L’agrivoltaïsme, un compromis idéal au déploiement du photovoltaïque à grande échelle aux USA ?

L’agrivoltaïsme conjugue production d’électricité et agriculture. Des chercheurs de l’université d’État de l’Oregon ont imaginé ce que représenterait son déploiement à grande échelle aux États-Unis. Ils estiment qu'il permettrait au pays de fournir une énergie plus propre, en limitant l’artificialisation des sols et en créant des emplois au cœur des campagnes.

Système d’agrivoltaïsme sur vigne. Copyright : Bruno CLAESSENS

Dans leur publication, les chercheurs estiment que seulement 1% des surfaces agricoles du pays allouées à l’agrivoltaïsme suffirait à couvrir 20% de la production d’électricité. L’avantage majeur de cette méthode est qu’elle permet de lier production électrique et agriculture. Contrairement aux parcs photovoltaïques classiques, les surfaces occupées ne sont pas « perdues ».

Si toutes les cultures ne se prêtent pas à cette technique, certaines peuvent en tirer profit comme la vigne, les cultures fruitières et maraichères. En effet, le dispositif est constitué de portiques amovibles et orientables disposés en rangées espacées. Ainsi, les cultures peuvent être successivement mises à l’ombre en cas de trop forte chaleur, protégées de coups de froid, des fortes pluies et d’épisodes de grêle qui peuvent s’avérer dévastateurs pour les cultures. Les panneaux peuvent également servir de gouttière et récupérer les eaux pluviales qui serviront à irriguer les cultures. Enfin, ils peuvent faire office d’abri pour les animaux qui pâturent.

Cette étude récente s’ajoute à un ensemble de recherches qui examinent le potentiel de l’agrivoltaïsme. Mais au lieu d’explorer les avantages de cette pratique sur des sites individuels, les chercheurs de l’université d’État de l’Oregon ont cherché à comprendre son potentiel à l’échelle du pays. Afin de d’établir une projection réaliste, ils ont pris en compte divers facteurs comme le coût des panneaux solaires, le besoin en surface, les économies d’émissions et à la création d’emplois.

Pour produire 20% de l’électricité américaine (451,7 GW), il suffirait d’implémenter le dispositif sur 34 000 km2 soit moins d’1% des surfaces agricoles du pays. A titre de comparaison, cette surface est semblable à celle de l’état de Maryland ou encore de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Un projet de cette envergure nécessiterait de multiplier par sept le nombre de panneaux solaires actuellement installés aux États-Unis. Le coût de production et d’installation de ces panneaux s’élèverait à environ 1 120 milliards de dollars étalés sur environ 35 ans. Cette période correspond à la durée de vie moyenne des panneaux photovoltaïques. Malgré cet investissement initial massif, les chercheurs soulignent que cela représenterait moins d’1% du budget annuel des États-Unis (2019). Par ailleurs, les panneaux seraient amortis en 17 ans grâce aux revenus générés par la production d’électricité. Après cette date, ils rapporteraient à minima 35,7 milliards de dollars de revenus par an selon leurs estimations.

La production, la construction et l’installation de panneaux nécessitent du personnel présent localement. Les chercheurs prédisent qu’un projet de cette ampleur créerait plus de 110 000 emplois pérennes dont 40% afin d’assurer le fonctionnement et les opérations de maintenance. De plus, ce projet permettrait également d’éviter le rejet de 330 470 tonnes d’équivalent CO2 chaque année.
Enfin, installés sur des cultures qui s’y prêtent, ces parcs agrivoltaïques n’auraient qu’un impact limité sur les rendements agricoles, fourniraient  un ombrage bienvenu au bétail qui pâture ou encore limiteraient la consommation en eau de certaines cultures en limitant l’évapotranspiration via cet ombrage.

L’agrivoltaïsme semble constituer une opportunité intéressante dans la production d’énergie renouvelable. En permettant la continuité d’une activité sur les parcelles qu’il occupe, ce concept peut être déployé à grande échelle en limitant la pression sur les terres arables.

L’énergie photovoltaïque représente également une source de revenus supplémentaire pour les agriculteurs grâce aux loyers perçus pour la location de leurs terres, des emplois locaux et fournie une énergie moins émettrice de CO2.

En conclusion, l’agrivoltaïsme semble s’inscrire dans les objectifs de réduction des émissions tout en créant de nouveaux emplois et des investissements dans les communautés rurales.

Proctor, K.W., Murthy, G.S., Higgins, C.W., 2020. Agrivoltaics Align with Green New Deal Goals While Supporting Investment in the US’ Rural Economy. Sustainability 13, 137. Disponible sur : https://doi.org/10.3390/su13010137

Rédacteur : Benjamin DOREILH, Attaché adjoint pour la Science et la Technologie, Consulat de France à Chicago ; deputy-agro at ambascience-usa.org

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