Nouveau modèle de gouvernance de l’innovation – Partie 2 : Soutenir les jeunes pousses et créer une dynamique de partenariats publics-privés

La première partie de l’entretien de la MS&T avec M. Richard Bendis est disponible à l’url suivante :
https://www.bulletins-electroniques.com/actualites/61015.htm

MS&T : En examinant le Plan de Relance, nous retirons l’impression que le Gouvernement fédéral considère que l’innovation relève davantage des états et des autorités locales et que le rôle du fédéral se borne à soutenir la recherche.

R.B : Dans le passé, en effet, cela relevait des états de développer des pôles de compétitivité, des programmes, etc. Mais désormais, les états ont d’énormes contraintes budgétaires qui réclament des partenariats et des financements venant de l’ensemble des acteurs de l’innovation : les états, le gouvernement fédéral, le monde académique, les entreprises, etc. Le fait est que le capital fait désormais défaut car les investisseurs tentent à placer leurs fonds dans des entreprises à des stades avancés de leur développement. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement fédéral doit combler ce vide.

MS&T : Aux Etats-Unis, si je comprends bien, les sources de financement de l’innovation proviennent essentiellement du secteur privé, des entreprises, des sociétés de capital-risque, des banques, des investisseurs providentiels, etc. et non pas des états ou du Gouvernement fédéral. Pensez-vous que cette répartition structurelle est appelée à changer dans les prochaines années ?

R.B : En termes de changement, c’est toujours le secteur privé qui continuera à alimenter l’innovation. Mais le besoin se fait sentir de davantage aider les entrepreneurs dans la phase amont de leur développement économique, notamment au moment de la traversée de la "vallée de la mort" où les Etats-Unis perdent la chance de développer des concepts innovants et des entreprises naissantes. Autrefois, ces mêmes jeunes sociétés trouvaient des financements. Ce n’est plus le cas aujourd’hui car les investisseurs recherchent des retours sur investissement plus importants ou des moyens d’influer de façon immédiate et directe sur le chiffre d’affaires. Pour mémoire, les sociétés de capital risque n’investissent actuellement que 4% de leurs fonds soit 1 milliard de dollars, dans les phases précoces de développement des jeunes entreprises, préférant investir dans des sociétés qui ont une certaine maturité associée à la quasi-certitude de générer des profits dans le court terme.

Ce qui est actuellement souhaitable aux Etats-Unis, c’est de soutenir les jeunes pousses à passer le cap de la "vallée de la mort", phase insuffisamment financée. Ce rôle serait tenu de façon provisoire par le NISF avant d’être ensuite relayé par le NPPPI "National Public-Private Partnership Innovation Program".

MS&T : Aneesh Chopra a été nommé par l’Administration Obama comme conseiller technologique en chef. Que pensez-vous de cette nomination et quelles seront les conséquences de cette création sur l’organisation de l’innovation aux Etats-Unis ?

R.B : C’est une nomination importante. Mais l’Administration Obama devrait également nommer un conseiller national en matière d’innovation car le terme "technologie" fait référence à un produit alors que l’"innovation" embrasse des processus de services, des écosystèmes et des collaborations aussi bien que des produits. Un conseiller pour l’innovation pourrait également mieux évaluer les manquements des Etats-Unis en matière d’innovation qui ont besoin d’être corrigés.

MS&T : Dans votre article, vous estimez à 2 milliards de dollars le montant nécessaire à la création d’un fonds national d’amorçage de l’innovation (NISF) qui serait destiné à apporter un soutien au pré-amorçage, à l’amorçage et aux jeunes pousses. Pensez-vous que cette estimation soit suffisante pour la mise en oeuvre et la pérennité d’un nouveau système d’innovation (NIF)?

RB : Le rôle du NISF est de travailler comme une équipe temporaire chargée d’élaborer de nouveau canaux de financement capables de constituer un moyen de financer les étapes précoces de développement des entreprises et de créer un réseau destiné aux meilleurs investissements précoces aux Etats-Unis. Ces soutiens seraient abondés à parité par des financements locaux ou des états tout en étant gérés par des professionnels de l’innovation tels que les fonds d’investisseurs providentiels. NISF est conçu pour apporter une aide, faire des recommandations, obtenir des retours sur investissement, et, au bout du compte, créer des emplois. L’objectif général est donc d’accroître les connexions entre les acteurs de l’innovation. Les partenaires potentiels du NISF seraient le Trésor, le bureau des PMI/PME[1], l’OMB[2], etc.

MS&T : Quels sont les modèles d’innovation qui ont inspiré vos recommandations ? Avez-vous procédé à un parangonnage des autres systèmes nationaux d’innovation ?

R.B : En fait, je me suis surtout inspiré des meilleures pratiques en vigueur aux Etats-Unis. Je me suis en particulier intéressé au "Benjamin Franklin Technology Partners Program" qui finance des entrepreneurs en phase précoce de développement depuis plus de 27 ans et qui crée un emploi pour chaque investissement. Je me suis aussi servi de l’exemple du "Kansas Technology Enterprise Corporation" qui met l’accent sur des financements dans les phases précoces et des partenariats technologiques publics. A l’étranger, j’ai essentiellement travaillé pour le Gouvernement portugais qui a développé le programme le COTEC.

MS&T : Pensez-vous que le nouveau système d’innovation, que vous proposez, serait en mesure de faire face au défit posé par les nouvelles problématiques de l’énergie et le système national de transport de l’Energie (smart grid[3]) ?

R.B : Le système représente une solution qui n’est que partielle, les sociétés de capital-risque commencent à s’intéresser aux investissements en matière d’énergie propre. Les investissements restent encore insuffisants.

Définitions:

NIF, National Innovation Framework

NISF, National Innovation Seed Fund

COTEC, association patronale pour l’innovation portugaise qui gère des investissements d’origine industriels plutôt que gouvernementaux.

[1] SBA, "Small Business Administration".

[2] "Office of management and Budget"

Source :

Richard Bendis, 27/10/2009

Pour en savoir plus, contacts :

– "Creating a National Innovation Framework", Richard Bendis & Ethan Byler Science Progress
Richard Bendis, "Innovation America" https://www.innovationamerica.us
– [3] "Les plans de développement de la Smart Grid dévoilés", BE Etats-Unis 179 : https://www.bulletins-electroniques.com/actualites/60712.htm
Code brève
ADIT : 61015

Rédacteur :

Antoine Mynard, [email protected]; Lynda Inséqué, [email protected]; Heidi Phelps (transcription et traduction), [email protected]

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