Radiothérapie : une nouvelle approche limitant les effets secondaires

Des chercheurs de l’Ecole de Médecine de l’Université de Pittsburgh (Pennsylvanie) et de l’Institut National du Cancer (NCI), ont découvert un moyen de protéger les tissus sains des effets toxiques des radiations utilisées en radiothérapie, tout en augmentant la mort des cellules tumorales. Leurs résultats sont publiés dans la revue "Science Translational Medicine" éditée par l’"American Association for the Advancement of Science" (AAAS).

La radiothérapie est utilisée chez plus de la moitié des patients atteints d’un cancer. Elle est, avec la chirurgie, le traitement le plus fréquent et peut entraîner une guérison à elle seule. Elle peut être utilisée seule ou associée à la chirurgie et à la chimiothérapie. Ses indications sont liées au type de tumeur, à sa localisation, à son stade et à l’état général du patient. Elle peut être pratiquée sans hospitalisation, car les séances sont de courte durée et les effets secondaires moindres que lors d’une chimiothérapie. Mais la même radiation efficace sur les cellules cancéreuses peut également détruire les cellules saines et provoquer des effets secondaires (asthénie, nausées, vomissements, anémie, leucopénie, thrombopénie, érythèmes, dermites, cystites…). Des séquelles et des complications tardives peuvent apparaître plusieurs mois après la fin de l’irradiation (scléroses, raideurs, fibroses, atrophies), ainsi que des cicatrices et la mort de tissus sains. Les lésions induites sur les tissus normaux par les radiations limitent les doses thérapeutiques administrées et réduisent l’efficacité de la radiothérapie.

Jeff Isenberg, de la "Division of Pulmonary, Allergy, and Critical Care Medicine, Pitt School of Medicine", et ses collègues du NCI, ont identifié une voie de signalisation biochimique qui influence la manière dont les cellules cancéreuses et les cellules saines répondent à une irradiation. Ils ont développé une stratégie basée sur des oligonucléotides morpholinos [2] anti-thrombospondine-1, peptide se liant au récepteur cellulaire CD47. La voie de signalisation de la thrombospondine-1 via son récepteur CD47 réduit la guérison en réponse au stress, et les souris dépourvues de l’un des gènes sont résistantes aux lésions dues aux radiations. L’inhibition de la liaison de la thrombospondine-1 sur le récepteur CD47 confère une radiorésistance à des cellules endothéliales in vitro et protège les tissus mous (muscles, tissus adipeux, vaisseaux sanguins), la moelle osseuse, et les leucocytes associés aux tumeurs chez des souris irradiées. De façon surprenante, la protection des cellules saines ne s’accompagne pas d’une protection des cellules tumorales vis-à-vis des radiations. Au contraire, le pré-traitement par l’inhibiteur de la voie de signalisation CD47, augmente la radiosensibilité des tumeurs, et diminue leur progression.

Le mécanisme par lequel la suppression de la voie de signalisation CD47 induit cette radiosensibilité des cellules tumorales reste encore mystérieux pour les scientifiques. Plusieurs hypothèses sont proposées :
– la diminution des taux de CD47 sur les cellules tumorales pourrait les rendre plus sensibles aux attaques par le système immunitaire du patient après le traitement.
– la suppression des lésions sur les cellules vasculaires, pourrait augmenter le flux sanguin et permettre aux médiateurs de l’immunité d’atteindre plus facilement les cellules cancéreuses.

Désormais, les scientifiques souhaitent explorer des stratégies basées sur le blocage de la voie de signalisation thrombospondin-1/CD47 pour le traitement de l’hypertension pulmonaire, la cicatrisation des plaies, la drépanocytose et les infarctus.

[1] Le "National Cancer Institute" (NCI) fait partie des "National Institutes of Health" (NIH). Doté d’un budget de 5.1 milliards de dollars, le NCI est la principale agence fédérale dédiée à la recherche sur le cancer. Elle conduit, coordonne, et finance la recherche sur le cancer, des formations, la diffusion d’informations de santé, et d’autres programmes portant sur les causes, le diagnostic, la prévention et le traitement du cancer.

[2] La technologie des oligonucléotides morpholinos est une technologie anti-sens utilisée pour bloquer l’accès d’autres molécules aux séquences spécifiques de certaines molécules d’acide nucléique. En recherche biologique, les morpholinos sont utilisés en tant qu’outils pour la génétique inverse, par inactivation de la fonction d’un gène. Ceci est accompli en empêchant les cellules de synthétiser une protéine.

Source :

– "Pitt/NIH team find way to protect healthy cells from radiation damage" – Eurekalert – 21/10/2009 – https://www.eurekalert.org/pub_releases/2009-10/uops-ptf101609.php
– "Radioprotection in Normal Tissue and Delayed Tumor Growth by Blockade of CD47 Signaling" – Science Translational Medicine – 21/10/2009 – Volume 1, Numéro 3 October 2009, p.3ra7 – DOI: 10.1126/scitranslmed.3000139
– "La radiothérapie" – Wikipédia – https://fr.wikipedia.org/wiki/Radiothrapie

Pour en savoir plus, contacts :

"La radiothérapie des cancers" – Dr Bernard Gery – 30/06/2009 – https://www.oncoprof.net/Generale2000/g08_Radiotherapie/g08_rt01.html
Code brève
ADIT : 61213

Rédacteur :

Alexandre Touvat, [email protected]

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