Solomon lors de sa conférence “Solvable:  How We’ve Repaired the Planet Before, and Why We Can Do It Again”.

 

La session du 18 octobre a été consacrée à une réflexion sur les suites à envisager pour le programme MOPGA.

Le SST, le CNRS et l’ANR ont resitué les thématiques de MOPGA par rapport aux priorités définies lors du dernier Comité Mixte Franco-Américain pour la Science et la Technologie des 6-7 décembre 2021.  Ils ont rappelé la gamme d’outils de collaboration actuellement disponibles : fonds bilatéraux, bourses de mobilité, financements de séjours croisés de doctorants et de post-docs, laboratoires internationaux. Le centre de recherche international (IRC) CNRS-Université d’Arizona, intitulé “France-Arizona Institute for Global Grand Challenges” a été présenté comme un des exemples de collaborations les plus abouties et structurées dans le domaine.

La NSF a également présenté ses outils de financement, et des exemples de collaborations avec la France en sciences de l’environnement, notamment avec le CNRS et le https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg.

Un volet important des discussions a concerné l’identification de thématiques pour lesquelles le cadre bilatéral a une valeur ajoutée spécifique par rapport au cadre multilatéral (via notamment le Belmont Forum) ou au cadre euro-américain (via notamment la participation de laboratoires américains à des projets Horizon Europe en tant que membres associés). Vu l’importance de la comparaison des modèles climatiques, les séjours de scientifiques issus d’équipes de modélisation américaines  au sein d’équipes françaises, ou inversement, sont apparus comme particulièrement utiles, de même que les séjours croisés dans les grandes infrastructures de recherche des deux pays. Le format bilatéral est aussi apparu comme permettant d’avancer sur des solutions, pouvant être proposées ensuite dans un cadre plus large, en matière d’harmonisation, d’interopérabilité et d’ouverture des données. Ces aspects peuvent contribuer à leur pérennité et à la constitution de séries longues, enjeu clé en sciences du climat.

Les discussions ont abouti à la recommandation de mettre en place un nouveau programme en sciences du climat, de l’environnement et de la durabilité, qui prendrait le relais de MOPGA,  dans une logique de réciprocité, de gouvernance partagée et de mobilités croisées. A également été proposée la création d’une communauté des alumnis du programme, qui pourrait prendre la forme d’un International Research Network (IRN), un des outils de coopération internationale coordonné par le CNRS.

 

Rédacteur

Joaquim Nassar, Attaché pour la Science et la Technologie à l’Ambassade de France à Washington D.C., [email protected]

 

Référence

Le livret des résumés des travaux de recherche des lauréats MOPGA est téléchargeable ici.

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