La commission des appropriations de la Chambre a voté le 24 mai un budget de 19,5 Md$ pour la NASA pour l’année fiscale 2017 (octobre 2016 – septembre 2017). Ce vote intervient après trois auditions au Congrès, durant lesquelles Charles BOLDEN, administrateur de la NASA, a âprement défendu la requête budgétaire présidentielle pour l’année fiscale 2017 (19 Md$, contre un budget de 19,3 Md$ en 2016) publiée en février. La commission des appropriations du Sénat avait quant à elle voté sa proposition de budget fin avril (19,3 Md$).
Les textes devraient être soumis au vote en séance plénière du Sénat et de la Chambre des Représentants d’ici quelques semaines. Les deux chambres devront alors se réunir en conférence pour voter un texte à l’identique, la mise en œuvre du budget 2017 nécessitant un accord des deux chambres sur le même texte.
Les quatre priorités défendues par Charles BOLDEN
Exploration humaine et opérations
La stratégie d’exploration de la NASA, et plus particulièrement l’initiative A Journey to Mars destinée à établir la présence humaine au sein du système solaire, constitue un volet essentiel de la vision stratégique de l’administrateur de la NASA. La première étape consiste à maintenir les activités humaines en orbite basse à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS), afin notamment d’acquérir les connaissances nécessaires au séjour prolongé d’êtres humains dans l’espace. L’exploitation de l’ISS est soutenue grâce aux contrats de fret Commercial Resupply Services (CRS), un nouveau financement devant être alloué en 2017 à Boeing et SpaceX (et ultérieurement à Sierra Nevada). Le contrat Commercial Crew Transportation Capability (CCtCap), permettant de s’affranchir de la dépendance envers les lanceurs russes pour le transport des astronautes américains, tout en ayant recours à des opérateurs privés (Boeing, SpaceX), devrait déboucher sur un premier vol en en 2017.
La NASA entend continuer le développement du lanceur lourd SLS, du vaisseau Orion et des systèmes sol associés, indispensables au vol habité au-delà de l’orbite basse. La première mission est programmée en 2018.
L’agence demeure également attachée à l’Asteroïd Redirect Mission (ARM), dans le cadre de laquelle un robot devrait extraire un bloc d’un astéroïde puis utiliser la propulsion électrique solaire pour le placer en orbite lunaire. Une mission habitée, à bord de la capsule Orion, effectuerait ensuite un rendez-vous avec ce bloc d’astéroïde pour récolter des échantillons.
- La commission des appropriations de la Chambre a voté un budget de 2 Md$ pour SLS, soit un budget identique par rapport à l’année passée, mais avec 150 M$ de moins que la commissions des appropriations du Sénat et 699,7 M$ de plus par rapport à la requête présidentielle pour l’année fiscale 2017. Ce budget maintiendrait la date cible pour le premier lancement et inclurait 300 M$ pour le développement des moteurs de l’étage supérieur dans la perspective de missions habitées dès 2021. La capsule Orion recevrait 1,35 Md$, soit 80 M$ de plus qu’en 2016, 50 M$ de plus que le budget accordé par la commission des appropriations du Sénat et 230,2 M$ supplémentaires par rapport à la requête présidentielle pour l’année fiscale 2017.
- La commission des appropriations du Sénat avait attribué un budget stable par rapport à 2016 et identique à la requête présidentielle pour l’année fiscale 2017 (1,18 Md$) au contrat CCtCap. Le rapport de la commission des appropriations émet toutefois ses doutes quant à la capacité des entreprises de tenir les délais prévus pour un premier vol. Requérant la rédaction de plusieurs rapports, la commission des appropriations de la Chambre n’a quant à elle pas précisé les financements attribués à ce contrat.
- La commission des appropriations de la Chambre ne prévoit aucun financement pour la planification de l’ARM. Elle souhaite que la NASA « établisse une stratégie pour retourner sur la Lune afin de tester des capacités qui seront nécessaires sur Mars ».
Technologies spatiales
La NASA entend se consacrer au développement et à l’intégration de nouvelles technologies pour contribuer au succès de prochaines missions spatiales et répondre aux défis industriels aérospatiaux. L’agence prévoit d’attribuer 600 contrats à l’industrie, aux petites entreprises, aux investisseurs privés ou à des universités pour stimuler l’innovation. La NASA met notamment en avant le lancement début 2017 de la Green Propellant Infusion Mission (GPIM) qui devrait permettre de développer une alternative écologique aux systèmes de propulsion actuels.
- La commission des appropriations de la Chambre a voté un financement de 739,2 M$, soit 52,7 M$ supplémentaires par rapport au vote de la commission des appropriations du Sénat et au montant attribué en 2016, mais 87,5 M$ de moins que la requête présidentielle pour l’année fiscale 2017.
Sciences
La NASA gère actuellement plus de 55 missions scientifiques ainsi que 35 missions en phase de formulation (phase A-B).
– L’année fiscale 2017 devrait voir le développement de nouvelles missions d’observation de la Terre telles que le Ice, Cloud, and Land Elevation Satellite-2 (ICESAT-2) et le Gravity recovery and Climate Experiment Follow-On (GRACE-FO).
– Le développement du téléscope Transiting Exoplanet Survey Satellite (TESS), dédié à la recherche d’exoplanètes qui gravitent dans la zone habitable autour des étoiles proches de la Terre, ainsi que celui du James Webb Space Telescope (JWST), dont le lancement est prévu en 2018, sera poursuivi. La NASA entend également avancer dans la conception du télescope Wide-Field Infrared Survey Telescope (WFIRST).
– En sciences planétaires, la NASA compte poursuivre le développement de plusieurs missions comme les missions martiennes du véhicule Curiosity, de la sonde InSight dédié à l’étude de la sismologie de la Planète rouge (réalisé en collaboration avec la France et dont le lancement est prévu en 2018) et de la sonde Mars Atmosphere and Volatile Evolution mission (MAVEN). La NASA souhaite également, à un horizon plus lointain, le développement d’un nouveau véhicule martien pour la collecte et le retour d’échantillons, ainsi qu’une mission vers Europe (lune de Jupiter), où l’agence espère trouver des formes de vie dans les océans recouverts par la glace.
– En héliophysique, la NASA requiert la poursuite du développement de Solar Probe Plus et de la contribution à la mission Solar Orbiter de l’ESA (toutes deux missions du programme LWS, Living with a Star). Le programme LWS devrait déboucher sur le lancement en 2024 d’une mission pour l’étude du couplage dynamique global. La NASA compte également poursuivre le programme Heliophysics Explorer avec les prochains lancements d’Ionospheric Connection Explorer (ICON) et de Global-scale Observations of the Limb and Disk (GOLD).
- La commission des appropriations de la Chambre a attribué 5,6 Md$ au volet scientifique, soit 202 M$ de plus que la commission des appropriations du Sénat. Ce montant est stable par rapport au montant attribué l’année passée (+ 8 M$) et à la requête budgétaire pour l’année fiscale 2017 (-3,5 M$).
- Le volet « sciences de la Terre » est en forte baisse (294 M$ de moins que le texte voté par la commission des appropriations du Sénat et 342 M$ de moins que la requête budgétaire pour l’année fiscale 2017).
- Le volet « sciences planétaires » est en forte augmentation (490 M$ de plus que le texte voté par la commission des appropriations du Sénat et 327 M$ de plus que la requête budgétaire pour l’année fiscale 2017). Ces fortes augmentations s’expliquent en particulier par l’attribution d’un budget de 260 M$ pour la mission vers Europe, soit une augmentation de 215 M$ par rapport à l’année précédente.
Aéronautique
La NASA défend la mise en place d’une stratégie sur dix ans afin d’accélérer les recherches en aéronautique avec une augmentation substantielle du budget de ce volet. L’agence souhaite notamment développer un avion de ligne supersonique.
- La commission des appropriations de la Chambre a voté un budget de 712 M$, soit 111 M$ supplémentaires par rapport à la commission des appropriations du Sénat, 72 M$ de plus que le montant attribué l’année précédente, mais 78,4 M$ de moins que la requête présidentielle pour l’année fiscale 2017.
Les commissions des appropriations du Sénat et de la Chambre estiment avoir voté un budget en nette par rapport à la requête présidentielle (plus d’un milliard supplémentaire), du fait de la transformation de l’intégralité des dépenses dites « obligatoires » incluses dans la requête présidentielle (c’est-à-dire à financer au travers de recettes ou d’économies budgétaires dans d’autres domaines) en dépenses dites « discrétionnaires » relevant directement et uniquement du budget la NASA (c’est-à-dire ne nécessitant pas de recettes extérieures ou d’économies budgétaires dans d’autres domaines).
Les transferts de masses budgétaires témoignent une nouvelle fois des désaccords entre la présidence et le Congrès sur les priorités du programme spatial américain. Le budget alloué au développement de SLS et Orion témoigne en particulier de la volonté politique du Congrès de maintenir le leadership américain dans le domaine de l’exploration humaine, alors que la présidence et la NASA, tout en partageant cette priorité, sont attachées à un certain équilibre programmatique.
a Pour l’année fiscale 2017, la NASA a inclus les activités éducatives du volet au budget dédié à l’astrophysique et aux sciences de la Terre. La commission des appropriations a suivi cette initiative et a inscrit les 42 M$ alloués aux activités éducatives au sein de la ligne budgétaire « astrophysique ».
b Inclut les programmes de transport humain de fret vers la station spatiale internationale.