La relation entre les mutations du gène BRCA1 et le cancer du sein, découverte il y a plus de 10 ans, est un fait avéré dans la communauté scientifique. Les mutations de BRCA1, impliquées dans la rupture du double brin d’ADN et dans sa réparation, conduisent à la formation et au développement du cancer du sein, majoritairement du sous-type BBC(Basal-like breast cancer). Cependant la compréhension moléculaire et les conséquences ontogénétiques qui les relient étaient encore inexpliquées. Une équipe internationale de chercheurs conduite par le Dr Ramon Parsons de la Columbia University Medical Center’s Herbert Irving Comprehensive Cancer Center et le professeur Ake Borg de l’Université Suédoise de Lund a découvert comment la mutation du gène BRCA1 favoriserait le développement du cancer du sein. Les résultats montrent en effet que la mutation entraînerait l’invalidation (knockout) d’un puissant gène suppresseur de tumeur connu sous le nom de PTEN (phosphatase and tensin homolog).Cette étude intitulée "Recurrent gross mutations of the PTEN tumor suppressor gene in breast cancers with deficient DSB repair" est publiée en ligne sur le site de Nature Genetics et paraîtra en janvier dans l’édition papier de ce même journal.
En 1997, le Dr Parsons avait conduit l’une des deux équipes qui avait découvert que PTEN était un gène suppresseur de tumeurs qui était altéré dans de nombreux cas de cancers du sein, du cerveau et de la prostate. PTEN est maintenant reconnu pour être muté dans environ 30 pour cent des cancers, ce qui en fait le deuxième gène le plus muté dans cette pathologie derrière p53 (muté dans environ 50% des cancers humains).
Cette nouvelle étude montre que l’inactivation hétérozygote du gène PTEN conduit à la formation de tumeurs mammaires chez la souris, et que la perte de l’expression de PTEN est significativement associée au sous-type de cancer lié à la mutation de BRCA1. Les chercheurs ont ainsi identifié que les mutations de PTEN entraînaient des ruptures chromosomiques, des inversions et des délétions dans les tumeurs où BRCA1 avait subi une mutation. Le knocking out de PTEN envoie un signal favorable à la croissance des cellules tumorales contrairement à la mutation de BRCA1 qui prédispose seulement les cellules à accumuler des dommages génétiques et qui envoie un signal indirect pour la croissance cellulaire. Les mutations de PTEN favoriseraient le développement de la croissance des cellules cancéreuses en augmentant l’activité de la voie de signalisation protéique appelée PTEN/PI3K. Bloquer cette voie de signalisation pourrait stopper le développement du cancer. Des essais cliniques allant dans ce sens sont actuellement en cours.
Alors que les études précédentes s’intéressaient aux mutations conventionnelles afin de rechercher le lien entre BRCA1 et PTEN, l’équipe a utilisé une technique de recherche qui n’avait encore jamais été envisagée, à savoir l’étude des ruptures physiques dans le chromosome porteur du gène PTEN. Les chercheurs ont numérisé 34 biopsies de patientes présentant des tumeurs corrélées à la mutation de BRCA1. Au vu des analyses, le gène PTEN apparaît scindé en deux , et non ou peu réparé, dans environ un tiers des cancers. Dans certains cas, des régions entières de ce gène ont disparu, dans d’autres cas, la moitié du gène a été rattachée à d’autres régions chromosomiques. Ces types d’erreurs chromosomiques sont le résultat direct de l’absence de BRCA1, un gène qui est normalement impliqué dans la réparation de ce dommage. Le Dr Parsons estime qu’environ 50% des cancers du sein de type BRCA1 seront liés à la mutation de PTEN une fois l’analyse chromosomique complète réalisée.
Ces données fournissent l’exemple d’une conséquence oncogénétique récurrente et spécifique du dysfonctionnement de la réparation de l’ADN lors de la mutation de BRCA1. Ils donnent également un aperçu de la pathogenèse du sous type BBC avec des implications thérapeutiques. Les résultats soutiennent, en outre, que l’obtention d’un recensement précis des gènes mutés dans un cas de cancer, nécessite un examen systématique des réarrangements génétiques, en particulier dans les tumeurs entraînant un déficit de réparation du double brin d’ADN.
Les chercheurs pensent que d’autres gènes que PTEN pourraient être ciblés par BRCA1 et espèrent, en utilisant les mêmes techniques, trouver d’autres réarrangements chromosomiques, qui seraient impliqués dans le développement du cancer du sein. En effet, ces types de mutations qui inhibent les suppresseurs de tumeurs sont susceptibles d’être communes à de nombreux types de cancers, en particulier ceux qui présentent des lacunes lors de la réparation de l’ADN.
Source :
"Recurrent gross mutations of the PTEN tumor suppressor gene in breast cancers with deficient DSB repair" – Nature Genetics, 09/12/2007 – https://www.nature.com/ng/journal/vaop/ncurrent/abs/ng.2007.39.html
– Communiqué de l’Université de Columbia, 09/12/2007 – https://www.cumc.columbia.edu/news/press_releases/BRCA1-cancer.html
Pour en savoir plus, contacts :
– "BRCA1 gene in breast cancer" – Cell Physiology – 07/2003 – 196(1):19-41 : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/sites/entrez?Db=PubMed&Cmd=ShowDetailView&TermToSearch=12767038&ordinalpos=1&itool=EntrezSystem2.PEntrez.Pubmed.Pubmed_ResultsPanel.Pubmed_RVAbstractPlus
– Le gène PTEN : https://ghr.nlm.nih.gov/gene=pten
Code brève
ADIT : 52285
Rédacteur :
Julien Moriggi, [email protected]