Le 14 septembre 2009, les responsables, professeurs et chercheurs de 58 universités nord-américaines, leurs partenaires originaires de dix pays, des représentants du gouvernement, de fondations et d’ONG ainsi que du NIH Fogarty Framewok Program[1] se sont retrouvés au National Institute of Health à Washington DC pour le premier rendez-vous annuel du Consortium of Universities for Global Health (CUGH). Créé en 2008, lors d’une conférence soutenue par les fondations Bill & Melinda Gates et Rockefeller, ce consortium témoigne de la remarquable capacité des universités américaines à rapidement structurer un nouveau champ académique de nature interdisciplinaire. Il souligne aussi l’affirmation croissante d’un rôle citoyen et engagé, de ces universités dans les problèmes du monde contemporain. A l’ordre du jour de ce premier grand rendez-vous : une réflexion sur les racines du phénomène et ses futures implications, ainsi que sur les résultats encourageants de l’étude commandée par le CUGH faisant état d’un doublement des étudiants en global health depuis 2006.
Le champ du Global Health ou "santé globale" appréhende la santé, non plus comme une donnée isolée mais comme résultant de la conjonction d’un ensemble de facteurs, qu’ils soient sociaux, économiques, géographiques, politiques, environnementaux. Il traite principalement des questions de santé transnationales nécessitant une coopération globale, à l’image des programmes de lutte contre le VIH, la malaria et la tuberculose.
La globalisation économique, sociale et sanitaire, et l’interdépendance des échelles géographiques qui en résulte, tant sur le terrain que dans les perceptions, combinée avec l’immense investissement des fondations telles que la Gates et de l’administration américaine ces dernières années, ont rendu cette dynamique possible en lui donnant légitimité et financements. Le regain de l’activisme et la volonté de beaucoup d’universitaires de voir leurs institutions engagées dans la recherche de solutions à une échelle internationale ont fait le reste.
Au travers du champ du global health, il s’agit en effet pour les universités de participer à la résolution des problèmes de santé par leurs actions de coopération sur le terrain au niveau des gouvernements et des acteurs de la société civile, y compris bien sûr les universités locales. Le dynamisme des universités américaines, est devenu en peu de temps un enjeu de relations internationales en tant que composante du "soft-power" américain.
Dans ce contexte, les programmes, centres, départements et instituts traitant du global health fleurissent, soit en tant qu’institutions indépendantes soit au sein des écoles de médecine et de santé publique des principales universités américaines. Les chiffres issus de l’étude du CUGH, à laquelle 37 des 58 établissements concernés ont répondu, montre un doublement du nombre d’inscriptions dans ces nouveaux programmes depuis 2006. Les inscriptions sont passées de 1.287 étudiants "undergraduate" en 2006 à 2.687 actuellement, de 949 à 2.010 étudiants en master et de 157 à 315 doctorants.
L’enjeu pour les universités est aujourd’hui d’ancrer de façon durable ces initiatives et de veiller à ce que les nouvelles formations dispensées, interdisciplinaires, soient en adéquation avec les attentes du marché du travail. Afin d’oeuvrer à leur légitimité, la mise en place d’indicateurs appropriés permettant d’en mesurer les performances est primordiale. Par ailleurs, les conséquences de la crise économique devraient faire l’objet de toutes les attentions de la part des principaux acteurs de l’émergence du global health. Deux logiques opposées risquent en effet de s’affronter. D’une part la réduction des investissements dans le domaine de la santé, quoique pour l’instant démentie par les Etats-Unis et les principaux donateurs, d’autre part la pertinence accrue de telles études dans une situation mondiale où les populations fragiles (femmes, enfants…) sont les plus vulnérables.
Dans le cadre de cette étude, 105 organisations actives d’étudiants, consacrées aux enjeux du global health ont été recensées. Les étudiants cherchent le plus souvent à compléter un diplôme en global health par un engagement personnel. La plupart, soucieux de gagner en expérience ainsi qu’en crédibilité, travaillent auprès de populations défavorisées avant de reprendre un master ou un doctorat dans ce domaine. Sur les 37 programmes universitaires américains mentionnés plus haut, tous ont déclaré avoir établi des relations officielles avec des programmes similaires développés dans 97 pays sur les 5 continents, témoignant ainsi de la place clé occupée par la coopération universitaire internationale dans le global health.
Celle-ci contribue également à transformer les relations entre universités américaines et étrangères en apportant une approche davantage partenariale par laquelle les décisions sont prises en concertation et un véritable partage de compétences s’opère, notamment au niveau de la gestion financière ou de l’analyse des données. Les universités américaines cherchent ainsi à partager leur expérience du global health avec les universités des pays en voie de développement afin qu’elles parviennent à créer des programmes viables, susceptibles de former leurs futurs leaders et de les mettre sur un pied d’égalité avec les universités des pays développés.
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[1] Le NIH Fogarty Framework Program a pour objet d’aider les institutions à créer un cadre administratif permettant la collaboration de différentes facultés (droit, affaires, art, sciences, ingénierie, médecine…) autour de programmes de Global Health pluridisciplinaires à destination de tous les cycles d’études supérieures ainsi que des professionnels.
Source :
– Boom in global health studies, 14/09/2009 – Inside Higher Education : https://www.insidehighered.com/news/2009/09/14/health
– The dramatic expansion of universities engagement in global health, Implications for US policy, A report of the CSIS Global health Policy center – avril 2009 – CSIS- Center for Strategic & International Studies : https://csis.org/program/global-health-policy-center
Pour en savoir plus, contacts :
– A propos du Consortium of Universities for Global Health : https://www.cugh.org/?q=meetings/2009-annual
– A propos du NIH Fogarty framework program : : https://www.fic.nih.gov/programs/training_grants/framework/
Code brève
ADIT : 60628
Rédacteur :
Marion Bruley, [email protected]; Pascal Delisle, [email protected]