Bilan 2022 de la coopération spatiale franco-américaine

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Résumé

2022 fut une année exceptionnelle pour le spatial et la relation bilatérale entre la France et les États-Unis dans l’ensemble des domaines de l’espace, de l’Observation de la Terre aux Sciences spatiales en passant par l’Exploration habitée. Sur fond de célébration des 60 ans du Centre national d’études spatiales (https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg) et autant d’années de coopération spatiale franco-américaine, les liens déjà étroits avec notre partenaire outre-Atlantique se sont particulièrement renforcés en 2022, grâce à de nombreux succès visibles aux plus hauts niveaux des Etats et l’engagement de nouvelles coopérations pleines de promesses.

Sur le plan diplomatique, le spatial a tenu son rôle fédérateur entre nos deux nations à travers deux évènements majeurs ayant permis d’ancrer la coopération spatiale civile, militaire et commerciale dans les fondements de notre relation bilatérale :

  • La première réunion du dialogue stratégique gouvernemental spatial franco-américain (Space Comprehensive Dialogue) les 9 et 10 novembre à Paris
  • Une séquence Espace fructueuse au siège de la NASA en présence de la Vice-Présidente des États-Unis Kamala Harris à l’occasion de la Visite d’Etat du Président de la République Emmanuel Macron le 30 novembre à Washington D.C.

D’un point de vue scientifique et technologique, les succès de plusieurs missions emblématiques de grande ampleur ont mis en lumière notre coopération historique dans tous les secteurs du spatial :

  • Les sciences de la Terre avec le lancement réussi de la mission d’hydrologie Surface Water and Ocean Topography (SWOT) depuis la Vandenberg Space Force Base en Californie le 16 décembre
  • Les sciences spatiales avec les premières images des confins de l’Univers par le télescope spatial James Webb (JWST) le 12 juillet
  • L’exploration avec le succès de la mission Artemis-1, prémices du retour de l’Homme sur la Lune, lancée le 16 novembre depuis Cap Canaveral en Floride et revenue sur Terre le 11 décembre

Ces succès historiques permettent d’envisager un futur prometteur avec plusieurs accords d’envergure actés en 2022 et des axes de coopérations structurants :

  • Dans la lutte contre le changement climatique : adhésion des États-Unis au Space for Climate Observatory (SCO) le 7 juin et la confirmation de l’engagement de la France dans la mission Atmosphere Observing System (AOS) le 30 novembre
  • Dans l’exploration habitée : signature par la France des Accords Artemis le 7 juin
  • Dans l’exploration du système solaire : signature de trois accords de coopération https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg-NASA pour des missions vers Saturne (Dragonfly) et la Lune (Farside Seismic Suite et LusEE)
  • Dans le rapprochement règlementaire et commercial pour soutenir l’écosystème privé
  • Dans le développement durable de l’espace : engagement de la France à ne pas conduire d’essais de missiles antisatellites destructifs à ascension directe.

1.       Contexte : une grande visibilité du spatial français à l’international

Dans un contexte de nouvel âge d’or du spatial insufflé par les Etats-Unis depuis 2017, le rôle essentiel des données et infrastructures spatiales a particulièrement été mis en exergue en 2022 dans la lutte et l’adaptation aux crises globales et systémiques actuelles, qu’elles soient sanitaire, géopolitique ou climatique.

La France, nation pionnière et historique du spatial, a tenu son rang aux avant-postes de l’échiquier mondial en 2022. Ses actions dans le domaine ont rayonné à l’international, et ont été particulièrement reconnues et appréciées par les Etats-Unis, première puissance spatiale mondiale. Quelques évènements notables ont ainsi permis de donner une visibilité certaine à la France spatiale :

  • Le sommet spatial organisé à Toulouse le 16 février dans le cadre de la Présidence française de l’Union Européenne (PFUE) au premier semestre 2022. Le spatial était un axe fort de l’agenda français de la PFUE. Ce sommet a permis au Président de la République Emmanuel Macron de proposer les grands axes de structuration de la politique spatiale européenne et confirmer la place de la France en leader européen du spatial.
  • Le 73ème International Astronautical Congress (IAC) à Paris du 18 au 22 septembre, une édition de tous les records rassemblant la communauté spatiale mondiale (9 300 participants de 110 pays, 250 exposants, 5 000 papiers soumis dont 40% d’étudiants… ).
  • La Conférence Ministérielle de l’ESA les 22et 23 novembre en présence des ministres Bruno Le Maire et Sylvie Retailleau avec une contribution exceptionnelle de la France de 3,2 Md€.

L’année écoulée était par ailleurs placée sous le signe de la diplomatie spatiale. Au lendemain de la crise induite par l’affaire AUKUS en septembre 2021, le spatial a été identifié comme un axe prioritaire de reconstruction de la relation bilatérale franco-américaine. La déclaration de Rome puis la rencontre à Paris entre le Président de la République Emmanuel Macron et la Vice-Présidente Kamala Harris en novembre 2021 avaient identifié trois actions majeures, toutes mises en œuvre en 2022 (signature des Accords Artemis par la France, adhésion des États-Unis au Space for Climate Observatory, mise en place d’un dialogue global sur l’espace). Ces actions visibles se sont par ailleurs accompagnées d’évènements franco-américains et de multiples succès scientifiques et technologiques en coopération :

  • La célébration des 60 ans du https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg à la Résidence de France à Washington le 7 juin en présence de hauts représentants des instances gouvernementales américaines et de la communauté spatiale
  • L’accueil de l’Administrateur de la NASA Bill Nelson par le Président de la République à l’Elysée à Paris le 20 juillet
  • La première réunion du Dialogue stratégique spatial gouvernemental à Paris les 9 et 10 novembre (voir chapitre 1)
  • La séquence Espace de la visite d’Etat du Président de la République à Washington D.C. le 30 novembre (voir chapitre 2)
  • De multiples succès de missions spatiales en coopération (JWST, Artemis-I, SWOT,…) (voir chapitre 3)

2.      Le spatial au service de la diplomatie française

Axe central de notre relation bilatérale, le spatial a fait l’objet de nombreuses discussions au plus haut de l’Etat en 2022.

2.1      Première réunion du Space Comprehensive Dialogue (9-10 novembre)

Action annoncée en novembre 2021 à l’issue de la rencontre entre le Président de la République et la Vice-Présidente des États-Unis, la première édition du Comprehensive Dialogue on Space, dialogue stratégique spatial entre la France et les États-Unis, s’est tenue les 9 et 10 novembre 2022.

Ce dialogue, qui a vocation à se tenir annuellement au niveau gouvernemental, a permis d’échanger sur des sujets transverses dans les domaines spatiaux civil, commercial et militaire. La France était représentée par quatre ministères (MEAE, MEFS, MESR, MINARM[1]), le SGDSN, le https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg et le Commandement de l’Espace. La délégation américaine était quant à elle venue en nombre à Paris avec plus de huit départements et administrations fédéraux (DoS, DoC, DoT, DoD, DHS et NASA, NOAA, FAA[2]) ainsi que le National Space Council et le National Security Council. Près de quarante entreprises du spatial, françaises et américaines, menées par le GIFAS et l’AIA, se sont également retrouvées pour témoigner et échanger sur l’accès aux marchés et les opportunités de partenariat.

Plusieurs thématiques transverses de coopération ont été identifiées notamment sur le climat, les enjeux règlementaires liés aux échanges commerciaux, ainsi que la durabilité des activités spatiales. Une prochaine édition du Dialogue est prévue à Washington D.C. à l’automne 2023.

2.2      Séquence Espace de la visite d’Etat du Président de la République à Washington (30 novembre)

 A l’occasion de sa visite d’Etat à Washington D.C., le Président de la République et la Vice-Présidente des États-Unis ont participé à une réunion dédiée aux questions spatiales au siège de la NASA. En présence de plusieurs ministres, acteurs institutionnels et représentants du secteur privé français et américains, cette réunion a permis de mettre en lumière notre coopération historique dans l’ensemble des domaines de l’espace, de l’Observation de la Terre aux Sciences spatiales en passant par l’Exploration habitée, et de faire avancer les axes structurants de coopération future à la fois sur le plan institutionnel mais également industriel et commercial.

3.       Le succès de missions scientifiques et technologiques emblématiques

 L’année 2022 a vu la concrétisation de plusieurs missions institutionnelles majeures menées en coopération avec la NASA dans l’observation de la Terre, les sciences et l’exploration, incarnant un partenariat transatlantique de longue date.

3.1      JWST : les premières images d’une longue série (12 juillet)

 Le lancement historique et parfaitement réussi du James Webb Space Telescope par une Ariane 5 depuis la Guyane française le 25 décembre 2021 n’a cessé d’être salué par la communauté spatiale américaine, et notamment la NASA. Les performances exceptionnelles du lanceur ont permis de doubler la durée de vie de la mission et donné à l’Europe et la France spatiale une grande visibilité.

Le 12 juillet 2022, les premières images ont été dévoilées par l’Administrateur de la NASA en présence du Président des Etats-Unis Joe Biden accompagné de la Vice-Présidente Kamala Harris. Depuis, de nombreuses autres images ont été mises à disposition de la communauté scientifique internationale qui multiplie les découvertes, suscitant un intérêt croissant du grand public.

3.2      Lancement Artemis-1 : les prémices du retour de l’Homme sur la Lune (16 novembre)

 La mission Artemis-1, pierre angulaire du programme d’exploration habitée lunaire éponyme, a été un succès. Lancée le 16 décembre par le SLS (le lanceur le plus puissant jamais construit), la capsule Orion propulsée par le module de service fourni par l’Europe (ESM) est retournée sur Terre le 11 décembre après 25 jours en orbite autour de la Lune. Ce succès ouvre la voie au programme américain d’exploration habitée de retour sur la Lune, Artemis, développé avec les partenaires internationaux et en premier lieu européens. Suite à la Conférence ministérielle de l’ESA les 22 et 23 novembre, la France a confirmé son statut parmi les premiers contributeurs au programme (maîtrise d’œuvre par Thales Alenia Space du module de service ESPRIT de la future station orbitale lunaire Gateway, contribution au module d’habitation I-HAB, contribution à l’ESM). Au-delà de notre contribution à l’ESA, la France souhaite en outre développer sa coopération bilatérale avec les États-Unis notamment dans l’architecture de surface lunaire.

3.3      Lancement SWOT : le spatial au service de la lutte contre le changement climatique (16 décembre)

 Priorité de l’administration Biden et du gouvernement français, la lutte contre le changement climatique a été au cœur de notre coopération spatiale en 2022 avec le lancement de la mission d’hydrologie SWOT le 16 décembre. Le satellite franco-américain, développé par le français Thales Alenia Space et lancé par l’américain SpaceX, est le fruit d’une collaboration de plus de quarante ans en altimétrie et en océanographie entre le https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg, la NASA et la NOAA. Symbole de l’expertise franco-américaine, SWOT est attendue par la communauté scientifique internationale. La mission doit révolutionner l’étude des eaux afin d’améliorer les modèles climatiques et offrir de nouvelles applications d’adaptation aux conséquences du changement climatique (notamment la gestion des ressources).

4.       Des nouvelles coopérations formalisées en 2022

 Plusieurs nouvelles coopérations ont été actées en 2022, notamment dans la lutte contre le changement climatique, les sciences ou encore l’encadrement réglementaire des activités spatiales et le soutien au secteur privé. Ces coopérations permettent d’envisager un avenir prometteur sur les volets scientifiques, économiques, réglementaires et géopolitiques.

4.1      Observation de la Terre

 Le spatial est un élément essentiel pour caractériser l’évolution du climat à l’échelle globale, et fournir des données et des outils permettant de s’adapter à ses conséquences. Au cours de la visite d’Etat du Président de la République à Washington D.C., la France et les Etats-Unis ont réaffirmé un engagement conjoint de poursuivre la coopération spatiale au service de la lutte contre le changement climatique, incarnée notamment par le lancement de SWOT et la prochaine mission AOS, ainsi que l’engagement américain d’intensifier leur participation dans le Space for Climate Observatory (SCO).

  • Adhésion des Etats-Unis au Space for Climate Observatory (7 juin)

 Initiative française lancée par le Président de la République Emmanuel Macron en 2019, le SCO est destiné à développer des outils opérationnels internationaux utilisant les données spatiales d’observation et permettant aux populations de s’adapter aux conséquences du changement climatique à l’échelle locale (prévention des inondations, gestion des incendies, surveillance des littoraux, agriculture,…). Le SCO a déjà été rejoint par 20 pays et compte aujourd’hui 35 membres.

Le 7 juin 2022, les Etats-Unis, représentés par la National Oceanic and Atmospheric Adminsitration (NOAA), ont adhéré au Space for Climate Observatory (SCO). Le 30 novembre à Washington, la Vice-Présidente Kamala Harris s’est engagée à intensifier la participation américaine dans le SCO tandis que la NOAA présentait quatre nouveaux projets.

  • Engagement de la France dans le programme Atmosphere Observing Sytem (30 novembre)

 A l’occasion de son déplacement à Washington, le Président de la République a confirmé l’engagement de la France dans la future mission phare d’observation de la Terre de la NASA, Atmosphere Observing System (AOS).

4.2      Exploration et science

  • Signature des Accords Artemis par la France (7 juin)

 La coopération lunaire s’est illustrée par la signature par la France des Accords Artemis, déclaration politique destinée à encadrer les activités d’exploration lunaire. Dans la lignée du Traité de l’Espace de 1967, la France a adhéré à cette initiative américaine qui compte désormais 23 pays avec un double objectif :

  • Renforcer notre coopération bilatérale dans l’exploration, notamment sur la Lune
  • Promouvoir les discussions multilatérales et la mise en place d’un cadre réglementaire international encadrant les activités d’exploration habitée au sein des instances onusiennes (CUPEEA)

Par cette adhésion, la France prend part aux discussions entre les différents pays signataires sur la gouvernance des activités d’exploration habitée, à l’image de la session organisée à Paris en marge de l’International Astronautical Congress (IAC) en septembre dernier, regroupant les chefs d’agence spatiale de 20 pays.

  • Trois nouveaux accords de coopération https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg-NASA dans les sciences planétaires

 D’autres domaines scientifiques ont fait l’objet de nouvelles coopérations avec notamment la mission Dragonfly à destination de Titan, lune de Saturne, ou encore les deux missions scientifiques d’exploration lunaire Farside Seismic Suite (FSS) et Lunar Surface Electromagnetics Experiment (LuSEE). Ces missions seront encadrées par le https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg et la NASA avec des contributions scientifiques majeures de la France.

4.3      Cadre règlementaire et échanges commerciaux

 L’écosystème spatial est en pleine évolution avec l’émergence d’un tissu industriel spatial français très dynamique, comprenant de nombreuses start-ups et PME prometteuses autour des acteurs privés historiques. Les Etats-Unis représentant 60% du budget spatial mondial, le marché américain offre de réelles opportunités. En 2022, les industriels français ont multiplié les partenariats avec des entreprises américaines à l’image du contrat de lancement entre Amazon et Arianespace pour le déploiement de sa constellation Kuiper ou encore l’arrivée sur le marché américain de start-ups françaises.

Dans ce cadre, le bureau du https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg de Washington en collaboration avec Business France et le Service économique régional de l’Ambassade a apporté un soutien régulier en 2022 aux acteurs spatiaux privés commerciaux français (suivi de l’écosystème industriel spatial américain, organisation des French Space Days en Floride et en Californie, analyse de l’émergence et suivi du développement du New Space américain, organisation d’une session industrielle lors de la séquence spatiale de la visite d’Etat du Président de la République,…).

5.       Perspectives et objectifs pour 2023

Dans un environnement international et commercial de plus en plus concurrentiel, la relation bilatérale franco-américaine s’est une nouvelle fois renforcée au cours de l’année 2022 avec des objectifs identifiés pour l’année à venir. Les capacités spatiales françaises restent particulièrement appréciées des Américains qui reconnaissent une maîtrise rare de tous les pans du spatial, qu’ils soient civils, commerciaux ou militaires. L’année 2023 devrait ainsi permettre de :

  • Entretenir et développer notre coopération institutionnelle scientifique dans les domaines des sciences spatiales et des sciences de la Terre.
  • Renforcer plus particulièrement les programmes spatiaux au service de la lutte contre le changement climatique et l’adaptation à ses conséquences
  • Encourager et développer les échanges commerciaux dans le domaine spatial, notamment en soutien à l’écosystème spatial français florissant.
  • Poursuivre les discussions dans le domaine réglementaire des activités spatiales au service du développement durable de l’Espace.

[1] Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, Ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Ministère des Armées.

[2] Department of State, Department of Commerce, Department of Transportation, Department of Defense, Department of Homeland Security, National Aeronautics and Space Administration, National Oceanic and Atmospheric Administration, Federal Aviation Administration.

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