Incubateurs d’entreprises : interventions fédérales et mutations d’une activité à fort impact économique

Le congrès annuel de l’association nationale des incubateurs d’entreprises (NBIA) s’est déroulé du 19 au 22 avril 2009 à Kansas City. Il a été l’occasion de faire le point sur la situation des incubateurs américains et d’analyser les récentes mesures de soutien fédéral en la matière.

La NBIA [1] est la plus importante association d’incubateurs au monde. L’Association se prévaut aujourd’hui de 1 900 membres dans près de 60 pays. Environ 25% des membres de l’Association sont extérieurs aux Etats-Unis. Les missions principales de la NBIA sont : la mise sur pied de formations et de conférences, la réalisation d’études et travaux sur l’incubation et la conception de guides de bonnes pratiques à destination des responsables d’incubateurs et des entrepreneurs. A ceci s’ajoute une activité de sensibilisation auprès des décideurs. Dit autrement, une activité de lobby auprès des pouvoirs législatifs et exécutifs, locaux ou nationaux.

Les incubateurs américains ont un impact significatif sur l’économie

L’ambiance générale de la conférence annuelle de la NBIA était à l’optimisme. La présidente Dinah Adkins a rappelé les orientations de la nouvelle Administration. Une étude sur l’impact des différents chantiers fédéraux sur l’économie a en fait constitué le fil conducteur de l’ensemble du congrès [2]. Conduite par le cabinet "Grant Thornton" pour le compte du Bureau du Développement Economique du Département du commerce (EDA) [3], l’étude révèle que les incubateurs constituent le moyen le plus efficace pour la création d’emploi. Devant, par exemple, la construction d’infrastructures de transport, de parcs industriels, de structures commerciales et de projets de gestion de l’eau. Les incubateurs fournissent par ailleurs le meilleur retour sur investissement pour l’EDA, créant entre 46,3 et 69,4 emplois pour chaque 10.000 dollars de soutien fédéral. En comparaison, le deuxième investissement le plus productif en termes d’emplois correspond à la construction ou la réhabilitation de centres commerciaux avec un maximum 13,4 emplois créés pour la même somme investie. Ces résultats confortent l’EDA dans son orientation stratégique en faveur de l’innovation et de l’entrepreneuriat. Ils viennent aussi confirmer le courant de pensée actuel selon lequel l’entrepreneuriat, et particulièrement la création de jeunes pousses technologiques à forte croissance, constituent le moteur principal de la relance économique.

Le fort soutien de la nouvelle Administration aux incubateurs

Dans la suite de son discours, la présidente de la NBIA a appelé à plusieurs reprises les responsables d’incubateurs à leurs responsabilités. Elle leur demande d’attirer l’attention des représentants au Congrès sur les retombées économiques des incubateurs tout en les incitant à maintenir les 50 millions de dollars prévus dans le budget 2010 de l’Administration Obama pour la consolidation du réseau d’incubateurs du pays [4]. Elle précise par ailleurs que ces fonds ne doivent pas être destinés exclusivement à la création de nouveaux incubateurs, mais aussi à l’amélioration des 1.000 structures déjà existantes. Dans son programme électoral, le candidat Obama avait en effet promis une enveloppe fédérale de 250 millions par an pour financer un réseau national public-privé d’incubation, effort destiné à soutenir la croissance de l’innovation et des emplois. La présidente de la NBIA se réjouit de ce soutien de la nouvelle Administration Obama, la première de l’histoire des Etats-Unis à investir dans les incubateurs d’entreprises.

La présidente a également profité de cette réunion annuelle pour annoncer le lancement d’une nouvelle étude d’impact et d’évaluation des incubateurs américains, dont la dernière version date de 1997. Les résultats de cette étude sont attendus pour la fin 2009.

Les nouvelles tendances pour l’incubation aux Etats-Unis

Trois grandes tendances semblent se dégager de la conférence de la NBIA. La première a trait à l’émergence d’une nouvelle vague d’incubateurs à but lucratif qui s’autoproclament "accélérateurs" d’affaires. A l’instar du plus fameux d’entre eux, "Y-Combinator", leur offre se situe en réalité en aval du service traditionnel : ils aident les start-ups déjà lancées à se développer et à renforcer leur compétitivité. Ils les assistent pour le recrutement de cadres de haut niveau, notamment pour obtenir des financements de capitaux-risqueurs. Parfois, ils fournissent même quelques dizaines de milliers de dollars de fonds d’amorçage. Ces accélérateurs permettent aussi aux jeunes pousses d’externaliser les tâches non stratégiques afin qu’elles puissent se consacrer à leur coeur de métier et atteindre leurs objectifs. En contrepartie, certains de ces incubateurs s’invitent au capital de la société jusqu’à hauteur de 70%. A l’opposé, les programmes à but non-lucratif [5] réclament peu de contreparties de la part des entreprises qui sont parvenues à la maturité. L’incubateur les sollicite en général pour assurer en retour des activités d’accompagnement de start-ups, de collecte de fonds et de promotion de l’incubateur.

La seconde grande tendance est la spécialisation de plus en plus fréquente des incubateurs sur les thématiques en vogue : technologies propres et énergies alternatives, matériel médical et médecine personnalisée.

La troisième tendance a trait à l’implication grandissante des industriels dans les incubateurs. De nombreuses structures reçoivent en effet un financement significatif de la part de partenaires privés qui, en échange, espèrent bénéficier d’un accès à des projets innovants. Le géant du pétrole BP a récemment investi quelque 500 millions de dollars dans les incubateurs affiliés à l’Université de californie.

Alors que l’économie américaine est mal en point, un nombre croissant de chercheurs, d’ingénieurs et d’étudiants veulent se tourner vers la création d’entreprises. Les aides fédérales en la matière tombent donc au bon moment. Ce double mouvement coïncide avec l’émergence d’une véritable industrie de l’incubation. Elle se caractérise par la quête du profit et l’implication grandissante d’investisseurs privés.

[3] U.S. Department of Commerce Economic Development Administration

[5] Environ 90% des incubateurs aux Etats-Unis sont à but non-lucratif. Ils sont financés par les états, les villes, les universités et les chambres de commerces locales.

Source :

– A New Take on Incubators, Entrepreneur Magazine, mai 2009, https://www.entrepreneur.com/magazine/entrepreneur/2009/may/201228.html
– Business Incubators Are Best Investment of Public Dollars, Small Businesses Digest, Février 2009, https://www.2sbdigest.com/Business-Incubators
– "Construction Grants Program Impact Assessment Report", Summary, https://www.braintreepartners.org/pdf/EDA_Table.pdf

Pour en savoir plus, contacts :

– [1] National Business Incubation Association (NBIA) : https://www.nbia.org
– [2] Construction Grants Program Impact Assessment Report, U.S. Department of Commerce, Economic Development Administration, septembre 2008, https://www.eda.gov/PDF/EDAConsImpactStudyVolume1FINAL.pdf
– [4] https://www.nbia.org/resource_library/works/files/Preserve_Fed_Funding.pdf
Code brève
ADIT : 59210

Rédacteur :

Géraldine Quetin, [email protected] – Yann Le Beux, [email protected]

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