Alors que les pesticides sont déjà connus pour faire des ravages sur l’ensemble des populations d’amphibiens, de nouvelles données semblent montrer que les problèmes sont sous-estimés. En effet, l’un des herbicides les plus communs, l’Atrazine, semble avoir un effet délétère sur les salamandres en les rendant beaucoup plus sensibles aux infections.
Utilisée pour contrôler le développement des mauvaises herbes sur le maïs, la canne à sucre ou les pelouses résidentielles, l’Atrazine est le second herbicide en terme d’utilisation aux Etats-Unis. Depuis longtemps, les scientifiques ont montré que chez les grenouilles et autres amphibiens, ce composé mime l’action d’une hormone nommée oestrogène, affectant les organes génitaux et le larynx. L’Atrazine a été mise sur le marché en 1958 mais ce n’est que récemment (à la fin des années 90) que les scientifiques ont noté l’augmentation des maladies d’origine fongiques et virales chez les amphibiens. Des études avaient confirmé l’effet immunosuppresseur de l’Atrazine mais l’augmentation de la susceptibilité aux infections restait un mystère.
Pour expliquer ces effets, les biologistes Diane Denise Forson et Andrew Storfer de l’Université de l’Etat de Washington à Pullman ont mené leurs expériences sur la salamandre tigre, petit amphibien retrouvé dans les marécages et les étangs. En effet, l’habitat de ces animaux est souvent exposé à l’Atrazine et les scientifiques ont noté une augmentation des infections par le " Ambystoma tigrinum Virus " (ATV), qui provoque des hémorragies internes et la mort de cet animal.
Les chercheurs ont donc exposé 384 salamandres à l’état larvaire à des concentrations du produit semblables à celles retrouvées dans la nature. Ensuite, après 12 semaines de développement, ils les ont exposé au virus ATV pendant 3 semaines.
Les résultats présentés dans le journal Ecological Applications montrent que les salamandres exposées à l’Atrazine sont deux fois plus sensibles à l’infection. Lorsque l’Atrazine est combinée avec un engrais tel que le nitrate de sodium, les niveaux de lymphocytes diminuent d’environ 20%.
Pour Storfer, les animaux sont particulièrement exposés. De plus, la peau des amphibiens est perméable, si bien que les toxines peuvent parvenir directement dans le flux sanguin. D’autre part, du fait de leur perméabilité aux toxines, les oeufs sont révélateurs des contaminations environnementales
Pour Andrew Blaustein, un écologiste de l’Université de l’Etat de l’Oregon à Corvallis, cette étude met en lumière l’un des rares cas avérés d’augmentation des infections chez l’animal. Selon Tyrone Hayes, biologiste à l’Université de Californie de Berkeley, les mécanismes d’immunosuppression restent un point important à déterminer car des études ont associé l’Atrazine aux cancers du sein et de la prostate. En France, l’utilisation de l’Atrazine est totalement interdite depuis 2003.
Source :
– https://sciencenow.sciencemag.org/cgi/content/full/2006/1208/2
– "Effects of atrazine and iridovirus infection on survival and life-history traits of the long-toed salamander (Ambystoma macrodactylum)." (2006), Forson D. Environ Toxicol Chem. 25(1) pp168-73.
Pour en savoir plus, contacts :
– https://en.wikipedia.org/wiki/Atrazine
– https://en.wikipedia.org/wiki/Tiger_Salamander
– https://cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=14123249
Code brève
ADIT : 40499
Rédacteur :
Brice Obadia [email protected] – Hedi Haddada [email protected] – Sophia Gray [email protected]