Le premier “Plan d’Action Océan-Climat” de la Maison Blanche envisage des approches nouvelles de capture et séquestration du carbone

Crédit photo : Michèle Nassar

La Maison Blanche a publié le 21 mars 2023 son premier “Plan d’Action Océan-Climat”[1]. La commande de ce plan inter-agences (“whole-of-government”) au Ocean Policy Committee (OPC),  co-présidé par l’Office of Science and Technology Policy (OSTP) et le Council on Environmental Quality, avait été annoncée par le Président Biden lors du World Ocean Day de l’ONU (8 juin 2022) [2].

Ce plan est focalisé sur les interactions réciproques entre océan et climat, et ne prétend donc pas aborder tous les autres enjeux liés à l’océan, tels que la biodiversité marine ou la pollution. Il établit un programme d’ensemble des travaux à mener par les agences fédérales désignées comme responsables, sous la supervision générale de l’OPC, en s’appuyant sur les financements autorisés pour l’action climatique par les grandes lois votées au cours des deux premières années de la présidence Biden (notamment la Bipartisan Infrastructure Law et l’Inflation Reduction Act). Les agences sont également invitées à se référer à ce plan dans leurs demandes de budget pour les années fiscales 2025 et suivantes.

 

Trois objectifs principaux sont énoncés :

  • Développer la composante océanique de la stratégie de neutralité carbone

Un accent particulier est mis sur l’éolien offshore (objectif de 30GW de capacité installée en 2030) et l’éolien flottant (objectif de 15 GW en 2035). L’éolien flottant fait partie des Energy Earthshots, les grands défis liés à la transition énergétique que le gouvernement américain entend relever à horizon 2030cf notre  article dans la Newsletter de février 2023 . Un Floating Offshore Wind Shot Summit s’est tenu les 22-23 février 2023 [3]. Le Department of Energy a détaillé le 29 mars 2023 sa stratégie pour l’éolien offshore et flottant [4], qui ne fait pas consensus au Congrès : de façon peu habituelle, ce sont des représentants Républicains qui invoquent des arguments environnementaux, tels que l’impact sur les baleines.

Des propositions sont aussi faites quant aux énergies renouvelables marines (marées, vagues, courants), à l’activité portuaire et au transport maritime décarbonés, incluant la création, avec des partenaires internationaux, de “corridors maritimes verts”, à savoir des voies maritimes sur lesquelles l’ensemble du trafic est assuré sans émission nette de gaz à effet de serre. Ces corridors avaient fait l’objet de la « Déclaration de Clydebank » (signée par 24 pays, dont la France), à l’occasion de la COP26 en 2021.

Est aussi encouragée l’étude de la séquestration géologique du carbone sous le fond des océans (qui n’a pas encore été démontrée) et de solutions pour augmenter la contribution des océans au retrait de CO2 de l’atmosphère : sont citées par exemple la culture d’algues ou la reconstitution d’écosystèmes marins, la fertilisation par ajout de fer et la modification de l’alcalinité par apport de calcaire ou de basalte. Cette approche vient en complément des solutions de retrait de CO2 de l’atmosphère étudiées aux Etats-Unis (cf notre article dans la Newsletter de mars 2023). Le rapport reconnaît que ces solutions, qui avaient fait l’objet d »un travail de revue par les National Academies of Science, Engineering and Medicine en 2022 [5], sont très peu mûres, et que toute action devra faire l’objet d’études d’impact soignées.

  • Accélérer le recours aux Solutions fondées sur la Nature

Ce volet inclut la restauration des écosystèmes côtiers et océaniques qui atténuent les événements extrêmes et l’érosion, améliorent la qualité de l’eau et les ressources en poissons et oiseaux, et séquestrent des gaz à effets de serre ; il est proposé de créer des marines protégées “adaptatives vis-à-vis du changement climatique” (le rapport reconnaît que ce concept doit encore faire l’objet de précisions. Il s’agit de délimiter et gérer des aires protégées et connectées dans une logique d’adaptation à des évolutions futures imparfaitement connues).

Le document précise ainsi le volet océanique et côtier de la feuille de route sur les Solutions fondées sur la Nature qu’avait publiée la Maison Blanche en novembre 2022 (cf notre article dans la Newsletter de décembre 2022)

  • Améliorer la résilience des communautés aux changements à venir dans les océans

Le troisième objectif est le développement d’une aquaculture et une pêche, et plus globalement une économie maritime, adaptées au changement climatique et aux déplacements qu’il pourra induire, tant concernant les ressources halieutiques que les espèces protégées. La restauration de récifs coralliens, voire la constitution de récifs artificiels, est envisagée.

Sont par ailleurs invoqués un certain nombre de principes communs, récurrents dans les documents de l’administration Biden : la justice environnementale, l’implication des nations tribales et peuples autochtones, l’implication de toutes les parties prenantes (gouvernements, communauté académique, entreprises, ONG, public), l’appui sur la science, la coordination inter-agences.

Rédacteur: Joaquim Nassar, Attaché pour la Science et la Technologie à l’Ambassade de France à Washington, [email protected].

 

[1] https://www.whitehouse.gov/wp-content/uploads/2023/03/Ocean-Climate-Action-Plan_Final.pdf

[2]https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2022/06/08/fact-sheet-biden-harris-administration-celebrates-world-ocean-day-with-actions-to-conserve-americas-deepest-atlantic-canyon-cut-plastic-pollution-and-create-americas-first-ever-o/

[3] https://www.energy.gov/eere/wind/events/floating-offshore-wind-shottm-summit

[4] https://www.energy.gov/articles/doe-releases-strategy-accelerate-and-expand-domestic-offshore-wind-deployment

[5] https://www.nationalacademies.org/our-work/a-research-strategy-for-ocean-carbon-dioxide-removal-and-sequestration

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