La lutte contre le coronavirus vue de Boston

Retour sur la lutte contre la pandémie à ses débuts, vue de l'écosystème de Boston.
  • Les épidémiologistes de la Harvard S. Chan of Public Health prédisaient que 40-70% de la population serait atteinte par le coronavirus au cours d’une pandémie qui deviendrait probablement saisonnière.
  • La CDC craignait la présence de cas non détectés aux Etats-Unis et testait des échantillons de façon aléatoire dans 6 grandes villes et les agences fédérales d’intelligences missionnaient un chercheur à Hong-Kong afin de savoir ce qui se passait réellement en Chine
  • Les universités bostoniennes se préparaient à la fermeture des campus et anticipaient l’impact financier et scientifique résultant de l’absence importante d’étudiants/postdoctorants chinois.
  • La Harvard Medical School et l’Institut des maladies respiratoires de Guangzhou s’associaient pour travailler sur le coronavirus dans le cadre d’un programme de 5 ans financés à hauteur de $115 millions.
  • Moderna livrait son premier lot de vaccin candidat au NIH en vue d’essais cliniques de phase I démarrant dès avril.

Pour Marc Lipsitch de la Harvard T.H. Chan School of Public Health, l’épidémie de coronavirus sera globale, infectant de 40 à 70% des personnes et destinée à devenir saisonnière.

Marc Lipsitch, T. H. Chan School of Public Health, a été l’un des premiers à prédire que si l’épidémie COVID-19 n’était pas maîtrisée, 40 à 70 % des personnes dans le monde pourraient être infectées par SAR-CoV-2i. Des projections similaires ont été faites par Ira Longini, biostatisticien et conseiller auprès de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et Gabriel Leung, titulaire de la chaire de médecine de santé publique à l’université de Hong Kong.ii Les coronavirus n’entraînant pas une immunité durable dans l’espèce humaine, Marc Lipsich avait aussi estimé cette épidémie pouvait devenir saisonnière et que la « saison du rhume et de la grippe » pourrait devenir la « saison du rhume, de la grippe et de la COVID-19« .

Afin d’estimer la prévalence du virus dan la population, le CDC a d’ailleurs lancé une campagne de détection dans six villes américaines, Chicago, New York, Los Angeles, San Francisco et Seattle, grâce à son réseau national de surveillance de la grippe. Ce projet du CDC a temporairement arrêté suite à l’envoi de tests défectueux mais des préoccupations financières menacent également le déploiement des tests coronavirus au niveau des États et des collectivités localesiii.

Les universités de la place bostonienne se préparent au pire

Les universités de la place bostonienne ont très rapidement préparé des plans de contingence visant à anticiperles répercussions d’une absence importante de nouveaux étudiants et post-doctorants chinois résultants de la pandémie dans un contexte où les universités américaines sont en partie dépendantes, économiquement – des frais de scolarités perçus auprès des nombreux étudiants chinois, scientifiquement – de la grande quantité de post-doctorants chinois venant travailler dans les laboratoires américains grâce à des bourses du gouvernement chinois.

Par ailleurs, les universités ont anticipé très tôt la possibilité de fermeture du campus en raison de l’émergence de nouveaux cas de coronavirus au sein de sa communauté, en organisant l’accessibilité en ligne de la plupart des cours afin de ne pas obérer la progression académique de leurs étudiants.

$115 millions pour une collaboration de recherche entre Harvard et la Chine

Harvard Medical School a mis en place un partenariat de recherche collaborative sur cinq ans avec l’Institut des maladies respiratoires de Guangzhou grâce à un financement de 115 millions de dollars octroyé par le China Evergrande Groupiv v. Cette entreprise chinoise qui figure au classement Fortune Global 500 a déjà soutenu à Harvard des projets de recherche sur les bâtiments écologiques, les maladies immunologiques et en mathématiques.

L’objectif principal de ce programme est de comprendre la réponse immunitaire de l’organisme et l’interaction hôte-pathogène, identifier des biomarqueurs de l’évolution de l’infection et de la maladie, travailler sur les approches vaccinales, les thérapies antivirales et les traitements pour les personnes atteintes de cas graves.

Côté américain, la coordination du programme sera assurée par George Q. Daley, doyen de la faculté de médecine (HMS) et David E. Golan. Les efforts chinois seront quant à eux menés, par Zhong Nanshan, pneumologue et épidémiologiste qui a identifié en 2003 le coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), actuellement à la tête du groupe d’experts chinois de 2019n-CoV et directeur général du China State Key Laboratory of Respiratory Diseases.

Moderna, basée à Cambridge, a pris le lead dans la course au vaccin

Des biotech américaines comme Inovio (PA), Moderna (MA), et Novavax (Maryland) se sont lancées très tôt dans le développement d’un vaccin contre le coronavirusvi. Dans cette course au vaccin, Moderna a rapidement pris le lead en annonçant dès le 25 février qu’elle avait envoyé le premier lot clinique d’un vaccin candidat à l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID), soit 42 jours après l’identification de la séquencevii. La technologie de Moderna repose sur un vaccin à ARN messager (ARNm), le mRNA-1273, pour lequel les essais de phase 1 permettant d’évaluer la sécurité et la réponse immunitaire devaient commencer dès le mois d’avril.


Auteur : Anne PUECH (SST Boston)

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