La nouvelle loi « Navigable Protection Water Rule » soulève les oppositions parmi la communauté scientifique

De nombreux chercheurs affirment que la nouvelle loi fédérale régulant l'application du Clean Water Act laisse de côté des millions de kilomètres de cours d'eau et des hectares de zones humides non protégés.
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Ce 22 juin a été votée la Navigable Protection Water Rule, venant préciser l’application du Clean Water Act (CWA) mis en place en 1972. Cette loi réduit le périmètre d’origine du CWA, puisqu’elle ne rend protégées que les zones humides disposant d’une connexion hydrologique permanente avec des rivières, lacs ou autres étendues d’eau « navigables ». Le maintien de l’intégrité chimique et biologique des cours d’eau est aussi omise par le nouveau texte, bien qu’elle fasse partie intégrante du CWA.

Dans un article publié le 14 août dans la revue Science, des chercheur.se.s des Universités d’Ohio, de South Carolina, de Cornell, de Georgetown et de Georgia, affirment que cette loi sape l’esprit-même du CWA. L’auteure de correspondance, Mažeika Patricio Sullivan (Ohio State University), déclare : « Il est essentiel de dire d’emblée que la nouvelle législation ne protège pas l’eau au sens du Clean Water Act ».

Les étendues d’eau autonomes ne bénéficient ainsi plus d’aucune protection à travers le pays. Les cours d’eau éphémères comme ceux résultant de précipitations perdent leur statut « d’eau fédérale ». Parmi eux figurent 95% des rivières d’Arizona, dont plusieurs tributaires abondant le Grand Canyon. Cette évolution juridique signifie que les eaux non protégées pourront faire l’objet d’activités humaines nuisibles telles que le rejet de déchets industriels, augmentant le risque d’inondations, menaçant la qualité de l’eau consommable et pesant sur la biodiversité. Avec la levée des garde-fous existants, les cours d’eau concernés par cette loi pourront donc subir de majeures altérations.

Sullivan souligne que la loi est votée au moment où les scientifiques commencent seulement à comprendre comment interagissent les multiples facteurs exarçant un stress sur l’eau, comme l’urbanisation, la pollution, ou le changement climatique. Elle craint que le texte vienne annuler des décennies efforts pour l’amélioration de la qualité de l’eau dans le pays. Il s’agit donc pour elle d’un moment charnière dans l’histoire de la conservation.

In 2015, l’Administration Obama a mis en place la Clean Water Rule, qui classait tous les tributaires et la majorité des zones humides parmi les « eaux des Etats-Unis sous protection fédérale ». Un solide corps scientifique venait appuyer cette loi, avec plus de 1200 articles revus par l’EPA (Agence de Protection de l’Environnement) et la contribution de 49 experts techniques. De nombreuses recherches avaient mis en lumière la nécessité de protéger des systèmes isolés ou intermittents qui, si pollués ou détruits, réduiraient la qualité de l’eau circulant en aval. La Pr. Sullivan faisait partie du Comité Scientifique mobilisé par l’EPA à cette occasion, et déclare : « Ce qui est extrêmement préoccupant d’un point de vue politique est que le gouvernement, du moins en partie, ignore la science ». Elle ajoute : « L’idée de la connectivité est un des éléments scientifiques les plus ignorés par cette loi. Il existe différentes magnitudes de connectivité – en termes de fréquence ou de durée. Il existe aussi différents types de connectivité : biologique, chimique et hydrologique ».

De façon générale, les petits cours d’eau et zones humides sont critiques, de par leur seule existence, mais aussi du fait qu’ils supportent de plus grands écosystèmes en aval tels que des rivières, lacs ou réservoirs.

La Pr. Sullivan et ses collègues ont incité les mouvements citoyens, les Comités de protection de l’eau, les agences ainsi que le monde académique à protéger et conserver les étendues d’eau lors que cela est possible. Le problème est politique ; de nombreuses recours ont été déposés, notamment par une coalition formée par une vingtaine de procureurs généraux refusant d’appliquer cette loi.

Rédactrice : Juliette Paemelaere, Chargée de mission coopération scientifique, INRAE, [email protected]

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