Nouveau rapport des Académies Nationales : Thriving on Our Changing Planet, A Decadal Survey for Earth Observation from Space

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Les académies nationales ont publié en coopération avec la NASA, la NOAA et le U.S. Geological Survey une version préliminaire de la deuxième édition du Decadal Survey sur l’observation de la Terre par satellite (Thriving on Our Changing Planet: A Decadal Survey for Earth Observation from Space), un rapport destiné à guider l’action des trois agences fédérales, dans ce domaine pour les dix prochaines années, soulignant que « la compréhension d’une Terre qui change aussi rapidement et la mise sur pied d’un programme robuste pour parvenir à cette fin, constituent un défi majeur pour la décennie à venir et pour un avenir plus lointain ».

35 questions clefs

Pour relever ce défi, le rapport préconise des approches novatrices reposant sur des innovations programmatiques et technologiques à même de permettre d’accomplir davantage avec des budgets moins importants, en prêtant une attention accrue aux bénéfices que sont susceptibles d’apporter les partenariats tant domestiques qu’internationaux, et les capacités croissantes des sources issues du secteur privé. C’est dans cet esprit que le rapport analyse 35 questions clefs, en proposant pour chacune les capacités d’observation à développer. Ces questions clefs concernent des domaines pour lesquels les progrès en science de la Terre et le développement des capacités d’obtention d’information sont estimés nécessaires pour soutenir le développement de nombreuses applications, à même de permettre à la société de s’épanouir durablement. Le traitement de ces questions doit en particulier permettre d’atteindre des progrès substantiels dans les domaines suivants :

  • compréhension des nuages et des aérosols, et de leurs impacts sur le climat et les conditions météorologiques ;
  • évaluation des rythmes d’élévation du niveau des mers et de leurs changements ;
  • quantification des tendances en matière de stockage de l’eau et évaluation des implications qui en découlent pour l’irrigation et la consommation humaine ;
  • compréhension des altérations des caractéristiques de surface et des paysages (par exemple, manteaux neigeux, glissements de terrains, séismes, éruptions ou utilisation des sols) ;
  • évaluation de la santé de la végétation terrestre et des écosystèmes aquatiques ;
  • examen des mouvements des sols et des surfaces de glace pour l’étude de l’élévation du niveau de la mer, les séismes, les éruptions volcaniques, les glissements de terrain et la déformation des plaques tectoniques ;
  • compréhension des sources et des puits de gaz carbonique et de méthane, et de leur évolution ;
  • compréhension des contributions des glaciers et de la calotte glaciaire à l’élévation du niveau de la mer, et de leur évolution ;
  • amélioration de notre compréhension de la circulation océanique et de ses impacts sur les conditions météorologiques et le climat ;
  • évaluation des changements touchant l’ozone et les autres gaz, et leurs implications sur la santé humaine, la qualité de l’air et le climat ;
  • détermination des changements dans les manteaux neigeux et leurs implications sur les ressources en eau, les conditions météorologiques, le climat, les inondations et les sécheresses ;
  • quantification de la biomasse et caractérisation de la structure de l’écosystème ;
  • percées dans les connaissances sur le transport des substances polluantes, l’énergie éolienne et les processus nuageux.

A noter que le rapport ne propose pas directement des missions ou des instruments, mais avance des « objectifs d’observation » (targeted observable), un ensemble d’observations spatiales nécessaires pour permettre d’atteindre un objectif scientifique donné.

Posant comme prérequis l’accomplissement des missions et le développement des instruments, en cours ou planifiés par la NASA (dénommé dans le rapport Program of Record , cf. dernier paragraphe), ce qui suppose pour la NASA un budget pour ces missions d’un montant de 3,6 Md$ pour la période 2018-2027 (cf. paragraphe suivant), le rapport recommande la mise en œuvre de quatre types de programmes, trois d’entre eux étant nouveaux :

  • Designated (nouveau) : cinq objectifs d’observations à coût plafonné :
    • aérosols et leurs effets sur le climat et la qualité de l’air (800 M$) ;
    • nuages, convection et précipitations, et cycle hydrologique planétaire (800 M$) ;
    • changement des masses, et plus particulièrement distribution et mouvement des masses entre les océans, les manteaux neigeux, les nappes phréatiques et l’atmosphère (300 M$) ;
    • géologie et biologie de surface, afin de mesurer les températures de sols et des masses d’eau, la réflectivité de l’eau, les processus géologiques actifs, la végétation et la biomasse algale (650 M$) ;
    • déformation et changements en surface, pour mesurer la dynamique de surface de la Terre en lien avec les séismes, les glissements de terrain, les manteaux neigeux et le pergélisol (500 M$).
      Le rapport recommande la mise en œuvre des missions en accord avec ces objectifs d’observation dans le courant de la décennie.
  • Earth System Explorer (nouveau) : programme sur une base concurrentielle de missions conduites par un chercheur principal (coût unitaire plafonné à 350 M$, lancement et trois ans d’exploitation inclus) qui serait similaire aux missions Explorer mises en œuvre dans le cadre des activités de la NASA dans les domaines de l’astrophysique et de l’héliophysique.
    Sept objectifs d’observation sont identifiés :

    • vents atmosphériques ;
    • gaz à effet de serre ;
    • niveau des glaces ;
    • courants et vents de surface océaniques ;
    • ozone et gaz à l’état de traces ;
    • profondeur neigeuse ;
    • structure des écosystèmes terrestres.
      Le rapport préconise la mise en œuvre de missions en accord avec trois des sept objectifs d’observation dans le courant de la décennie et la prise en compte, sur une base concurrentielle, du coût de développement des missions, dans le processus de choix des objectifs d’observation à mettre en œuvre.
  • Incubation (nouveau) : programme centré sur l’investissement dans l’innovation pour le futur incluant un fonds pour l’innovation destiné à répondre aux besoins émergents. Trois objectifs d’observation sont recommandés pour ce programme :
    • vents atmosphériques ;
    • couche limite planétaire ;
    • topographie et végétation de surface.
      Ce programme concerne les développements technologiques estimés nécessaires pour la mise en œuvre future de missions de haute priorité.
  • Venture : poursuite de la mise en œuvre de cette classe de missions recommandée dans le cadre de la première version du Decadal Survey, complétée par un volet Venture Continuity destiné aux observations permanentes à bas coût. Six objectifs d’observations identifiés pour ces missions qui ont vocation à être moins onéreuses que celles développées dans le cadre du programme Earth System Explorer :
    • biochimie aquatique ;
    • salinité maritime de surface ;
    • structure de l’écosystème océanique ;
    • radiance intercalibration ;
    • changements du champ magnétique ;
    • humidité des sols.

Considérations budgétaires

Les recommandations contenues dans le rapport des académies nationales se limitent aux objectifs d’observations pour la période ne débordant pas sur la décennie 2027-2037 et se fondent sur l’hypothèse d’un budget alloué à l’observation de la Terre constant (avec ajustement en tenant compte de l’inflation).
Le rapport établit un certain nombre de règles décisionnelles à suivre dans le cas où le budget serait inférieur à ce qu’escompté : report des missions les plus importantes, puis des missions d’ampleur moyenne et enfin réduction de la cadence de mise en œuvre des missions Earth System Explorer .
Le rapport recommande également à la NOAA de mettre en œuvre des partenariats innovants avec le secteur privé tirant pleinement profit des données commerciales disponibles sur le marché.

NASA Budget compliance

Coopérations entre les différents acteurs nationaux

Le rapport insiste sur la coordination entre la NASA, la NOAA et l’UGSS pour permettre une mise en œuvre efficace des priorités définies, avec un accent particulier sur la mise en place d’un lien fort entre les deux premières agences. Pour mémoire, la NASA est en charge des sciences de la Terre, alors que la NOAA et l’USGS sont plutôt centrées sur les applications (la NOAA exploite les satellites civils de météorologie et est responsable des observations en lien avec la météorologie de l’espace, l’USGS exploitant les satellites Landsat).

Coopération internationale

Le rapport se réjouit des nombreuses coopérations internationales nouées par les trois agences, recommandant leur intensification. Le rapport invite en particulier spécifiquement l’USGS à considérer des partenariats avec le programme européen Sentinel pour son programme Sustainable Land Imaging.
Le rapport note en outre le potentiel important de la Chine dans le domaine de l’observation de la Terre, tout en relevant que le contexte actuel (amendement de Wolf) ne permet pas d’envisager des coopérations avec ce pays.

Quel bilan tirer du Decadal Survey précédent ?

A ce jour, seule une des quinze missions recommandées par le rapport couvrant la période décennale précédente a été mise en œuvre par la NASA (satellite SMAP – Soil Moisture Active Passive, mis en orbite en 2015, dont le radiomètre en bande L demeure opérationnel alors que le radar embarqué a cessé de fonctionner du fait d’une défaillance d’un amplificateur).
Deux missions devraient être lancées dans le courant de l’année 2018 :
• la mission de gravimétrie américano-allemande GRACE Follow-on ;
• la mission Ice, Cloud and land Elevation Satellite-2.
(détail du statut des quinze missions dans le dernier article mentionné en fin de ce document).

Compléments d’information

Version pdf de ce document

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