Activités spatiales américaines en 2016 : météorologie civile et militaire

Cette note reprend les articles publiés dans le domaine de la météorologie civile et militaire par le bureau du CNES aux Etats-Unis d’Amérique pour l’année 2016.
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Cette note reprend les articles publiés par le bureau du https://fscience-old.originis.fr/wp-content/uploads/2023/06/GLOC_Oslo_Norway_S2_27juillet2022_web-2-1.jpg aux Etats-Unis d’Amérique pour l’année 2016. Pour éviter les duplications à répétition, la plupart des informations relevant de plusieurs thématiques n’ont été mentionnées que sous une seule thématique.

Inquiétudes sur la pérennité des données de météorologie

En mars, le Government Accountability Office (GAO) a souligné le manque de coordination entre l’U.S. Air Force (USAF) et la NOAA pour ce qui concerne la collecte d’informations météorologiques cruciales utilisées pour les opérations de frappe de longue portée et perception de l’espace de combat, telles que la caractérisation des nuages et l’imagerie météorologique des théâtres d’opération. La dépendance des données fournies sur l’océan Indien par Eumetsat, les difficultés rencontrées sur la série DMSP (cf. infra) et l’absence de prise en compte par l’USAF de la lacune capacitaire à court terme en matière de caractérisation des nuages ou d’imagerie météorologique des théâtres d’opération, dans le cadre des programmes météorologiques polaires sur lequel l’USAF travaille actuellement (mise en orbite d’un satellite tous les cinq à sept ans) ont en particulier été soulignés par le Government Accountability Office (GAO).

Dans ce contexte, le congrès s’est saisi du dossier à plusieurs reprises :
– En avril, le sous-comité des forces stratégiques du comité des forces armées de la Chambre des représentants a exprimé sa volonté, dans son projet de loi relatif au National Defense Authorization Act de 2017, de réassigner au National Reconnaissance Office certaines missions de l’U.S. Air Force en termes de météorologie par satellite, afin notamment de mieux faire face aux besoins spécifiques en matière de caractérisation des nuages ou d’imagerie météorologique des théâtres d’opération (projet de loi non finalisé).
– En juin lors d’une audition de la Commission pour la Science, l’Espace et la Technologie, présidée par Jim Bridenstine, un appel a été lancé pour le lancement d’une stratégie décennale en matière de prévisions météorologiques, à l’instar de ce qui existe déjà dans les domaines tels que les sciences spatiales ou les sciences de la Terre.
– Lors d’une audition le 7 juillet, la sous-commission pour l’Environnement de la Commission pour la Science, l’Espace et la Technologie, ainsi que le GAO, ont de nouveau fait part de leur inquiétude face au risque de discontinuité de données météorologiques polaires d’ici le lancement du satellite JPSS-1 (Joint Polar satellite System-1) de la NOAA en mars 2017.
– La sous-commission a en outre réitéré sa demande à la NOAA d’aller de l’avant dans la mise en œuvre du Commercial Weather Data Pilot program (budget de 3 M$ accordé en 2016 pour l’achat des données satellitaires de radio-occultation auprès de fournisseurs commerciaux).
– En décembre, le Sénat a approuvé à l’unanimité le Weather Research and Forecasting Innovation Act de 2016 (H.R. 1561). Six points sont abordés : les prévisions saisonnières, la communication sur les prévisions, la prévision des tornades et des ouragans, les alertes en cas de tsunami, l’éthique (lutte contre l’enrichissement personnel par utilisation abusive de prérogatives liées à un précédent emploi dans le secteur public), ainsi que le processus d’acquisition en lien avec les systèmes satellitaires de la NOAA (incluant la nécessité d’une meilleure prise en compte de l’existant). Le projet de loi prévoit également la mise en place par la NOAA d’un programme pilote permettant d’évaluer les capacités du secteur privé à fournir des données météorologiques.
Ce projet de loi (texte revu par le sénat et amendement complémentaire) non approuvé en termes identiques par la Chambre pendant la législative est devenu caduc à l’ouverture de la nouvelle législature.

Vue d’ensemble des activités météorologiques militaires

Pour la prochaine décennie la Défense devrait recourir à plus d’une vingtaine de programmes de satellites civils, militaires et étrangers (coopération avec la Corée du Sud, l’Inde et l’Europe via Eumetsat) pour couvrir ses besoins dans le domaine de la météorologie.

Au niveau national, l’Air Force compte pouvoir disposer de façon opérationnelle jusqu’en 2021 des satellites de la série du Defense Meteorological Satellite Program, initié dans les années 1960.

L’Air Force compte également lancer l’année prochaine un satellite de démonstration technologique, Operationally Responsive Space-6, qui vise le développement de capteurs plus petits. En août l’U.S Air Force a exprimé le souhait auprès du Congrès de lever les restrictions budgétaires, afin de pouvoir placer en orbite en septembre 2017, à l’aide d’un lanceur Falcon 9 de SpaceX, son satellite COWVR (Compact Ocean Wind Vector Radiometer ou ORS-6) dans le cadre d’un lancement multiple. ORS-6 est destiné à fournir des données sur les vents océaniques qui proviennent actuellement du satellite Windsat du US Naval Research Laboratory qui, lancé en 2003, a largement dépassé sa durée de vie nominale. Ce satellite devrait ouvrir la voie au lancement du premier satellite dans le cadre du programme de nouvelle génération de satellites météorologiques Weather Satellite Follow-on, à l’horizon 2022.

En août, la sous-commission des forces stratégiques du comité des forces armées de la Chambre des représentants a partiellement répondu positivement à cette demande (accord de principe pour débloquer un montant de 3,3 M$ sur les 21 M$ demandés).

L’Air Force prévoit également de lancer le programme Weather Satellite Follow-on en 2022, avec la mise en orbite de trois satellites (un lancement tous les cinq ans).

Les agences civiles devraient également fournir à la Défense une partie des informations qui lui sont nécessaires sur la caractérisation des nuages, l’épaisseur des couches neigeuses, l’humidité des sols ou la caractérisation des glaces marines : Polar Orbiting Environmental Satellites (POES), Joint Polar Satellite System (JPSS), le Suomi National Polar-orbiting Partnership (NPP), et la Constellation Observing System for Meteorology, Ionosphere, and Climate (COSMIC) pour la NOAA, satellites Aqua/Terra, Calipso et les Solar Moisture Active Passive Satellites, pour la NASA.

Anticipant des risques de rupture de continuité de données, l’U.S. Air Force a indiqué en août rechercher des solutions pour faire face à ses besoins spécifiques en matière de caractérisation des nuages ou d’imagerie météorologique des théâtres d’opération d’ici l’été 2019 : développement d’un nouveau satellite gouvernemental, achat de données météorologiques auprès du secteur privé ou combinaison de données issues de son système spatial infrarouge d’alerte anti-missile (SBIRS) avec des données météorologiques classiques. L’U.S Air Force prévoit à cette fin de passer en décembre au secteur privé jusqu’à cinq contrats d’étude d’un montant de 500 k$ chacun, pour une période de six mois. En juillet il a été annoncé que les données infrarouges du SBIRS développé par Lockheed Martin, seraient mises à disposition via l’U.S. Air Force pour des applications, tant civiles que militaires, dans le domaine de la télédétection, de la surveillance, de l’observation et de la collecte d’informations sur la Terre et l’atmosphère.

Le Defense Meteorological Satellite Program (DMSP) de l’Air Force

DMSP-19

L’U.S. Air Force (USAF) a perdu le contrôle de son satellite météorologique de Défense en orbite polaire DMSP-19 le 11 février. Conçu pour une durée d’utilisation de cinq ans et lancé par un lanceur Atlas V d’United Launch Alliance le 3 avril 2014 , DMSP-19 est le modèle de vol le plus récent dans la série des satellites destinés à aider les analystes à prévoir les tempêtes, les nuages, le brouillard et les tempêtes de poussières qui pourraient entraver les opérations militaires. L’USAF disposait à ce jour de cinq autres satellites météorologiques DMSP en orbite, qui ont tous dépassé leur durée de vie nominale. L’U.S. Air Force a annoncé le 24 mars avoir définitivement perdu le contrôle du satellite DSMP 19 et a en conséquence réassigné le satellite DSMP 17 lancé en 2006, pour remplir les fonctions du satellite défaillant. En juillet, après avoir identifié l’origine de la défaillance (problème électrique ayant entraîné le dysfonctionnement du système de commande et de contrôle), l’U.S Air Force a annoncé ne pas être en mesure de rendre le satellite de nouveau pleinement opérationnel. La qualité des données météorologiques tactiques en temps réel fournies par le satellite, dans une configuration « sûre et stable », devrait s’amenuiser avec la dégradation progressive de l’exactitude de pointage du satellite, jusqu’à ce qu’elles deviennent inexploitables. Ce satellite de 518 M$ représentait le plus récent de la constellation DMSP constituée de six éléments.

DMSP-17

Estimant que les mesures de glaces maritimes fournies par le satellite DMSP-17 n’étaient plus fiables depuis plus d’un mois, le National Snow & Ice Data Center a suspendu mi-mai la mise à jour de son index sur le changement d’état des glaces. Le centre publie désormais les informations sur les glaces obtenues grâce au DMSP-18, lesquelles n’ont cependant pas été inter-calibrées avec les données obtenues dans le passé via le DMSP-17. La défaillance du senseur utilisé pour les informations sur l’état des glaces ne remettrait pas en cause la capacité de ce satellite à fournir les informations sur la caractérisation des nuages et l’imagerie des théâtres d’opération, qui constituent les deux plus hautes priorités de la Défense.

DMSP-20

Le Pentagone a officiellement reporté la date butoir pour commencer le démantèlement du satellite météorologique militaire DMSP-20 du 1er juin au 1er septembre 2016. Ces trois mois supplémentaires devraient permettre au Département de la Défense d’apprécier à nouveau l’opportunité d’une nouvelle demande de financement auprès du Congrès pour le lancement du satellite, alors que ce dernier l’avait exclu, dans le cadre de la loi omnibus statuant sur le budget de l’année fiscale 2016 de la Défense. Cette demande n’a pas eu de suite dans le cadre de l’année 2016.

DMSP-12

Le satellite météorologique DMSP F-12, construit par Lockheed Martin, lancé il y a 22 ans et retiré du service en 2008, s’est rompu (broke up) en orbite. Un seul débris résultant de cet incident, dont la cause est à ce jour encore non établie mais qui pourrait avoir un lien avec l’assemblage de batterie dont il était équipé (cf. infra), aurait été détecté par l’US Air force.

Il s’agit de la troisième destruction en orbite d’un satellite DMSP, après celles du DMSP-F11 (qui avait conduit à la formation de 56 débris catalogués, malgré la procédure de retrait du service qui lui avait été appliquée) et du DMSP F-13 en février 2015 alors toujours en service, provoquant la formation de près de 150 débris. Celui-ci possédait le même assemblage de batterie que le DMSP F-12.
Neuf satellites DMSP lancés entre 1982 et 1997 présentent le même assemblage de batterie sujet potentiel à défaillance, parmi lesquels six sont toujours en orbite, et un seul, le DMSP F-14 est toujours en service. Quatre autres satellites DMSP lancés ultérieurement sont en service, le plus récent, le DMSP F-18, ayant été lancé en 2009.

GOES-R

Le 19 novembre 2016, GOES-R, le satellite premier d’un ensemble de quatre satellites géostationnaires de météorologie de cinquième génération, a été lancé depuis le pas de tir 41 de la base de l’Air Force à Cap Canaveral par une fusée Atlas V d’United Launch Alliance (ULA) pour le compte de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration).
Construit par Lockheed Martin, ce satellite d’une masse sèche de 2,86 tonnes (5,12 tonnes au lancement), de 6,1m de long, 5,6 m de large et 3,9 m de haut, est conçu pour pouvoir fonctionner dix ans, tout en disposant de suffisamment d’ergols afin d’être maintenu en orbite pendant dix-huit ans.
La flottille de satellites GOES est aujourd’hui constituée des deux satellites opérationnels GOES-13 (GOES-Est lancé en mai 2006, couvrant la partie orientale des Etats-Unis, l’Atlantique occidental et central, le Golfe du Mexique et les Caraïbes) et GOES-15 (GOES-Ouest lancé en mars 2010, couvrant la partie occidentale des Etats-Unis, dont Hawaï et l’Alaska, ainsi que le Pacifique central et oriental), respectivement en orbite à une longitude de 75 et de 135 degrés Ouest, ainsi que du satellite redondant en orbite GOES-14, placé à la longitude de 105 degrés Ouest.

Après une année de tests et d’opérations de contrôle, le satellite GOES-R, qui sera alors renommé GOES-16, remplacera le satellite GOES-13. Les lancements des satellites GOES-S, T et U, sont à ce jour respectivement prévus en 2018, 2019 et 2024, ce qui devrait permettre à cette série de satellites géostationnaires de météorologie de cinquième génération de fournir des données jusqu’en 2036.

Le budget total du programme de cet ensemble de cinquième génération (depuis le démarrage du programme en 2005 jusqu’en 2036) s’élève à 10,8 Md$, la NASA ayant déjà dépensé un montant de 6,1 Md$ à la fin de l’année fiscale 2015.

GOES-R se distingue des autres satellites d’observation de la Terre par ses capacités avancées dans quatre domaines :
– l’imagerie : GOES-R devrait être en mesure de générer de nouvelles images toutes les trente secondes, contre toutes les 30 minutes pour les satellites actuellement en orbite, avec une résolution jusqu’à présent inégalée (la NOAA compare le saut qualitatif effectué avec le passage de la télévision en noir et blanc à la télévision couleur en haute définition) ;
– les données relatives à la foudre : GOES-R constitue le premier satellite présentant des capacités opérationnelles de cartographie depuis l’espace de la foudre ;
– la météorologie de l’espace : GOES-R disposera de capacités d’observation des phénomènes solaires, précieuses dans le cadre d’une prévision en matière de météorologie de l’espace ;
– les opérations de recherche et de sauvetage (« Search and Rescue ») : GOES-R sera en outre équipé d’un transpondeur devant permettre de détecter les signaux de détresse de balises d’urgence et de relayer la position des balises aux garde-côtes.
Cf. https://www.france-science.com/Succes-du-lancement-du-satellite.html

Radio-Occultation

La NOOA a attribué en septembre deux contrats au secteur privé (370 k$ pour Spire et 695 k$ pour GeoOptics) pour la fourniture de données de radio-occultation GPS pour évaluation dans le cadre du Commercial Weather Data Pilot Program mis en place en 2015 à la demande du Congrès. La NOAA entend en particulier, au travers de ce projet limité dans le temps, étudier l’exactitude, la fiabilité et la vérifiabilité des données commerciales, ainsi que la compatibilité du recours au secteur privé pour l’obtention de données avec les obligations de l’agence au niveau de l’organisation météorologique internationale en termes de partage de données. La NOAA doit fournir en début d’année fiscale 2018 un rapport d’évaluation sur les données qui devront être fournies par le secteur privé d’ici fin avril 2017. Le cas échéant, des mesures issues du privé pourraient à terme compléter de façon opérationnelle les mesures à ce jour utilisées par la NOAA (mission COSMIC) et en prévision (mission COSMIC-2). Spire disposerait d’ores et déjà de cubesats de trois unités en mesure de recueillir des informations météorologiques alors que GeoOptics n’a à ce stade lancé aucun des petits satellites de sa constellation en développement.

Suivi des Ouragans

Le 15 décembre, un Pegasus XL d’orbital ATK a placé en orbite (lancement aéroporté) une constellation de huit satellites destinée à la prévision des ouragans. Construits par le Southwest Research Institute et l’université du Michigan, ces satellites d’une masse unitaire de 28,9 kg ont été placés sur une orbite inclinée de 35 degrés par rapport à l’équateur à une altitude de 510 km. Ils devraient détecter les signaux du système GPS réfléchis par les océans dans les régions tropicales et mesurer leur niveau de diffusion, ce qui permettrait d’en déduire les aspérités de la surface des océans et donc la vitesse du vent de surface, des informations de nature à améliorer les modèles de prévision de formation et d’évolution des ouragans.

Il s’agissait du 29ème lancement d’un Pegasus depuis 1997, le dernier lancement ayant été effectué en juin 2013. Le coût de lancement, services connexes inclus, est estimé à 55 M$.

Satellites en Orbite Basse Polaire

En août, la NOAA a annoncé le report du lancement du premier satellite météorologique polaire de nouvelle génération JPSS-1, de janvier à mars 2017 (le 5 janvier 2017, un nouveau report a été annoncé, la date de lancement étant désormais prévue entre juillet et septembre 2017).

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