Environnement et climat : Les financements fédéraux disponibles aux Etats-Unis en 2022 pour la recherche et l’innovation

Capitole

Beaucoup d’attentes reposaient sur l’administration de Joe Biden avec l’espoir de rompre avec l’ère Trump concernant la lutte contre le changement climatique et la protection de l’environnement. Le président élu s’était engagé à un effort “whole-of-government”, sans précédent pour reprendre pied dans l’agenda international sur ces sujets, remettre la science au cœur du débat et mobiliser les moyens adaptés. Promulguée en décembre 2020 avant la prise de fonction de Joe Biden, la loi pluriannuelle de programmation Energy Act avait constitué un premier pas, bipartisan, dans ce sens en fixant les grands objectifs et moyens en matière de politique énergétique aux Etats-Unis pour la période 2021-2026. Les ministères et les agences fédérales vont également bénéficier de dotations supplémentaires pour la recherche en environnement, énergie et technologies propres à travers le grand plan d’investissement Infrastructure Investment and Jobs Act qui en accord avec ces objectifs ambitieux. Cette politique volontariste devrait conduire à un doublement des budgets pour la R&D et l’émergence de nouvelles filières dans ces domaines, pour les 5 prochaines années au moins.

L’Energy Act 2020 fixe une trajectoire ambitieuse pour l’innovation et le développement des filières technologiques de l’énergie pour la période 2021-2026

L’Energy Act of 2020 est une loi pluriannuelle qui fixe les objectifs et moyens de la politique énergétique américaine à moyen terme. L’adoption de cette première loi de programmation sur l’énergie depuis plus de dix ans témoigne d’un large soutien en faveur de la construction d’une économie zéro carbone qui nécessite une approche globale au cours de la prochaine décennie. Cette loi affiche des objectifs ambitieux pour que “l’Amérique conserve son leadership mondial” et augmente les financements clés en matière d’énergie propre de plus de 50 % en moyenne au cours des cinq prochaines années.

Concernant le volet R&D, elle planifie un investissement de 35 milliards de dollars sur 5 ans (2021-2026), modernise et recentre les programmes de recherche et de développement du DOE sur les défis technologiques les plus urgents, en développant les technologies d’énergie propre comme le nucléaire avancé, le stockage d’énergie de longue durée, le captage du carbone et la géothermie. Pour toutes ces technologies, le DOE est désormais habilité à lancer un programme de démonstrateurs à l’échelle commerciale présenté comme le plus ambitieux de l’histoire récente des États-Unis.

L’Infrastructure Investment and Jobs Act : des moyens importants pour le déploiement de projets technologiques pilotes pour l’environnement

Promulgué par le Président Joe Biden le 15 novembre 2021 et bénéficiant d’un soutien bipartisan, le Infrastructure Investment and Jobs Act est un plan d’investissement de plus de 1000 milliards de dollars sur 5 ans dans les infrastructures américaines: routes, ponts, ports, réseaux électriques et numériques, etc. Il vient en complément du budget fédéral pour 2022, et permet notamment de satisfaire voire de surpasser les objectifs fixés dans l’Energy Act 2020.

Environ 33 milliards de dollars sont destinés sur 5 ans à la recherche et au développement de filières en environnement et technologies propres, avec une forte polarisation vers les projets de démonstration liés au secteur de l’énergie qui viennent en accord avec l’Energy Act (environ 32 milliards pour le DOE et près de 500 millions pour la NOAA).

Une grande partie des dépenses de R&D et des technologies prévues dans cette loi bipartisane découle des propositions de la commission sénatoriale “énergie et des ressources naturelles”, présidée par le sénateur Joe Manchin (D-WV). Certains des programmes financés par ce paquet sont nouveaux et ont été nouvellement autorisés dans le cadre du projet de loi sur les dépenses. D’autres lignes budgétaires renforcent les programmes déjà soutenus dans le cadre de l’Energy Act 2020.

Au total, le budget fédéral 2022 consacrerait près de 15 milliards de dollars à la R&D pour l’environnement et le climat

Singularité du calendrier américain, la loi budgétaire 2021 a été promulguée le 27 décembre 2020, soit quelques semaines avant la prise de fonction du Président élu Biden. Le budget 2022 sera donc le premier budget issu de l’administration Biden. A la rédaction de cet article, le vote de la loi budgétaire 2022 au sénat est reporté à la mi-mars, mais les budgets qui nous intéressent semblent donner lieu à un consensus bipartisan. Les détails du budget disponible pour l’année en cours présentés ci-après correspondent ainsi à la proposition faite par la Maison Blanche, ensuite ajustée par la Chambre des représentants et en attente de validation par le Sénat. Néanmoins, ceux-ci ne devraient pas connaître de variations notables.

Pour l’année 2022, sur les 1 400 milliards de dollars de budget fédéral (qui n’inclue pas les plans de relance), 171,2 milliards de dollars (+16 Mds$ par rapport à 2021) alimentent les activités de recherche et développement (incluant la R&D pour la défense qui représente 68,6 milliards de dollars) selon la répartition suivante :

  • 47,4 milliards de dollars pour la recherche fondamentale
  • 51,2 milliards de dollars pour la recherche appliquée
  • 68,1 milliards de dollars pour le développement expérimental des technologies
  • 4,6 milliards de dollars pour les infrastructures de recherche et développement

En ce qui concerne les thématiques énergie et environnement, les financements de R&D sont partagés entre différents Ministères et agences fédérales pour un montant total proche de 15 milliards de dollars soit près de 9% du budget fédéral de R&D total.

A ce stade des négociations, quasiment finalisées au congrès, la répartition serait la suivante:

  • Le Department of Energy (DOE) bénéficierait de plus de la moitié de ce budget recherche (7,677 milliards de dollars) pour soutenir les différents domaines de la transition énergétique: énergies renouvelables, gestion du carbone, efficacité des bâtiments, transports propres, industrie, agriculture.
  • La National Aeronautic and Space Administration (NASA) serait financée à hauteur de 2,250 milliards de dollars principalement sur les missions d’observation de la Terre et la recherche dans les domaines tels que le changement planétaire, les intempéries, l’atmosphère, les océans, la cryosphère, et la surface terrestre.
  • La National Science Foundation (NSF) se verrait dotée d’un budget de 1,969 milliards de dollars pour des activités en lien avec les énergies propres, les sciences du climat, la biologie pour l’environnement, les géosciences, les sciences de l’atmosphère, l’ingénierie environnementale ou encore les changements globaux.
  • La National Oceanic & Atmospheric Administration (NOAA) soutiendrait les recherches sur le climat, la météorologie et la chimie de l’air, ainsi que sur les océans, les milieux côtiers et les Grands Lacs avec 1,209 milliard de dollars.
  • Le United States Geological Survey serait financé à hauteur de 844 millions de dollars notamment sur l’étude des matériaux critiques, des ressources en eau, des risques naturels ou des écosystèmes.
  • L’Environmental Protection Agency (EPA), dont la composante R&D est une activité mineure, consacrerait tout de même 545 millions de dollars sur la recherche environnementale comprenant la pollution de l’air et de l’eau, l’étude des écosystèmes, la chimie et la santé ou encore le climat.
  • Le US Department of Agriculture (USDA) disposerait de 192 millions de dollars pour la recherche sur l’adaptation des pratiques agricoles au changement climatique.

 

Rédacteur: Benoit Faivre, Attaché adjoint pour la Science et la Technologie à Washington D.C., [email protected]

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