L’insertion d’un gène lié à l’obésité augmenterait le rendement des plantes de 50%

Des scientifiques des Universités de Chicago, de Pékin et Guizhou (Chine) ont annoncé que la modulation de la traduction en protéines des ARN, au niveau de leurs marques épigénétiques pouvait permettre d’accroître considérablement leur rendement et d’augmenter la tolérance des plantes à la sécheresse.

Depuis des décennies, les scientifiques s’efforcent d’améliorer les performances des plantes cultivées. Mais les processus de sélection génétique sont progressifs, lents et plutôt incertains.

Face aux changements climatiques et à une population mondiale croissante, une piste envisagée est d’accroître les rendements agricoles et la résistance des plantes aux variations climatiques.

L’étude débute en 2011, dans le laboratoire du professeur Chuan He (Université de Chicago) qui a ouvert un tout nouveau champ de recherche en découvrant les clés d’un autre mode d’expression des gènes chez les mammifères. L’équipe a démontré que, contrairement à ce que l’on pensait, l’ARN ne se contenait pas de transcrire « aveuglément » les brins d’ADN afin de produire des protéines : la cellule elle-même peut réguler les parties transcrites, et cela implique l’enzyme FTO (pour fat mass and obesity associated). FTO est capable d’agir sur l’ARN et d’affecter la croissance des cellules humaines, animales et des plantes.

L’insertion du gène codant pour cette protéine dans des plants de riz et de pommes de terre a permis de multiplier leur rendement par trois en laboratoire et de l’augmenter de 50% dans des essais en plein champ. En outre, les plantes ont produit plus de biomasse, ont développé des systèmes racinaires plus longs et ont mieux supporté le stress hydrique. De plus, l’activité photosynthétique des plantes était supérieure de 36%.

A droite, un plant de riz modifié contenant le gène FTO. Crédit Yu et al.

A ce jour, le processus consiste à insérer le gène FTO animal dans une plante. Le mécanisme d’action de la protéine FTO n’est pas parfaitement identifié. Mais il semblerait que cette enzyme dé-méthyle différentes catégories d’ARN (messagers et, surtout, les ARN répétitifs) conduisant à une ouverture accrue de la chromatine et à une augmentation de l’expression de nombreux gènes qui concourent à une augmentation de production de masse végétale.

Selon le Pr. Chuan He, il semble que les plantes disposent de ce niveau de régulation, mais de manière indépendante du gène FTO, qu’elles ne possèdent pas. L’insertion de ce dernier aurait permis d’initier et d’exploiter les mécanismes de régulation propres à la plante. La prochaine étape serait donc de découvrir comment le faire en utilisant la génétique existante de la plante.

Ce nouveau type d’approche diffère des approches existantes d’ingénierie génétique des OGM de première génération et d’édition par CRISPR. Les chercheurs sont plein d’espoir quant au potentiel de cette avancée scientifique. A long terme, elle pourrait contribuer à résoudre les problèmes d’insécurité alimentaire à l’échelle mondiale et également à aider à l’adaptation des cultures aux changements climatiques.

Le Pr. He travaille avec l’Université de Chicago et le Polsky Center for Entrepreneurship and Innovation pour explorer les possibilités offertes par cette découverte, poursuivre les recherches et développer d’éventuels partenariats commerciaux.

En revanche, il est nécessaire de préciser que les variétés qui ont été utilisées lors de l’expérience ne sont pas les variétés les plus performantes actuellement disponibles sur le marché. Des essais supplémentaires sur ces variétés performantes sont nécessaires pour savoir si les résultats observés seront de même amplitude. De plus, les essais devront être réalisés sur une large palette de sols et de climats.

Pour en savoir plus :

https://news.uchicago.edu/story/rna-breakthrough-crops-grow-50-percent-more-potatoes-rice-climate-change

https://www.nature.com/articles/s41587-021-00982-9

Article rédigé par :

Benjamin Doreilh, Attaché adjoint pour la Science et la Technologie, Consulat de France à Chicago ; [email protected]

Jean-Paul Lallès, Attaché pour la Science et la Technologie, Consulat de France à Chicago ; [email protected]

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