La demande croissante de terrains cultivables destinés aux industries des biocarburants entraîne des changements dans l’utilisation des sols au niveau mondial, provoquant une augmentation des émissions de CO2 liées notamment à la déforestation. Ces impacts environnementaux, -the indirect land use change impacts of biofuels-, suscitent une prise de conscience mondiale et notamment aux Etats-Unis.
Dans une récente étude parue dans Science Magazine, Jerry Melillo du Marine Biological Laboratory et ses collègues soutiennent que si les cultures pour les biocarburants remplacent les cultures nourricières, la déforestation nécessaire pour la mise en place de ces dernières dégagera plus de dioxyde de carbone que dans les zones où les cultures pour les biocarburants sont réalisées. L’utilisation de fertilisants pour assurer la croissance de ces nouvelles cultures nourricières dégagera également d’importantes quantités d’oxyde nitreux, une molécule beaucoup plus néfaste que le dioxyde de carbone comme gaz à effet de serre.
Cette étude met également l’accent sur un défaut considérable mais qui peut être corrigé dans la méthode de calcul utilisée actuellement pour évaluer la conformité avec les limites en carbone fixées par le protocole de Kyoto et dans la législation américaine sur le climat (cap-and-trade laws). Ce problème pourrait sévèrement ébranler les objectifs de réduction des gaz à effet de serre. Ce système ne prend pas en compte ni le CO2 émis par les tuyaux d’échappement et les cheminées industrielles lorsque les bioénergies sont utilisées, ni les émissions provenant de l’utilisation des terres lorsque de l’énergie est produite à partir de la biomasse cultivée. Cette méthode de calcul considère de façon erronée que toutes les bioénergies sont neutres en ce qui concerne les émissions de carbone, sans tenir compte de la source de la biomasse, ce qui entraîne probablement d’importantes différences dans les émissions nettes. Par exemple, le déboisement de forêts établies depuis longtemps, pour brûler du bois ou pour cultiver des plantes pour les bio énergies, est compté comme une réduction de 100% dans les émissions d’énergie malgré le fait que cela entraîne d’importants dégagements de carbone.
L’ US EPA (Environmental Protection Agency) espère publier de façon anticipée sa réglementation finale (RFS2 Renewable Fuels Standard), sur les quantités minimales de carburants renouvelables qui doivent être vendues aux Etats-Unis en prenant en compte l’impact sur le changement d’utilisation des sols. L’EPA souligne également l’existence d’incertitudes significatives concernant l’estimation des changements d’utilisation des sols et l’importance de mener une analyse afin de quantifier leur ampleur et leur impact relatif sur le cycle de vie des émissions résultantes. C’est pourquoi une équipe de l’EPA, travaillant en collaboration avec l’USDA et des experts, tente de quantifier l’incertitude associée spécifiquement aux émissions internationales indirectes dues aux changements d’utilisation des terres. Les résultats de leurs travaux seront incorporés dans la réglementation finale. Selon le porte-parole de l’EPA Dave Ryan, l’agence travaille diligemment pour qu’elle puisse être mise en application en 2010.
Source :
– EPA to issue final RFS2 rule in December, Biodiesel Magazine, November 2009 Issue : https://www.biodieselmagazine.com/article.jsp?article_id=3798
– Science: Biofuels Come With Their Own Emission Costs, 22 October 2009 : https://www.aaas.org//news/releases/2009/1022sp_biofuels.shtml
– Fixing a Critical Climate Accounting Error, Timothy D. Searchinger, et al., Science 23 October 2009:Vol. 326. no. 5952, pp. 527 – 528 DOI: 10.1126/science.1178797 – https://www.sciencemag.org/cgi/content/short/326/5952/527
Rédacteur :
Magali Muller, [email protected] ; Adèle Martial, [email protected]