Les invasions d’insectes contribuent-elles au problème des feux de forêt ou feraient-elles partie de la solution ?

Des scientifiques du Colorado (Colorado State University et University of Colorado) et de l’Idaho (University of Idaho) ont rédigé un rapport de synthèse des connaissances concernant les épidémies d’insectes qui touchent les forêts du Colorado et leur impact sur les feux de forêt. Après avoir décrit l’écologie de ces épisodes invasifs, le rapport évalue les réponses possibles à ce type d’événement, ceci afin d’aider dans leurs prises de décision les gestionnaires de la forêt.
Les épisodes de pullulations d’insectes sont capables de tuer un très grand nombre d’arbres (plusieurs millions) sur des surfaces très étendues. Le rapport rappelle que les insectes responsables, principalement des scolytes (Dendroctonus rufipennis par exemple) et des défoliateurs (Choristoneura occidentalis par exemple), sont natifs de la région et coexistent avec les forêts depuis des milliers d’années. Et il n’y a pas de preuve que les invasions actuelles soient plus virulentes que celles ayant eu lieu par le passé dans les années 40, 60, 70 et 80.
Les chercheurs reconnaissent en revanche que certaines régions non affectées dans le passé récent (siècle dernier) sont aujourd’hui la cible de ses insectes. C’est le cas notamment des régions de haute altitude normalement protégées par des températures plus fraîches. Plusieurs facteurs participent aux invasions actuelles : des sécheresses de longue durée et des étés chauds affaiblissent les arbres, tandis que des hivers moins rigoureux permettent aux larves de survivre. Les forêts de la région sont également particulièrement denses (certaine de façon naturelle, d’autres du fait de la politique de suppression de feux de forêt) ce qui fournit aux insectes une source abondante de nourriture.

Les scientifiques expliquent également que, selon eux, ces invasions ne sont pas la cause des violents feux de forêts qui se sont déclarés récemment dans la région. Au contraire la théorie suggérerait que les invasions de scolytes pourraient réduire les risques d’incendies en dépossédant les arbres de leurs aiguilles. Ces invasions ne sont donc pas le signe d’une forêt en mauvaise santé ; au contraire elle ferait partie d’un processus de renouvellement de la forêt, et choisir de ne pas agir contre ces insectes pourrait être considéré comme une forme de "gestion responsable" selon les auteurs.
Les auteurs reconnaissent tout de même que des considérations esthétiques ou économiques ou la gestion de la vie sauvage peuvent conduire à considérer certaines actions comme nécessaires. Dans ce cas, l’utilisation d’insecticide n’est envisageable que pour des zones localisées et de grandes importances du fait des coûts financiers et environnementaux (impacts sur les organismes non-ciblés) de cette technique. Retirer les arbres morts tués par les insectes peut présenter des avantages esthétiques et économiques (vente du bois si celui-ci ne s’est pas trop détérioré). Cela peut également être utile pour lutter contre les incendies si cela s’accompagne de la récolte de bois mort et d’un éclaircissage ciblant également les petits arbres, carburant important lors des feux.

Source :

– https://www.denverpost.com/search/ci_4737356
– W. H. Romm et al., Recent forest insect outbreaks and fire risk in Colorado Forests: a brief synthesis of relevant research, 2006,
https://www.cfri.colostate.edu/docs/cfri_insect.pdf

Rédacteur :

Elodie Pasco, deputy-envt.mst@ambafrance-us-org

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