Bilan du Sommet sur les Systèmes Alimentaires des Nations Unies

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Un Sommet appelé des voeux du Sécrétaire Général dans un contexte d’évolution critique face aux ODD

 

Les systèmes alimentaires* emploient 2 milliards de personnes dans le monde, et leur stabilité constitue un élément central du cadre onusien des Objectifs de Développement Durable (ODD) 2030, notamment en lien avec le travail, le développement économiques et les inégalités. Alors que la planète s’apprête à nourrir d’ici 2050 presque 10 milliards d’habitants, les rapports internationaux soulignent que ces éléments centraux au développement humain ne remplissent plus leurs fonctions élémentaires, et les phénomènes de faim et de malnutrition progressent à des niveaux inquiétants ; en effet, les données montrent que 3 milliards d’individus n’ont pas accès à des régimes alimentaires équilibrés (rapports GLOPAN et SOFI 2020).

La crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19 est ainsi venue aggraver une situation globale déjà fragile, augmentant de 20% la part de personnes en situation de précarité alimentaire (communiqué officiel du Secrétaire Général des Nations Unies de 2021). Cet évènement mondial est par ailleurs intervenu dans un contexte de crise climatique planétaire affectant tous les niveaux de population. Les producteurs de denrées alimentaires sont de plus en plus vulnérables aux impacts négatifs du changement climatique. Le dernier rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) montre que, quel que soit le scénario retenu, les températures sur la planète excéderont 1,5 et 2°C au-dessus des niveaux pré-industriels durant le XXIème siècle, sauf si les gaz à effet de serre (GES) sont diminués de moitié dans la décennie à venir.

 

*Un système alimentaire comprend tous les éléments (ressources naturelles, personnes, intrants, processus, infrastructures, institutions, produits, etc.) et activités liées à la production, à la transformation, à la distribution, à la préparation et à la consommation des aliments et aux extrants de ces activités, y compris les impacts socio-économiques et environnementaux (HLPE, 2014).

 

Parallèlement, comme le montre, entre autres, le rapport SOFI (State of Food Security and Nutrition in the World) de 2020, les systèmes alimentaires sont à l’origine d’un tiers des émissions de GES, d’au moins 80% de la perte de biodiversité, et consomment 70% des ressources en eau douce. Il est cependant essentiel de reconnaitre qu’une production alimentaire durable peut être une solution critique à ces problèmes, rendant ainsi compatible protection de la planète et nutrition globale.

 

 

La mise en place du Sommet : ses jalons, les rendez-vous scientifiques en amont

 

C’est donc pour répondre à ces défis que l’ONU, dans le cadre de la Décennie pour l’Action sur la Nutrition (2016-2025), a appelé en 2019 des dizaines de milliers d’individus, issus des niveaux locaux comme globaux, à participer au Sommet sur les Systèmes Alimentaires (UNFSS), dans l’idée d’en faire un Sommet Populaire, intégrant toutes leurs propositions d’actions, mais aussi un Sommet axé sur les Solutions, permettant de mettre les changements des systèmes alimentaires au service des ODD, particulièrement dans un contexte de reprise post COVID-19. A travers ce processus, les gouvernements et autres parties prenantes ont identifié de nouvelles voies de collaboration, instillant un nouveau souffle au sein de cette arène multilatérale riche et diversifiée. Le sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires a ainsi été programmé pour les 23 et 24 septembre 2021, pendant la 76ème session de l’Assemblée Générale des Nations Unies. Il a été  coordonné par une Envoyée spéciale, Mme Agnès Kalibata, présidente de l’Alliance pour une Révolution Verte en Afrique.

 

Comme indiqué sur la plateforme communautaire du Sommet, le processus du Sommet s’est déroulé en six périodes de travail, le Pré-Sommet et le Sommet étant les deux étapes principales.

 

Source : https://foodsystems.community/

 

La phase préparatoire du Sommet a été essentielle à l’identification des domaines d’action ou « action areas » dans lesquels s’inscrivent les initiatives en termes d’ engagements qui en découlent.

 

La préparation via les Dialogues Nationaux et le Pré-Sommet

 

L’UNFSS des 23 et 24 septembre a été introduit par des Journées Scientifiques (Sciences Days) les 8 et 9 juillet à Rome, ainsi que par un Pré-Sommet (sous format hybride) qui a eu lieu du 26 au 28 juillet. Trois axes ont émergé du Pré-Sommet pour définir les lignes de travail des Etats membres et organisations internationales soutenant l’action dans ces domaines. Ainsi, des actions transformatives des systèmes alimentaires ont été proposées pour permettre de progresser dans la mise en oeuvre des ODD, via les personnes, la planète, et la prosperité. 

 

Des annonces françaises autour de l’agroécologie et de l’approche « Une Seule Santé »

 

A cette occasion, le Ministre français de l’Agriculture et de l’Alimentation est intervenu. Il a notamment mis en avant les initiatives françaises ayant trait à la transition agroécologique, comme le Plan Protéines Végétales, l’accélérateur de la Grande Muraille verte au Sahel et la Coalition sur les cantines scolaires. Il en a aussi profité pour souligner la déclaration conjointe franco-japonaise sur l’équilibre des régimes alimentaires, la valorisation des savoir-faire traditionnels et locaux, et à la prise en compte de la dimension sociale et culturelle de l’alimentation. Finalement, la dimension « Une Seule Santé » a été abordée à travers la mise en place d’un Haut Conseil One Health ainsi que l’initiative PREZODE à laquelle les trois organismes INRAE, CIRAD et IRD participent. Ces axes d’action ont été repris par Jean-Yves Le Drian lors du Sommet le 23 septembre.

 

Les déclarations étasuniennes reviennent sur l’engagement climatique du pays et la nutrition scolaire

 

Côté Etats-Unis, Jewel Bronaugh, Ministre adjointe de USDA (US Department of Agriculture), a rappelé son rôle de premier fournisseur d’assistance alimentaire, agricole et économique et d’aide humanitaire, et s’appuyant sur le Sommet pour mettre en place des actions décisives et coordonnées. Elle a annoncé la décision du gouvernement de rejoindre la Coalition Globale sur les Repas Scolaires afin de soutenir des programmes alimentaires efficaces à l’échelle globale, et ainsi s’assurer que tous les enfants ont accès à des repas nutritifs complets d’ici 2030. Elle est également revenue sur l’Initiative Agriculture Innovation Mission for Climate (AIM4C), qui sera bien lancée à la COP26 en novembre.

 

Ces dialogues ont été majoritairement menés par des organismes indépendants en France, à partir de fin 2019, mais le gouvernement est notamment intervenu autour de la mise en place de la concertation pour l’élaboration de la Stratégie Nationale Protéines. A noter que, par rapport à la contribution des États-Unis, le travail de remontée des priorités par le gouvernement français semble avoir été largement moins basé sur ces dialogues. En effet, le pays est référencé beaucoup plus régulièrement dans les Rapports officiels de contributions disponibles ici dans leurs versions complètes.

Au niveau global, cinq domaines d’action ont été identifiés :

  1. Nourrir toute l’humanité
  2. Les solutions fondées sur la nature
  3. Promouvoir des moyens de subsistance équitables, le travail décent et l’autonomisation des communautés
  4. Bâtir la résilience aux vulnérabilités et aux chocs
  5. Soutenir les moyens de la mise en œuvre

Les actions et engagements pris par les participants sont par ailleurs consultables sur le Compendium mis en place par le Sommet, rappelant par ailleurs la structuration du processus et les axes de travail retenus. Les déclarations nationales, ou « national pathways » font partie des livrables les plus attendus du Sommet.

 

Quel accueil parmi la société civile et les organismes de recherche ?

 

INRAE, en tant qu’Institut de Recherche portant une approche intégrée de l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, contribue à plusieurs axes d’action portés par ce Sommet, comme détaillé ici dans la newsletter du mois dernier. Tout comme de nombreuses autres organisations de recherche, INRAE a participé aux plus de 1500 Dialogues Nationaux (National Dialogues) organisés par 148 pays ayant eu lieu en amont du Sommet, notamment sur les sujets liés à la coopération internationale pour la recherche sur les systèmes alimentaires. L’ensemble des parties prenantes ont ainsi soumis plus de 2000 pistes pour accélérer l’action. Les Axes d’Action autour desquels le Sommet s’est articulé ont permis de regrouper ces propositions de façon systématique afin de construire des communautés de pratiques et promouvoir de nouveaux partenariats.

 

L’Université de Montpellier et le Cirad (organisme français de recherche agronomique et de coopération internationale pour le développement durable des régions tropicales et méditerranéennes) ont aussi été fort impliqués dans la préparation de ce Sommet. Tout comme le vice-président d’INRAE Jean-François Soussana, Patrick Caron, vice-président de l’Université de Montpellier et président d’Agropolis International a été désigné, par les Nations-unies pour faire partie du groupe scientifique international indépendant pour accompagner la préparation du Sommet. Ils ont publié ensemble de nombreux papiers afin d’orienter les réflexions mises en oeuvre par les groupes de travail.

 

Le travail de consultation du Groupe Scientifique ainsi que sa solide contribution à la base de preuves ont permis d’informer une grande partie du travail du Sommet. A travers le Réseau de Champions, les Dialogues Globaux et les Dialogues Indépendants, des participants de tout horizon ont partagé leurs idées sur les manières de transformer les systèmes alimentaires, établir des priorités nationales et générer l’action. Tous les participants ont par ailleurs pu bénéficier des publications du Comité de Sécurité Alimentaire (CSA/CFS), fournissant des pistes politiques globales.

 

Aux États-Unis, l’engagement de l’Université John Hopkins est à noter sur la question de la production de données fiables et leur suivi ; elle a organisé plusieurs évènements associés aux Pré-Sommet et au Sommet sur la question du manque d’information et la mise en place de systèmes d’évaluation et de métriques dédiées. L’Université d’Etat du Michigan s’est aussi mobilisée aux côtés du Cirad notamment dans le cadre de recherches autour de l’inclusivité des systèmes alimentaires urbains en Asie, Afrique et Amérique latine.

 

Le Sommet est perçu comme l’occasion pour les États de présenter les différentes coalitions ainsi que les autres initiatives dont ils font partie. Il est attendu par les diverses parties prenantes comme l’évènement signalant des efforts globaux renouvelés pour produire la transition vers des régimes sains et durables accessibles à tous et toutes. Il est décrit par ses organisateurs comme inédit, de par son degré d’inclusivité, d’ouverture et de transparence, ainsi que d’engagement des acteurs de la société civile à tous les niveaux (agriculteurs, jeunesse, populations indigènes) et placés à des rôles de représentation et de leadership.

 

L’UNFSS comme facteur de dissension au sein de la société civile

 

La préparation du Sommet, ses axes d’action et ses priorités ont néanmoins été critiqués par plusieurs experts et groupes de la société civile, notamment par les 3 anciens envoyés spéciaux pour l’alimentation – Michael Fakhri (Rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation), Hilal Elver (Rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation 2014-2020) et Olivier De Schutter (Rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation 2008-2014 et actuel Rapporteur spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme) dans un article de mars 2021, reprenant les points ainsi que les demandes de changements radicaux remontés par différentes organisations, comme le droit à l’alimentation, l’agroécologie au centre des solutions, ou la marginalisation du CSA et de son groupe d’Experts de haut niveau (High Level Panel of Experts) dans la préparation et l’assignation du suivi du sommet. Il est notamment reproché aux organisateurs du Sommet d’avoir privilégié le secteur privé et les organisations le supportant dans sa définition des priorités et perspectives de travail. Les Etats-Unis avaient par ailleurs rejoint les critiques sur la sélection des axes de travail.

 

Par ailleurs, le Mécanisme de liaison du CSA avec la Société Civile et les Populations Indigènes (CSM/MSC) a annoncé en février de cette année son intention de boycotter le Sommet si certaines conditions n’étaient pas respectées, dans une lettre ouverte au CSA. S’agissant du rassemblement le plus important d’organisations de la société civile luttant à l’échelle globale contre l’insécurité alimentaire et la malnutrition, cette décision a largement porté atteinte à l’image du Sommet. Le CSM, aux côtés d’un consortium d’autres organisations de la société civile, reproche notamment au Sommet d’être trop centré sur ses efforts pour promouvoir le multilatéralisme et d’avoir été piloté par le secteur privé, invoquant pour preuve le partenariat avec le Forum Économique Mondial. De plus, l’absence considérée comme trop longue de la mention des « droits humains » comme priorité du travail engagé par le Sommet est mise en avant par ces acteurs qui dénoncent un processus biaisé. Reconnaissant « de manière très constructive » l’incompatibilité des visions et procédures entamées d’un côté par l’UNFSS et d’un autre par le CSM à l’occasion d’une réunion en présence des deux parties, ce dernier a décidé des contre mobilisations, en parallèle des Pré-Sommet et Sommet. Un « Contre-Sommet » a ainsi eu lieu le 23 septembre, à l’issue duquel une déclaration a été publiée.

 

Ces critiques, qui semblent remettre en question les fondements et objectifs portés par l’UNFSS, amènent à se questionner sur la légitimité et la durabilité de ce processus, qui se veut inclusif, transparent et populaire. De même, la composition du Conseil Scientifique ayant été questionnée par les organisations de la société civile du fait de la prévalence d’économistes et de représentants des sciences naturelles, les mécanismes d’actionnement et de suivi des axes de travail est à suivre de près.

 

 

A quelques jours post-Sommet, retour sur ses premiers rendus

 

 

De nombreux instituts et groupements de recherche ont travaillé en amont du Sommet pour guider les discussions et prioriser des résultats. C’est le cas notamment du Panel Global sur l’Agriculture et les Systèmes Alimentaires pour la Nutrition (GLOPAN), groupement international indépendant de parties prenantes issues de secteurs variés, établi en 2013 au Sommet Nutrition pour la Croissance, et dont l’objectif est d’aider les gouvernements des pays à faibles et moyens revenus à rendre accessibles et sûrs les régimes alimentaires de haute qualité par des politiques basées sur la science. Le GLOPAN compte parmi ses membres Agnès Kalibata, président de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique et Envoyée Spéciale des Nations Unies pour le UNFSS. Le Groupe a travaillé en partenariat avec des acteurs intra-étatiques afin de préparer l’UNFSS ainsi qu’une nouvelle édition du Sommet Nutrition pour la Croissance prévue pour décembre 2021 à Tokyo.

Le GLOPAN a publié un communiqué en amont de l’UNFSS, reconnaissant le rôle des systèmes alimentaires pour faire face aux défis globaux incarnés par les ODD, et exhortant les délégués à présenter le plus haut niveau possible d’engagement politique afin de catalyser la transformation des systèmes alimentaires.

Par ailleurs, la première journée s’est conclue par la publication d’une déclaration du Secrétaire Général reprenant les axes principaux suivants :
  • Des systèmes alimentaires inclusifs et transformatifs alimentent la progression vers l’objectif de Faim Zéro
  • Un sommet populaire centré sur les solutions pour les individus, la planète et la prospérité, triptyque essentiel à la mise en oeuvre de l’Agenda 2030
  • La transformation des systèmes alimentaires doit être adaptée aux besoins locaux, facilitée par l’innovation et le droit à l’alimentation, et intègre les perspectives Une Seule Santé
  • Une implication renforcée des gouvernements ainsi que des initiatives multiacteurs est nécessaire et doit aller plus loin dans le cadre des axes déterminés par le Sommet
  • Aller plus loin que le Sommet : une coordination assurée par le hub des trois agences romaines (FAO, WFP et IFAD)
  • Une redevabilité assurée par le CSA et ses mécanismes intégrant la société civile ainsi que par le Panel d’Experts de Haut Niveau
  • Un suivi annuel et une réunion bisannuelle via les agences romaines

 

 

La France s’engage dans la nutrition scolaire et renouvelle ses engagements sur le déploiement de l’agroécologie 

 

Jean-Yves Le Drian s’est exprimé au nom du gouvernement français. Dans un contexte où un tiers de l’humanité n’a pas accès à des aliments nutritifs en quantité suffisante, de crise sanitaire, de conflits et de désordres environnementaux. Il invite les États membres à transformer leurs systèmes alimentaires et à aligner leurs politiques climatique, commerciale, alimentaire et agricole.

Le Ministre souligne la décision d’accroitre la production nationale de protéines végétales, tout en renforçant la souveraineté alimentaire du pays. Parmi les autres objectifs, il cite la réduction du bilan carbone alimentaire, l’arrêt de l’importation de produits issus de la déforestation, et la diversification et l’amélioration de la qualité de l’offre alimentaire. Un plan d’accompagement doit permettre aux agriculteurs d’effectuer leur transition vers l’agroécologie, tout en vivant dignement de leur travail.

Le Ministre souhaite mettre en avant cet engagement pour l’agroécologie sur la scène internationale, notamment en soutenant la Coalition sur l’agroécologie, mais aussi en lançant l’Accélérateur de la Grande muraille verte, sur laquelle le gouvernement a communiqué à l’occasion du One Planet Summit de janvier 2021. Il s’agit d’une plateforme nouvelle pour accélérer la mise en œuvre du projet de Grande muraille verte, qui vise à permettre la diffusion des pratiques agro-écologiques dans 11 Etats du Sahel, créant ainsi en théorie 10 millions d’emplois, séquestrant 250 millions de tonnes de carbone, et restaurant 250 millions d’hectares de terres pour l’agriculture. A travers l’Agence Française de Développement, le gouvernement français s’engage ainsi à investir 600 millions d’euros sur 5 ans.

Parallèlement, la France a rejoint via le Programme Alimentaire Mondiale (WFP) la Coalition pour l’alimentation scolaire, qui vise à garantir aux écoliers du monde entier l’accès à au moins un repas sain et diversifié par jour. Dans le cadre de cette coalition, la France mobilisera ses instituts de recherche et participera au partage des bonnes pratiques.

La France a aussi participé activement à l’initiative sur les banques de développement, coordonnée par le Fonds International pour le Développement Agricole (FIDA), l’Agence Française de Développement (AFD) et la Cassa depositi e prestiti (CDP), qui ont appelé les États membres et les gouvernements, les organisations du secteur privé, les universités et les instituts de recherche, la société civile et les banques nationales, régionales et internationales, à les rejoindre. Leur objectif est de mobiliser des investissements verts et inclusifs qui peuvent transformer les systèmes alimentaires à grande échelle à travers le monde, en partageant leurs bonnes pratiques et leur savoir-faire, en facilitant la coopération technique et en soutenant des partenariats innovants.

 

Du côté des États-Unis, des fonds importants sont mobilisés sur le territoire national et à l’extérieur

 

Les actions portées par l’USDA : AIM For Climate mis en avant

 

Dans sa déclaration officielle, le pays, représenté par Tom Vilsack, Secrétaire à l’Agriculture, et l’Administratrice de USAID (United States Agency for International Development) Samantha Power, s’est engagé à investir 10 milliards USD sur les cinq prochaines années dans la sécurité alimentaire et les efforts climatiques combinés.

Au niveau domestique, 5 milliards USD seront dédiés au renforcement de l’inclusivité et de la résilience des systèmes alimentaires, à travers des investissements dans des infrastructures, des marchés justes et compétitifs, et des pratiques agricoles et forestières compatibles avec la lutte contre le changement climatique. L’insécurité nutritionnelle est abordée par le prisme de politiques et de programmes encourageant l’accès à des régimes équilibrés pour tous et toutes. L’articulation entre deux axes principalement est soulignée : l’accès à une alimentation nutritive, sûre, abordable et accessible doit ainsi se faire dans un contexte permettant la conservation des ressources naturelles et la lutte contre le changement climatique.

Dans son discours officiel, Tom Vilsack a rappelé l’engagement des États-Unis aux côtés des Émirats Arabes Unis pour la mise en œuvre d’AIM4C, dans le but d’augmenter de façon conséquente l’investissement public comme privé dans l’innovation pour des systèmes agricoles favorables au climat. Il a annoncé que le nombre de pays supportant l’initiative a plus que triplé depuis l’annonce de l’initiative par le Président en avril (voir article ici).

 

Son discours a également été l’occasion d’annoncer la mise en place d’une Coalition sur la Productivité Durable pour la Sécurité Alimentaire et la Conservation des Ressources (« Sustainable Productivity Growth for Food Security and Resource Conservation »), invitant les Etats membres à la rejoindre dans le but de motiver l’action collective pour améliorer la productivité agricole.

 

Par ailleurs, les États-Unis font partie de la Coalition pour l’alimentation scolaire menée entre autres par la France. Son objectif est de s’assurer que d’ici 2022, tous les pays aient remis en place les programmes alimentaires à l’école, pour les 370 millions d’enfants ayant perdu accès à leur repas scolaire du fait de la pandémie de COVID-19, ainsi que de réussir à atteindre les 73 millions d’enfants déjà en situation d’extrême pauvreté avant la pandémie.

Tom Vilsack a aussi souligné la participation du pays à la Coalition sur le Gaspillage alimentaire (« Food is Never Waste »), qui met en avant le rôle du gaspillage alimentaire dans le changement climatique.

 

Les actions portées par USAID dans les pays tiers à travers Feed the Future

 

De son côté, Samantha Power s’est concentrée sur l’autre moitié des 10 milliards USD, qui sera investie dans la lutte contre l’insécurité alimentaire globale, aidant les petits producteurs à échapper à la pauvreté. Avec le soutien du Congrès, cet investissement doit être mobilisé par l’initiative lancée en 2010 Feed the Future, qui doit inclure de nouveaux pays. A travers de nouveaux investisseements et une stratégie révisée dans les pays cibles, Feed the Future affiche un objectif de réduction de la pauvreté et la malnutrition de 20% d’ici 5 ans.

L’USAID a annoncé son intention d’investir 60 millions USD sur cinq ans dans de nouvelles subventions de recherche qui contribueront à des solutions essentielles pour réduire les pertes et le gaspillage alimentaires. Ce montant inclut une subvention de 25 millions USD et 15 millions USD supplémentaires en financement potentiel à Tufts University pour diriger le laboratoire d’innovation de Feed the Future pour les systèmes alimentaires en matière de nutrition.

Elle a ajouté que le gouvernement s’engage à réviser sa Stratégie pour la sécurité alimentaire mondiale, en vue de se concentrer davantage sur des actions promouvant une croissance agricole inclusive (femmes, filles et communautés marginalisées) ou pour étendre la fortification alimentaire sur une vaste échelle afin de livrer les vitamines et les minéraux essentiels à ceux qui en ont le plus besoin. Elle indique que l’Agence va doubler ses investissements en agriculture de nouvelle génération, telle que les graines tolérantes à la sécheresse.

 

Ces annonces ont été reçues positivement par les groupes agroindustriels aux Etats-Unis. L’Institut Nord-Américain pour la Viande (NAMI), qui représente 95% des entreprises de boeuf, porc et volailles et 70% de l’industrie de la dinde aux Etats-Unis, a annoncé rejoindre la Coalition sur la Productivité Durable pour la Sécurité Alimentaire et la Conservation des Ressources, mentionnée précédemment. Cette Coalition peut être vue comme une initiative répondant à la Stratégie « De la Ferme à la Fourchette » de l’Union Européenne, afin de réduire l’usage des pesticides et engrais chimiques sur le territoire national, comme déclaré par Vilsack en septembre.

NAMI doit communiquer en novembre sur ses objectifs de durabilité, en vue d’optimiser sa contribution à un environnement de qualité, tout en promouvant des protéines de qualité et un traitement plus humain des animaux. L’Institut a soumis un plan intitulé « Protein PACT » lors du Sommet.

 

Quel suivi pour le Sommet ?

 

Parmi les points d’attention mis en avant par les détracteurs de la préparation du Sommet figurait le suivi du Sommet. Celui-ci devait, selon plusieurs organismes et individus, être porté par l’existant CSA, dans une logique de mobilisation des institutions existantes, considérées comme solides et efficaces par plusieurs pays. Malgré ces recommandations, les agences romaines ont précisé qu’elles coordonneront ensemble un hub supportant les processus de mise en œuvre post-Sommet, avec mobilisation temporaire du CSA sur certains dossiers. Ce nouveau « hub de coordination » doit en théorie renforcer les liens avec les priorités globales existantes ainsi qu’avec les processus intergouvernementaux liés à l’environnement, le climat, la santé et la nutrition, etc., ainsi qu’avec les forums intergouvernementaux tels que le « Forum Politique de Haut Niveau » (HLPF), qui suit l’évolution des ODD, ou le « Forum Finance pour le Développement ».

 

Dans ce contexte, la plénière à venir du CSA, du 11 au 14 octobre, est fortement attendue afin de permettre de débattre de façon ouverte sur le processus et les issues du Sommet. Le CSM enjoint ainsi le CSA à organiser une étude participative et collective du Sommet en intégrant toutes les parties prenantes pertinentes, afin d’illustrer comment et pourquoi l’UNFSS a généré de telles tensions et produit une fragmentation portant préjudice à ses objectifs ambitieux.

 

Rédactrice : Juliette Paemelaere, Chargée de coopération scientifique INRAE, [email protected]

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