Le 6 octobre dernier, la publication conjointe de 17 articles scientifiques dans la revue Nature a permis d’avancer de manière considérable la description de la structure et des fonctions du cerveau humain. L’équipe de Josh Huang, Professeur de Neurobiologie à l’université Duke en Caroline du Nord a participé à ces travaux qui furent réalisés en collaboration par 26 équipes de recherches américaines localisées dans 8 États différents et regroupées dans le réseau BICCN (BRAIN Initiative Cell Census Network). En comparant les cerveaux de la souris, du singe marmouset et de l’Homme, ces études décrivent la diversité des neurones, leur organisation en réseaux et l’acquisition de leurs spécificités au cours du développement embryonnaire.
Une partie des études visait à décrire la diversité des cellules du cerveau en analysant leurs profils électriques et morphologiques, ainsi que leur expression caractéristique des gènes. L’acquisition de ces données fonctionnelles et moléculaires a permis l’identification de 25 sous-classes de cellules. L’étude des interactions des neurones chez la souris a abouti à l’élaboration d’un réseau connecté représentant le cortex moteur, la zone du cerveau responsable des mouvements volontaires. Même si seulement 1% du cerveau a été cartographié de cette manière, les chercheurs espèrent pouvoir produire une carte détaillée du cerveau de la souris en 2023. Enfin, cette collection d’articles met en évidence de nombreux points communs dans les cerveaux des mammifères mais aussi quelques différences intrigantes. Par exemple, la proportion de neurones de types excitateurs en comparaison aux neurones dits inhibiteurs est différente entre les espèces : le ratio est 2:1 chez l’Homme, 3:1 chez le marmouset et 5:1 chez la souris. Cette découverte surprenante pourrait en partie expliquer les différences dans l’organisation et le fonctionnement du cortex et dans les capacités cognitives de chaque espèce.
Grâce à ce travail, les chercheurs du BICCN proposent à l’ensemble de la communauté scientifique, de nombreux outils précieux pour continuer la recherche. L’ensemble des données et des logiciels d’analyse sont disponibles librement, et de nouveaux outils génétiques ont été développés pour des études approfondies de certaines populations de neurones et de leurs fonctions. De nombreuses recherches sont encore nécessaires, notamment pour lier l’organisation du système neuronal à des fonctions cérébrales spécifiques telles que l’apprentissage, les émotions ou le comportement. Par ailleurs, le cerveau humain contient environ 100 milliards de neurones, soit 1000 fois plus que la souris. Pour Honghui Zeng, chercheur au Allen Institute de Seattle, il faudra encore au moins 50 ans pour arriver à produire une représentation cartographique de l’ensemble du cerveau humain.
Les travaux du BICCN s’inscrivent dans le cadre de la BRAIN Initiative inaugurée par le Président Obama en 2013. Ce programme américain, qui vise à améliorer notre compréhension du cerveau humain et des maladies affectant le système nerveux, est estimé à 6 milliards de dollars, investis entre 2013 et 2027. De nombreuses initiatives internationales de recherche ont établi des objectifs similaires, par exemple la Commission Européenne a investi 607 millions d’euros dans le Human Brain Project.
Rédacteur – Benjamin Boumard, Attaché adjoint pour la Science et la Technologie, Atlanta,
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REFERENCES
https://today.duke.edu/2021/10/duke-neuroscientist-co-leads-massive-effort-map-brain
https://www.nature.com/articles/s41586-021-03950-0
https://www.nature.com/articles/d41586-021-02660-x
https://www.nature.com/articles/d41586-021-02661-w
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https://www.nature.com/articles/d41586-021-02493-8
https://www.nature.com/immersive/d42859-021-00067-2/index.html