Bulletin d’actualité Espace n°22-07

Bulletin d’actualité rédigé par le Bureau du CNES et Service Spatial de l’Ambassade de France à Washington D.C.
(Nicolas Maubert, Diane Zajackowski, Samuel Mamou)

– Pour consulter la version PDF de ce bulletin, cliquez ici – 

L’essentiel de la quinzaine spatiale

Les derniers jours ont été marqués par l’annonce par la Vice-Présidente Kamala Harris d’un moratoire américain sur les tests de missiles antisatellites à ascension directe (ASAT). Malgré le caractère unilatéral de leur décision, les États-Unis souhaitent inciter les autres nations spatiales à suivre leur exemple et à imaginer de nouvelles normes de comportement dans l’Espace. Cette annonce intervient d’ailleurs à quelques semaines de la tenue en mai prochain des premières discussions onusiennes sur le sujet des normes de comportement. D’ici là, les États-Unis poursuivent leurs discussions bilatérales avec leurs partenaires sur ce sujet comme sur d’autres. Divers accords de coopération en matière de spatial de défense et de surveillance spatiale ont d’ailleurs été signés entre les États-Unis et trois autres nations : l’Inde, le Royaume-Uni et la Suède.
La quinzaine spatiale qui s’est écoulée a également été rythmée par la publication de plusieurs documents significatifs. Le premier d’entre eux est le Decadal Survey en sciences planétaires. Celui-ci est venu rappeler la priorité accordée aux missions en cours Mars Sample Return (MSR) et Europa Clipper, et a annoncé deux nouvelles priorités scientifiques pour la décennie à venir : Uranus et Encelade. Dans un autre domaine, l’Office of Science and Technology Policy (OSTP) a publié une stratégie visant à favoriser les activités de services en orbite, un domaine qui continue d’intéresser fortement le secteur spatial public et privé aux États-Unis. Côté commercial, la société Axiom Space a récemment fondé une joint-venture avec le fonds d’investissements japonais Mitsui pour proposer de nouveaux services en orbite. Côté institutionnel, l’U.S. Space Force (USSF) a annoncé une mission de démonstration, Tetra-5, pour tester des capacités de ravitaillement en orbite géostationnaire.
Dans le domaine des lanceurs, plusieurs faits marquants sont à noter, à commencer par la signature de contrats notoires. SpaceX s’est ainsi vu confier par la Corée du Sud le lancement de cinq satellites espions. ULA, qui avait bénéficié début avril d’un contrat d’ampleur de la part d’Amazon, a pour sa part conclu un contrat exceptionnel avec Aerojet Rocketdyne visant la fourniture de 116 moteurs pour Vulcan Centaur. Toujours côté lanceurs, notons enfin le retour à venir du Space Launch System (SLS) au Vehicle Assembly Building (VAB) suite à la découverte de plusieurs anomalies sur le lanceur ainsi que sur son pas de tir.
Ce retour, prévu au mieux à partir du 26 avril, ralentit donc l’exécution du wet dress rehearsal et rend donc très peu probable un lancement de la mission Artemis-1 avant fin juin au plus tôt.

Personalia

L’ancien Vice-Président de COMSPOC rejoint le Département de la Défense sur les questions de politique spatiale

Space News, 18 avril 2022
Travis Langster occupera plus précisément le poste de Principal Director of DoD Space Policy, auprès du bureau de John Hill, Deputy Assistant Secretary of Defense for Space and Missile Defense. Ce bureau est notamment impliqué sur les questions de normes comportementales dans l’Espace.
Avant de rejoindre ce poste, Travis Langster était Vice-Président et Directeur général de COMSPOC, une entreprise spécialisée dans le domaine de la connaissance de l’environnement spatial et de la gestion du trafic en orbite.

Politique et Relations internationales

Les États-Unis annoncent un moratoire sur les tests de missiles antisatellites à ascension directe

Space News, Space Policy Online, 18 avril 2022
Politico, 20 avril 2022
Space News, 22 avril
Le 18 avril dernier, à l’occasion d’une visite au 18th Space Defense Squadron de l’U.S. Space Command en charge de la détection et du suivi des objets spatiaux, la Vice-Présidente (VP) Kamala Harris a annoncé que les États-Unis s’engageaient à ne plus conduire de tests de missiles antisatellites à ascension directe (ASAT). Washington avait, par le passé, procédé à de tels tirs, au même titre que d’autres nations spatiales comme l’Inde, la Chine ou encore la Russie dont le dernier test, datant du mois de novembre dernier, avait suscité une vive indignation de la communauté internationale et notamment américaine. Qualifiant ces tests d’irresponsables et imprudents, la VP Harris a insisté sur les risques que représentait cette pratique sur la préservation de l’environnement extra-atmosphérique et sur les activités spatiales des États-Unis et des autres nations à l’heure où le nombre d’acteurs et d’objets spatiaux se multiplie. Si cette dernière a rappelé les tests récemment entrepris par la Chine et la Russie, il reste à noter l’absence de mention de l’Inde avec qui les États-Unis ont annoncé un rapprochement sur les questions de défense spatiale (voir infra).
Malgré le caractère unilatéral de leur décision, les États-Unis ont pour ambition d’inciter les membres de la communauté internationale à suivre leur exemple et à cheminer vers l’adoption de nouvelles normes de comportement responsable dans l’Espace. Ce moratoire peut ainsi se lire à la lumière des futures discussions qui auront lieu dans le cadre de l’Open-Ended Working Group on Reducing Space Threats mis en place par les Nations Unies l’an dernier pour discuter de la mise en place de nouvelles normes en orbite et dont les premières négociations devraient débuter en mai prochain. Les États-Unis ne semblent toutefois pas avoir attendu le mois de mai pour commencer à dialoguer avec les membres de la communauté internationale sur la question des tests ASAT. La VP Harris a ainsi indiqué avoir abordé cette problématique avec divers pays (y compris l’Inde) et noté un fort intérêt de ses partenaires à la définition de nouvelles normes.
Malgré ces annonces, l’ensemble du paysage politique américain ne semble pas avoir été convaincu par l’annonce de la Maison Blanche. Plusieurs élus Républicains de la Chambre des Représentants ont critiqué le caractère unilatéral de la décision de la Maison Blanche qui serait, selon eux, sans impact sur le comportement de nations spatiales rivales comme la Russie et la Chine et handicaperait les États-Unis.
Le Sénateur Marco Rubio (R-FL) a par ailleurs demandé à l’Exécutif de soutenir son projet de loi dit DEBRIS (Deterring Errant Behavior Risking International Space) qui prévoit d’imposer des sanctions aux entités qui se rendraient responsables de la création délibérée de débris (notamment par l’utilisation d’armes spatiales), qui feraient preuve de négligence dans l’évitement de collisions ou encore qui ne désorbiteraient pas correctement leurs satellites. L’administration et notamment le Deputy Assistant Secretary of Defense John Hill a toutefois précisé que l’annonce faite par la VP Harris n’avait pas pour objectif de « désarmer » les États-Unis, d’abandonner la technologie des missiles antisatellites, ou de ne pas en faire usage si cela était nécessaire. John Hill a au contraire rappelé que ce moratoire (qui ne concerne que les tests) serait sans conséquence sur les États-Unis qui ont déjà fait la preuve de leurs capacités en la matière.
Sur le plan international enfin, plusieurs pays ont réagi à l’annonce des États-Unis. La Corée du Sud a positivement accueilli cette décision et rappelé son implication dans les discussions onusiennes à venir.
De façon plus surprenante, la Russie a également favorablement accueilli cette annonce, estimant qu’il s’agissait d’un pas dans la bonne direction, mais a appelé les États-Unis à considérer et discuter des propositions faites par la Russie et la Chine en 2008 sur la mise en place d’un traité interdisant le placement d’armes en orbite. Pékin a adopté une position plus sévère et sceptique envers Washington en mettant en avant la responsabilité des États-Unis dans la production de débris et la limitation de ce moratoire aux seuls tests de missiles antisatellites, sans avoir prononcé d’interdiction sur leur recours en toutes circonstances ou sur l’interdiction d’autres armes antisatellites (air-espace, espace-espace, etc.).

Les États-Unis resserrent leurs liens avec trois pays autour de la surveillance et de la défense spatiales

Space News, 12 avril 2022
À l’occasion d’une rencontre le 11 avril entre les Ministres américains et indiens de la Défense et des Affaires étrangères sur les nouveaux espaces, Washington et New Delhi ont signé un accord sur la connaissance de l’environnement spatial. Cet accord, qui vise principalement à accroître le partage d’informations entre les deux pays, devrait jeter les bases d’une coopération indo-américaine plus large dans le domaine spatial.
Le Secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin a d’ailleurs annoncé que des échanges devraient prochainement avoir lieu entre l’U.S. Space Command (USSPACECOM) et l’India’s Defense Space Agency.
Quelques semaines auparavant lors du 37ème Space Symposium, l’USSPACECOM avait resserré ses liens avec deux autres pays, la Suède et le Royaume Uni. Il avait effectivement signé avec la Swedish Air Force un accord portant également sur la connaissance de l’environnement spatial et avec l’U.K. Space Command un Memorandum of Understanding (MoU) global visant à accroître la coopération, le partage d’informations, ou encore l’interopérabilité entre les deux pays dans le domaine spatial.

L’ESA se tourne vers la NASA pour pallier son retrait à plusieurs missions lunaires russes

Space News, Space Policy Online, 13 avril 2022
Un mois après l’annonce de la suspension du lancement de la mission ESA-Roscosmos ExoMars, l’ESA a annoncé son retrait des missions russes Luna-25, 26 et 27. L’Agence prévoyait initialement d’y inclure la démonstration de plusieurs instruments destinés à de futures missions lunaires. Afin de compenser cette décision et trouver des opportunités de vol alternatives pour ses différentes charges utiles, l’ESA s’est tournée vers ses autres partenaires internationaux et notamment la NASA. Les discussions menées entre les deux agences ont déjà permis à l’ESA d’intégrer plusieurs charges utiles sur différents vols CLPS (Commercial Lunar Payload Services) :

  • Un spectromètre destiné à être utilisé sur l’instrument Prospect de l’ESA sera embarqué sur l’alunisseur Peregrine d’Astrobotic prévu au lancement cette année pour le vol inaugural du Vulcan Centaur d’ULA
  • L’instrument Prospect est quant à lui prévu sur un vol CLPS encore non défini mais programmé en 2025

Les négociations entre l’ESA et la NASA pourraient toutefois se poursuivre. L’ESA cherche encore des opportunités de vol pour d’autres instruments, comme le système d’alunissage de précision PILOT (prévu initialement sur Luna-27) et sa caméra de navigation PILOT-D (prévue initialement sur la rover Luna-25 dont elle devrait être désinstallée sur demande du Directeur général de l’ESA) qui seront utilisés au profit de l’alunisseur européen European Large Logistic Lander (EL3). Rappelons également que la NASA et l’ESA sont actuellement en cours de discussion pour permettre à l’ESA de palier la suspension de la mission ExoMars.

La Maison Blanche publie une stratégie pour favoriser les activités de services en orbite

Cf. Services en orbite

Economie spatiale

La startup japonaise Warpspace s’implante aux États-Unis pour y promouvoir ses solutions de communications satellitaires optiques

Space News, 9 avril 2022
Fondée en 2016, la société japonaise Warpspace souhaite offrir des services de transfert de données satellitaires en s’appuyant sur des technologies optiques ainsi que sur une constellation de trois satellites « relais » en orbite moyenne. Voyant dans le marché américain des perspectives de croissance, l’entreprise a pris la décision d’ouvrir une antenne à Washington D.C. à l’été prochain. Warpspace estime effectivement que ses services de communications optiques pourraient susciter l’intérêt des opérateurs de satellites d’imagerie spatiale ou encore de diverses entités publiques comme la Space Development Agency (SDA) avec des quantités importantes de données. Warpspace semble également s’intéresser au programme Artemis de la NASA, et avait été sélectionnée en janvier dernier par le gouvernement japonais pour conduire une étude sur le recours aux communications optiques au bénéfice des activités d’exploration lunaires.

Grâce à son contrat de lancement pour Amazon, ULA dynamise le tissu industriel américain

Satellite Today, 18 avril 2022
Parabolic Arc, 20 avril 2022
Le contrat de 47 lancements accordé début avril par Amazon à ULA pour le déploiement de sa constellation Kuiper n’a pas uniquement pour effet de remplir le carnet de commandes de la société de lancement. Celui-ci offre également de nouvelles perspectives pour les partenaires de ULA qui a signé le 18 avril un contrat avec L3 Harris pour la fourniture sur 5 ans de matériels d’avionique. Quelques jours auparavant, l’opérateur de lancement avait déjà signé un contrat avec Aerojet Rocketdyne pour la fourniture de 116 moteurs RL10C-X (cf. Lanceurs).

Sécurité et Défense

Les États-Unis annoncent un moratoire sur les tests de missiles antisatellites à ascension directe

Cf. Politique et Relations internationales

Les États-Unis resserrent leurs liens avec trois pays autour de la surveillance et de la défense spatiales

Cf. Politique et Relations internationales

La NASA et l’U.S. Space Force renforcent leur coopération au profit de la protection planétaire

Space News, 15 avril 2022
Le 7 avril dernier, la NASA et l’U.S. Space Force (USSF) ont signé un accord prévoyant le partage par cette dernière d’informations collectées par ses capteurs sur les « bolides » (des objets géocroiseurs trop petits pour s’écraser sur Terre mais de taille suffisante pour exploser lors de leur entrée dans l’atmosphère terrestre) afin de permettre à la NASA de mieux comprendre les effets que pourrait avoir l’impact de plus gros objets géocroiseurs sur Terre. Pour mémoire, la protection planétaire était l’un des 11 domaines de coopération mis en lumière dans le Memorandum of Understanding signé entre la NASA et l’USSF en septembre 2020. Malgré l’attention accordée par les deux agences à cette problématique, notons toutefois que la NASA a annoncé devoir retarder le développement de sa mission NEO Surveyor pour compenser les surcoûts qui affectent les missions Europa Clipper et Mars Sample Return. 

L’U.S. Space Force souhaite réaliser une démonstration de ravitaillement en orbite géostationnaire en 2025

Cf. Services en orbite

L’U.S. Space Force prévoit de mener une nouvelle démonstration de lancement réactif en 2023

Space News, 20 avril 2022
La dernière démonstration de ce type avait été réalisée l’année dernière lors de la mission Tactically Responsive Launch-2 (TacRL-2) exécutée avec un Pegasus XL de Notrhop Grumman depuis la Vandenberg Space Force Base (Californie). L’ensemble du processus, mené depuis la planification de la mission jusqu’au lancement, avait représenté une durée de 10 mois. Pour ce nouveau test, l’U.S. Space Force (USSF) souhaite raccourcir plus encore ces délais, y compris sur la phase d’intégration de la charge utile (Nothrop Grumman avait eu 21 jours pour intégrer sa charge utile puis procéder au lancement).
L’annonce de cette nouvelle mission intervient tandis que le Congrès a attribué un budget de 50 M$ au programme de lancement réactif du DoD pour 2022. Celui-ci n’avait demandé aucun fonds pour le programme dans le cadre de la requête budgétaire présentielle, un silence critiqué par les élus du Capitole.

Le satellite de navigation géostationnaire NTS-3 de l’USAF sera lancé en 2023

Cf. Navigation et Positionnement

La Space Development Agency souhaite anticiper le lancement de ses satellites de détection de missiles

Space News, 10 avril 2022
Le 6 avril dernier, l’U.S. Space Force (USSF) a soumis au Congrès une demande de 600 M$ afin de compléter la requête budgétaire présidentielle publiée il y a quelques semaines. Cette rallonge comprend notamment 200 M$ demandés afin de permettre à la Space Development Agency (SDA), qui sera rattachée à l’USSF prochainement, d’anticiper le lancement de la Tracking Layer de sa constellation militaire National Defence Space Architecture (NDSA). Pour mémoire, la Tracking Layer de la NDSA a vocation à regrouper une centaine de satellites de détection de missiles. Hormis les 8 premiers satellites de la Tranche 0 prévus au lancement en 2023, les prochaines grappes de satellites étaient programmées pour être lancées en 2026.
La publication du budget 2022 et la volonté affichée par le Congrès d’accélérer le développement de la Tracking Layer a toutefois incité la SDA à vouloir anticiper ces lancements d’un an, en 2025.

Le NRO utilise un Falcon 9 réutilisé pour la première fois

Space News, 17 avril 2022
Le 17 avril, SpaceX a lancé le satellite espion NROL-85 pour le compte du National Reconnaissance Office (NRO) depuis la Vandenberg Space Force Base (Californie). Le premier étage, déjà utilisé au cours de la mission NROL-87 en février dernier, a atterri sur la Landing Zone 4. Ce lancement marque un tournant pour le NRO qui a souscrit pour la première fois à une mission Falcon 9 avec premier étage réutilisé. 

Observation de la Terre 

La mission SWOT sera finalement lancée avec un Falcon 9 réutilisé

Space News, 14 avril 2022
La NASA a annoncé début avril une modification du contrat de lancement de 112 M$ avec SpaceX pour avoir recours à un lanceur Falcon 9 déjà utilisé. Elle a justifié ce changement par des contraintes calendaires et a assuré l’absence de risque supplémentaire associé au lancement. Le lancement de la mission franco-américaine d’hydrologie est donc prévu pour novembre 2021 depuis la Vandenberg Space Force Base (Californie). À noter que si ce type de changement est généralement réalisé au profit d’une réduction des coûts, la valeur du contrat n’a pas été modifiée à la suite de cette annonce. Toutefois, SpaceX aurait proposé à la NASA des contreparties (non publiées) qui bénéficieront à la mission SWOT.
Pour mémoire, la NASA a déjà eu recours à des lanceurs réutilisés pour des missions scientifiques, la première datant de novembre 2021 avec la mission DART. Par le passé, elle a également eu recours au lanceur Falcon 9 réutilisé pour des missions de ravitaillement de l’ISS ou encore des missions habitées depuis avril 2021 avec la mission Crew-2. L’Administrateur Associé pour la Science de la NASA, Dr. Thomas Zurbuchen, a d’ailleurs récemment indiqué sa préférence pour les lanceurs réutilisés dans le cadre de missions scientifiques. 

Exploration habitée 

SLS : le lanceur s’apprête à retourner au Vehicle Assembly Building, retardant très probablement la mission Artemis-1

Space News, Space Policy Online, 18 avril 2022
Après deux premiers reports les 3 et 4 avril, le wet dress rehearsal du Space Launch System (SLS) a de nouveau été suspendu le 14 avril dernier en raison d’une fuite d’hydrogène détectée sur le corps central du lanceur. Cette anomalie, ainsi que d’autres détectées au niveau d’une valve du premier étage et de l’approvisionnement du pas de tir en azote, ont incité la NASA à prendre la décision de ramener le SLS au sein du Vehicle Assembly Building (VAB) afin d’effectuer les révisions nécessaires. Le transport du SLS vers le VAB devrait débuter au mieux à compter du 26 avril prochain suivant les conditions météorologiques. Selon la NASA, ce nouveau report rendrait la fenêtre de lancement début juin peu probable. La prochaine fenêtre s’ouvre à partir du 29 juin et se termine le 12 juillet.

Exploration robotique 

L’ESA se tourne vers la NASA pour pallier son retrait à plusieurs missions lunaires russes

Cf. Politique et Relations internationales

La société Lonestar souhaite développer un data center sur la Lune

Space News, 19 avril 2022
Afin d’assurer le stockage et le traitement de données qui seront nécessaires aux activités lunaires, l’entreprise Lonestar voit dans la conception de data centers lunaires une alternative plus sûre et écologique au développement de telles infrastructures sur Terre, souvent très énergivores. En effet, contrairement aux data centers terrestres ayant notamment besoin d’être refroidis, la chaleur produite par un data center lunaire pourrait permettre à ce dernier de survivre aux températures extrêmes de la Lune. Lonestar prévoit de concevoir des data centers d’une durée de vie 15 à 20 ans et d’installer le premier à horizon 2026.
D’ici là, l’entreprise sera présente sur deux vols Intuitive Machines, notamment le second, pour tester un prototype, version réduite de son concept. Celle-ci prendra la forme d’une charge utile de 16 téraoctets qui sera reliée à l’alunisseur d’Intuitive Machines tout au long de sa mission à la surface lunaire (entre 11 et 14 jours) afin, notamment, d’en utiliser l’énergie. Pour mémoire, la seconde mission CLPS d’Intuitive Machines est prévue à ce jour au dernier trimestre de cette année sur un Falcon 9 de SpaceX.

Sciences de l’Univers

L’Académie des Sciences américaine dévoile les priorités en sciences planétaires pour les 10 prochaines années

Space Policy Online, Space News, 19 avril 2022
C’est un exercice qui intervient tous les dix ans aux États-Unis. L’Académie nationale des Sciences, de l’Ingénierie et de la Médecine publie, pour chaque domaine scientifique couvert par la NASA (sciences planétaires, sciences de la Terre, astrophysique, héliophysique, sciences biologiques et physiques), un Decadal Survey fixant des priorités scientifiques pour la décennie qui suit. Le 19 avril dernier, l’Académie a ainsi publié son Decadal Survey pour les sciences planétaires, identifiant de nouveaux objectifs pour différentes catégories de missions planétaires :

  • Les missions phare ou « flagship missions» (de grande envergure) : l’Académie a rappelé que la priorité était donnée à l’achèvement des missions en cours que sont Mars Sample Return (MSR) et Europa Clipper. Elle a en outre identifié plusieurs nouvelles missions flagship, classées par ordre de priorité. La première d’entre elles consisterait en un orbiteur et une sonde en direction d’Uranus afin de percer les mystères des planètes glacées géantes, la catégorie de planètes la plus commune de notre Univers. Le calendrier fixé par le Decadal Survey est un lancement en 2031 ou 2032 pour un voyage de 13 ans, avec un objectif de budget à 4,2 Md$. La seconde mission identifiée par l’Académie est baptisée Enceladus Orbilander. Celle-ci a pour but d’étudier la lune de Saturne Encelade en orbite puis à sa surface. Le coût estimé de la mission serait de 4,9 Md$ avec un lancement envisagé à la fin de la décennie 2030 et une arrivée estimée début 2050.
  • Les missions New Frontiers(de gamme intermédiaire) : l’Académie a sélectionné plusieurs missions potentielles, incluant diverses destinations : Centaur (un corps glacé situé entre Jupiter et Neptune), Ceres (le plus gros astéroïde présent dans la ceinture entre Mars et Jupiter), Enceladus, Titan, Vénus, etc. Pour permettre le développement des missions New Frontiers et tenir compte de la réalité des coûts qui leur sont associés, l’Académie propose de relever le plafond budgétaire qui leur est imposé à 1,65 Md$ (au lieu de 1 Md$ historiquement).

Parmi les autres points d’intérêt du Dedacal Survey, on notera la demande faite à la NASA, une fois le pic de dépenses pour MSR passé, de travailler sur une autre mission martienne baptisée « Mars Life Explorer ». Celle-ci a pour objectif de rechercher des traces de vie sur la Planète rouge en forant divers dépôts de glace à sa surface. L’Académie soutient également la mission lunaire Endurance-A. Celle-ci serait intégrée dans le cadre du programme Artemis afin de donner à ce dernier des objectifs scientifiques clairs et de rationaliser les coûts de la mission. En effet, celle-ci aurait pour but de collecter 100 kg d’échantillons lunaires qui seraient ensuite rapportés par des astronautes dans le cadre d’une mission habitée Artemis. Notons enfin le soutien de l’Académie aux activités de défense planétaire de la NASA et notamment au programme NEO Surveyor qui pourrait être retardé par la NASA pour pallier les surcoûts d’autres missions.
Consciente des contraintes budgétaires qui pourraient affecter la réalisation des différents objectifs inscrits dans le Decadal Survey, l’Académie a d’ailleurs proposé deux « scenarii » plus ou moins ambitieux en termes budgétaires et de missions soutenues.

Lanceurs et Spatioports 

SpaceX sélectionnée par la Corée du Sud pour lancer 5 satellites espions

Space News, 11 avril 2022           
Les cinq satellites espions développés dans le cadre du Projet 425, programme de renseignement de suivi des activités militaires nord-coréennes, seront lancés d’ici 2025. Un premier satellite infrarouge électro-optique est prévu au lancement d’ici la fin de l’année 2023 avec un Falcon 9 à destination de l’orbite basse. Pour mémoire, la Corée du Sud avait déjà fait appel aux services de SpaceX en 2020 pour lancer son premier satellite de communications militaires, Anasis-2, en orbite géostationnaire.

SpinLaunch signe un contrat de démonstration avec la NASA

Parabolic Arc, 18 avril 2022         
Dans le cadre du Flight Opportunities Program de la NASA, SpinLaunch va concevoir et lancer une charge utile expérimentale pour le compte de la NASA. Prévu d’ici la fin de l’année, ce vol d’essai suborbital sera réalisé depuis le Spaceport America (Nouveau-Mexique) où est situé son Suborbital Accelerator Launch System. Les résultats seront ensuite analysés conjointement avec la NASA pour identifier de futures opportunités. Pour mémoire, SpinLaunch souhaite développer un lanceur propulsé par une centrifugeuse à une vitesse hypersonique, réduisant ainsi d’un facteur 10 à 20 les coûts de lancement en comparaison à un lanceur traditionnel. Avec des essais suborbitaux fructueux depuis octobre 2021, l’entreprise souhaite réaliser un premier vol orbital en 2025 et développe également des structures satellitaires.

ULA commande 116 moteurs à Aerojet Rocketdyne pour son lanceur Vulcan Centaur

Space News, 11 avril 2022
Aerojet Rocketdyne a annoncé cette commande quelques jours après le contrat signé entre Amazon et ULA pour l’achat de 38 lancements Vulcan Centaur afin de déployer sa constellation Kuiper. Avec un premier vol prévu d’ici la fin de l’année, ULA devra augmenter rapidement la production de ses lanceurs avec un point d’attention sur les pièces critiques comme le propulseur RL10C-X développé par Aerojet Rocketdyne pour son second étage. Cette commande assure ainsi la production de 58 lanceurs Vulcan Centaur avec pour objectif 25 lancements par an. Pour mémoire, ces moteurs sont hérités du modèle RL10 utilisé pour le second étage de l’Atlas 5 et du Delta Heavy. La production des moteurs sera réalisée depuis l’usine d’Aerojet située en Floride avec un recours plus important à la fabrication additive et des performances améliorées (impulsion spécifique de 461 s). Pour mémoire, le premier étage du Vulcan Centaur est quant à lui propulsé par deux moteurs BE-4 développés par Blue Origin.

Constellations

SpaceX maintient sa cadence de lancements Starlink et se prépare à offrir un service de connectivité en vol

Space Flight Insider, 21 avril 2022 
Space News, 22 avril 2022           
Le 21 avril, SpaceX a lancé 53 nouveaux satellites Starlink depuis le Space Launch Complex 40 (SLC-40) de la Cape Canaveral Space Force Station (Floride). Utilisé pour la 12ème fois, le premier étage du Falcon 9 a été récupéré par le « bateau-drone » au large de l’Atlantique. Avec ce nouveau lancement, SpaceX maintient une cadence élevée et totalise 2 386 satellites Starlink lancés dont 2 121 encore opérationnels :

  • Version v0.9 : 60 satellites lancés dont 56 désorbités
  • Version v1.0 : 1 678 satellites lancés dont 134 désorbités
  • Version v1.5 : 648 satellites lancés dont 46 désorbités

À noter que la compagnie aérienne américaine de jets privés JSX a annoncé le 21 avril un partenariat avec Starlink pour offrir d’ici la fin de l’année à ses clients un service de connectivité à bord de ses avions. La compagnie Delta Air Lines a également indiqué mener des essais avec Starlink sur ses appareils. Cette annonce a d’ailleurs suscité des inquiétudes sur le marché notamment pour Viasat et Gogo (dont les activités sur l’aviation commerciale ont été rachetées par Intelsat en décembre 2020) historiquement associées à la compagnie qui propose déjà un service de connectivité sur plus de la moitié de ses vols domestiques.

Astra signe un contrat avec LeoStella pour la fourniture de propulseurs électriques

Space News, 12 avril 2022           
Astra devrait réaliser les premières livraisons au constructeur de satellites d’ici la fin de l’année. Pour mémoire, les moteurs sont hérités du rachat par Astra d’Apollo Fusion en juin 2021 dans le cadre sa stratégie de développement d’une approche verticalement intégrée. Avec une poussée de 18 à 25 mN, les moteurs auront recours au xénon ou krypton pour une puissance de 400 W.
À court terme, l’entreprise continue le développement de son lanceur Astra 3.3, notamment en préparation des trois lancements au profit de la NASA pour déployer la constellation de six smallsats d’observation de la Terre TROPICS (Time-Resolved Observations of Precipitation structure and storm Intensity with a Constellation of Smallsats). Elle espère atteindre d’ici la fin de l’année la cadence d’un lancement par mois et développe une version 4.0 de son lanceur. Produit depuis son usine récemment inaugurée à Alameda (Californie), elle espère réaliser des premiers tests cette année.

Télécommunications

La NASA souhaite se tourner vers des contrats de services pour remplacer son système de communication de satellites relais

Space News, 21 avril 2022
La NASA a annoncé le 20 avril dernier l’attribution de plusieurs contrats dits « Communications Services Project (CSP) » à diverses entreprises de télécommunications pour prendre le relai de son Tracking and Data Relay Satellite (TDRS). Celui-ci, en orbite depuis les années 1980, permet à la NASA de communiquer avec plusieurs de ses missions spatiales. Si celui-ci continuera de faire le lien avec les missions en cours, la NASA souhaite passer sur un modèle de contrat de service pour ses futures missions. Elle a donc octroyé près de 280 M$ aux entreprises suivantes pour tester leurs capacités :

  • SpaceX et Amazon remportent respectivement 69,95 M$ et 67 M$ pour démontrer les capacités de leur constellation LEO
  • Viasat et Inmarsat remportent respectivement 53,3 M$ et 28,6 M$ pour démonter les capacités de leurs satellites GEO
  • Telesat U.S. Services et SES Government Solutions remportent respectivement 30,65 M$ et 28,96 M$ pour démontrer les capacités d’un réseau multi-orbites LEO, MEO, GEO

Ces démonstrations devraient s’étendre sur 5 ans et représenter, en totalité un montant de 1,5 Md$. L’objectif fixé par l’Agence est de pouvoir transiter vers ces solutions commerciales à horizon 2030 tout en décommissionant progressivement son réseau TDRS.

Station spatiale internationale et vol habité en orbite basse

Reports du retour d’Axiom-1 et du décollage de Crew-4

Space News, Parabolic Arc, 20 avril 2022
La mission touristique Axiom-1, arrivée à bord de la Station spatiale internationale le 9 avril pour une durée initiale de 8 jours, a pu profiter de quelques jours supplémentaires à bord de la Station. En effet, leur retour sur Terre a été décalé à deux reprises pour des raisons de conditions météorologiques et maritimes. Leur départ est désormais fixé au samedi 23 avril. Ce report a également pour effet de retarder le lancement de la mission Crew-4 dont la première fenêtre de tir est désormais prévue pour le mardi 26 avril.

Tourisme spatial 

Reports du retour d’Axiom-1 et du décollage de Crew-4

Cf. Station spatiale internationale et Vol habité en orbite basse

Services en orbite

La Maison Blanche publie une stratégie pour favoriser les activités de services en orbite

Space News, 13 avril 2022
Publiée le 4 avril dernier par l’Office of Science and Technology Policy (OSTP) avec le support de diverses entités comme la NASA, l’U.S. Air Force (USAF), l’U.S Space Force (USSF), la Federal Aviation Administration (FAA) ou encore la Federal Communications Commission (FCC), cette stratégie identifie plusieurs axes de travail visant à consolider l’industrie des services en orbite. Parmi ces axes, le document prévoit notamment que l’administration soutienne les activités de R&D en matière de services en orbite, définisse ses besoins afin de créer les conditions d’un véritable marché pour les entreprises engagées dans le domaine, fasse évoluer sa réglementation pour offrir à ces dernières plus de sécurité juridique, ou encore favorise la coopération internationale et notamment l’adoption de standards, bonnes pratiques et normes internationales. La prochaine étape consiste désormais, selon la Directrice adjointe pour la politique spatiale à l’OSTP, à accompagner cette stratégie d’un véritable plan de mise en œuvre tenant compte des observations des industriels du secteur.

L’U.S. Space Force souhaite réaliser une démonstration de ravitaillement en orbite géostationnaire en 2025

Space News, 13 avril 2022           
L’U.S. Space Force (USSF) a annoncé une mission de démonstration, Tetra-5, pour tester des capacités de ravitaillement en orbite géostationnaire. La mission, évaluée à 50 M$, est composée de trois petits satellites augmentés de capteurs pour des opérations de proximité et d’une interface de docking afin de s’amarrer à un satellite ravitailleur. Le Space Enterprise Consortium de l’USSF doit désormais sélectionner un maître d’œuvre qui sera responsable de la construction des trois satellites et pourra choisir l’interface de docking entre celle développée par Orbit Fab (RAFTI) et celle de Space Logistics, filiale de Northrop Grumman. Avec cette démonstration, l’USSF souhaite ainsi étendre la durée de vie de ses satellites en orbite géostationnaire notamment dans le cadre de missions critiques et coûteuses. Elle espère également réduire le coût des futures missions avec des réservoirs plus petits et gagner en flexibilité avec des manœuvres plus fréquentes. Si plusieurs contrats ont déjà été signés avec Orbit Fab et Space Logistics, l’USSF intensifie son soutien au secteur commercial et espère faire émerger des standards technologiques. À noter que la Defense Innovation Unit (DIU), en charge de la promotion et du développement de nouvelles technologies commerciales, s’intéresse également à des capacités de ravitaillement en orbite avec un récent appel d’offres au secteur privé.

Exotrail lancera son premier remorqueur sur une mission rideshare de SpaceX

Via Satellite, 12 avril 2022           
La startup française a annoncé le développement du SpaceVan, remorqueur à destination des opérateurs de constellations permettant le déploiement de nanosatellites sur différents plans orbitaux, altitudes et inclinaisons. Utilisant son système de propulsion électrique ExoMG, Exotrail embarquera son premier remorqueur en octobre 2023 sur une mission rideshare Falcon 9 avec une capacité d’emport de 400 kg. D’autres missions devraient être réalisées en 2024 sur d’autres lanceurs.

Axiom Space s’exporte au Japon et fonde une joint-venture avec Mitsui & Co.

Via Satellite, 11 avril 2022
Les deux entreprises souhaitent ainsi développer l’offre de services en orbite pour des clients commerciaux et gouvernementaux après la signature d’un partenariat stratégique en septembre dernier. La société d’investissements Mitsui espère renforcer ses activités dans le spatial après avoir acquis Spaceflight Inc. en 2020. Elle a également été sélectionnée par l’Agence spatiale japonaise (JAXA) pour déployer des cubesats depuis le module japonais KIBO de la Station spatiale internationale (ISS). Axiom souhaite quant à elle profiter des activités de Mitsui dans différents secteurs industriels pour accélérer la recherche en orbite ou encore le développement de services en orbite.

Navigation et Positionnement

Le satellite de navigation géostationnaire NTS-3 de l’USAF sera lancé en 2023

Space News, 9 avril 2022
Le Navigation Technology Satellite-3 (NTS-3) est un satellite expérimental géostationnaire financé par l’Air Force Research Laboratory (AFRL) et développé par L3 Harris. Il a pour objectif de démontrer l’intérêt de l’orbite gestionnaire pour améliorer les capacités et la résilience du système GPS qui repose actuellement sur des satellites en orbite moyenne. Prévu initialement au lancement en 2022, il est finalement prévu qu’il prenne part à la mission USSF-106 programmée pour 2023 et qui sera la première mission de sécurité nationale à voler sur une Vulcan Centaur d’ULA.
Article connexe publié précédemment : Bulletin d’actualité Espace n°20-03

Lancements à venir

Date Mission Client Orbite Lanceur Entreprise Site
26 avril Crew-4 NASA LEO Falcon 9
Block 5
SpaceX Cap Caveral (Floride)
30 avril Nilesat 301 Egypte GEO Falcon 9
Block 5
SpaceX Cap Caveral (Floride)

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