Sommet à Washington sur l’informatique quantique : intrication entre science et diplomatie.

Affiche du Quantum World Congress. Credit: Connected DMV

Du 25 au 28 septembre, s’est tenu à Washington, et dans ses alentours (au centre de congrès de Tysons en Virginie), le Quantum World Congress 2023 (QWC). Cette conférence a rassemblé plusieurs centaines de participants issus des mondes de la recherche, du gouvernement et de l’économie, avec une forte participation internationale.

Le QWC était organisé par une agence de développement de la région DC-Maryland-Virginie (DMV) : Connected DMV / Potomac Quantum Innovation Center (PQIC) qui ambitionne de faire de la région capitale un hub de premier plan pour l’innovation et le développement économique dans le calcul, les capteurs, les matériaux et les communications quantiques.

Le programme accordait une large place à une série de micro-événements et ateliers en parallèle permettant à certains groupes industriels de mettre en avant leurs produits ou de former des utilisateurs. Parmi ces groupes industriels, plusieurs étaient sponsorisés par des pays partenaires représentés par leurs ambassades ou leurs agences de développement. Lors de ces événements, nous avons pu constater le foisonnement d’initiatives dans le marché encore très émergent des technologies quantiques : spin-offs de laboratoires ou d’agences fédérales de recherche, comme par exemple IonQ (University of Maryland, UMD), Quantum Science Center (Department of Defense, DoD), Supraconducting Quantum Materials & Systems Center (Fermilab), startups et entreprises en pointe sur des technologies « capacitantes », enabling technologies en anglais. 

La collaboration internationale entre pays promouvant les mêmes valeurs (like-minded countries) a été fortement mise en avant, notamment lors des sessions et des événements collatéraux. 

La principale session dédiée à cette dimension internationale, le « Forum international pour l’avancement des partenariats stratégiques globaux », s’est tenue sur une demi-journée et a permis de rassembler, en sus de représentants d’agences et organismes fédéraux (NASA, départements du commerce et de l’énergie DOC et DOE, agence nationale de la recherche NSF, Maison Blanche, Département d’Etat), des start-ups et entreprises américaines (Q-CTRL, IBM, Google Quantum AI, Xanadu, Infleqtion, the MITRE Corp….) ainsi qu’une cinquantaine de partenaires internationaux représentant une quinzaine de pays (d’importantes délégations australienne et japonaise, Pays-Bas, Suisse, Suède, Royaume-Uni notamment).

Plusieurs événements spécifiques ont permis de mettre en valeur les compétences de certains pays, essentiellement européens :

  • Au travers d’un événement en association avec l’université Johns Hopkins, la Finlande a présenté son écosystème de startups du quantique, centré sur les universités d’Espoo, Aalto et Tampere, avec notamment des compétences dans le domaine des lasers et de la cryogénie très basse température (10mK).
  • L’ambassade des Pays-Bas et celle du Japon ont organisé chacune une soirée « pitches & networking » dans leurs résidences respectives, pour des groupes restreints d’experts américains et étrangers, en format Chatham House*. 
  • L’ambassade d’Allemagne avait choisi de promouvoir l’écosystème quantique berlinois par un événement ouvert au public (Quantum Berlin meets Washington), modéré par l’agence de développement de Berlin-Brandebourg. A noter qu’au même moment une importante délégation bavaroise (Munich Quantum Valley) participait à la semaine quantique de l’IEEE à Seattle.

Par-delà des coopérations scientifiques établies au fil de l’eau entre laboratoires et équipes de chercheurs américaines, européennes et asiatiques, émerge une volonté de canaliser les forces vers une technologie quantique respectueuse de valeurs communes et profitable à l’ensemble de la société. Plusieurs orateurs ont ainsi avancé l’idée de ne pas réitérer les erreurs qui ont pu être commises dans le développement de l’IA par manque d’orientation et de réglementation visant à en limiter les excès. Tous s’accordent en effet à dire que, même si ces technologies sont encore à l’aube de leurs potentialités et qu’un marché vraiment significatif ne devrait pas voir le jour avant 5 à 10 ans, leur potentiel disruptif est tel qu’il convient d’ores et déjà de s’interroger, voire de normer / réglementer, pour qu’elles ne mettent pas en danger nos démocraties.

 

Pascal Revel, attaché pour la science et la technologie, Ambassade de France à Washington D.C., [email protected].

* La règle de la Chatham House signifie que les participants sont libres d’utiliser les informations collectées à cette occasion, mais ils ne doivent révéler ni l’identité, ni l’affiliation des personnes à l’origine de ces informations, de même qu’ils ne doivent pas révéler l’identité des autres participants

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