Une nouvelle approche pour traiter les infections tuberculeuses latentes

Actuellement, un tiers de la population mondiale est infectée par Mycobacterium tuberculosis (M .tb), la bactérie responsable de la tuberculose. Une fois dans l’organisme, dans 90% des cas, le bacille tuberculeux reste à l’état quiescent et ne provoque pas de maladie, c’est l’infection tuberculeuse latente (ITL), la tuberculose ne se développant que dans 10% des cas environ. Aucun médicament n’existe à l’heure actuelle pour traiter spécifiquement les infections tuberculeuses latentes, dans lesquelles la bactérie ne se divise pas de manière active mais est toujours présente et risque d’être réactivée.

Une équipe internationale de biochimistes menée par le D.Barry de l’institut national des allergies et des maladies infectieuses (National Institute of Allergy and Infectious Diseases, NIAID) a découvert comment un médicament expérimental, le PA-824, était métabolisé à l’intérieur du bacille tuberculeux. Ce métabolisme nécessite une enzyme bactérienne provenant du bacille lui même et nommée Ddn et son cofacteur. L’événement clé de la réaction biochimique catalysée par Ddn est une production de monoxyde d’azote (NO). Cette molécule hautement réactive agit littéralement comme une bombe et détruit la bactérie de l’intérieur.

Le NO est produit naturellement lors de la phagocytose par des cellules du système immunitaire, notamment les macrophages. C’est un des mécanismes permettant au système immunitaire de contenir l’infection tuberculeuse. Néanmoins, cette réponse immunitaire n’est pas toujours suffisante pour éliminer complètement le bacille du corps humain. Le PA-824 agit essentiellement comme le ferait une cellule immunitaire en produisant du NO, mais ce médicament est plus spécifique puisqu’il n’est métabolisé qu’en présence du bacille tuberculeux, par l’enzyme bacterienne appropriée.

Les infections tuberculeuses latentes ont pour cause des bacilles qui ne se divisent pas, enfermés dans des granulomes constitués d’une coque fibreuse ou calcique. Le niveau d’oxygène y est faible. Dans leur découvertes récentes, les scientifiques ont observé que le PA-824 induisait une production de NO plus grande lorsque le niveau d’oxygène était faible. Cette observation suggère que le PA-824 pourrait agir contre les bacilles qui ne se divisent pas.

Le PA-824 a été développé à l’origine pour agir dans des conditions aérobies, ou oxygénées. Avec cette nouvelle compréhension du fonctionnement de l’enzyme bactérienne et de son cofacteur sur le PA-824 en condition anaérobie, les scientifiques pourraient maintenant concevoir des médicaments ayant une structure similaire à celle du PA-824 mais optimisés dès le départ pour mieux se comporter en conditions anaérobies. Comme les cellules humaines ne possèdent pas le cofacteur bactérien ni des enzymes équivalentes au Ddn, le PA-824 n’a pas d’effet toxique sur les cellules humaines. Sur ce même principe, il serait donc possible d’envisager de nouveaux types de médicaments générant du NO et conçus pour interagir avec les enzymes bactériennes associées à d’autres pathologies d’origine bactérienne.

Ce travail est en cours au NIAID, en partenariat avec des chercheurs de deux instituts de recherche de Novartis, l’un consacré aux maladies tropicales (Singapour), l’autre à la génétique (San Diego, Etats-Unis) et en collaboration avec la fondation du groupe pharmaceutique (The Novartis Research Foundation). Cette recherche a reçu le soutien de la Fondation Gates (Bill & Melinda Gates Foundation) et du fonds Welcome Trust.

Source :

– "Experimental TB Drug Explodes Bacteria from the Inside Out" – News Release – National Institutes of Health (NIH) – 27/11/08- https://www.nih.gov/news/health/nov2008/niaid-27.htm
– "PA-824 kills nonreplicating Mycobacterium tuberculosis by intracellular O release" – Science Volume 322 Numéro 5906 – Singh R. et al. – 28/11/2008 – pages 1392 à 1395

Pour en savoir plus, contacts :

– Clifton E. Barry, III, Docteur, Laboratory of Clinical Infectious Diseases, National Institute of Allergy and Infectious Diseases, NIH, Bethesda, Etats-Unis – https://www3.niaid.nih.gov/labs/aboutlabs/lcid/tuberculosisResearchSection/barry.htm
– Généralités sur la tuberculose – https://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/tuberculose/generalites.htm
Code brève
ADIT : 56905

Rédacteur :

Alexandre Touvat ([email protected])

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