Bulletin d’actualité rédigé par le Bureau du CNES et Service Spatial de l’Ambassade de France à Washington D.C.
(Nicolas Maubert, Diane Zajackowski, Samuel Mamou)
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L’essentiel de la quinzaine spatiale
L’actualité spatiale des dernières semaines a été marquée par une intense activité au départ et à destination de la Station spatiale internationale (ISS), avec le retour de la première mission touristique d’Axiom Space (Axiom-1) le 25 avril, l’arrivée de l’équipage Crew-4 le 27 avril et l’amerrissage de la mission Crew-3 le 6 mai. Il est intéressant de constater que l’ensemble de ces missions ont été conduites grâce à la capsule Dragon de SpaceX, qui témoigne donc sa maturité dans le transport d’astronautes. L’expertise et l’avance acquises par SpaceX constituent un défi de taille pour son rival Boeing qui s’apprête à mener le second vol d’essai sans équipage de sa capsule Starliner le 19 mai prochain, deux ans après l’échec d’un vol de test similaire. Toujours côté ISS, la société Axiom Space a vendu aux Émirats Arabes Unis un siège sur la mission Crew-6, permettant à ce pays d’être la première nation non-partenaire de l’ISS à effectuer un séjour long à bord de celle-ci. Ce contrat permet à Axiom Space de compenser le siège Soyouz qu’elle avait offert à la NASA pour permettre à un astronaute américain de voler sur la capsule russe en l’absence d’accord entre États-Unis et Russie sur l’acheminement d’astronautes et cosmonautes vers l’ISS. Un nouvel accord, prévoyant l’échange de sièges Soyouz et Dragon, est toujours en cours de négociation entre Moscou et Washington qui espère obtenir une signature à horizon du mois de juin prochain malgré les tensions liées au conflit en Ukraine. Le mois de juin pourrait également être marqué par la reprise du test de remplissage sans allumage du Space Launch System (SLS) qui avait été interrompu le 26 avril dernier suite à l’apparition de plusieurs anomalies techniques. Avec ce nouveau calendrier, la NASA envisage un lancement de la mission Artemis-1 au plus tôt au début du mois d’août prochain.
Côté industrie, notons que la société américano-néo-zélandaise Rocket Lab a manqué de peu la récupération complète du premier étage de son micro-lanceur Electron par son hélicoptère Sikorsky S-92. Celui-ci est parvenu à saisir le parachute du booster avant de le relâcher pour des raisons en cours d’analyse par l’entreprise. De son côté, SpaceX est parvenue pour la troisième fois à réutiliser un même booster 12 fois à l’occasion de son dernier lancement Starlink, qui compte désormais plus de 2 400 satellites en orbite. L’augmentation du nombre de satellites en orbite rend toujours plus prégnante la question de la connaissance de l’environnement spatial (SSA) et celle de la gestion du trafic en orbite (STM). Sur ce point, la communauté spatiale s’est ainsi réjouie de la récente nomination de Richard DalBello à la tête de l’Office of Space Commerce (OSC) dont la tutelle a en outre été déplacée du NESDIS à la NOAA. Cette nomination et ce changement de tutelle permettront très probablement à l’OSC de progresser dans la mise en place de sa plateforme de données SSA à destination des opérateurs spatiaux civils et commerciaux.
Personalia
L’Office of Space Commerce s’extrait de la tutelle du NESDIS et se voit doté d’un nouveau directeur
Space News, Space Policy Online, 7 avril 2022
A l’occasion d’une audition devant le Comité du Sénat sur le Commerce, la Science et les Transports, la Secrétaire au Commerce Gina Raimondo a indiqué que l’Office of Space Commerce (OSC) serait désormais placé directement sous l’égide du siège de la NOAA, et non plus seulement sous la tutelle du NESDIS. Cette opération devrait permettre à l’OSC de bénéficier de plus de visibilité, bien qu’il n’ait pas été placé directement sous l’autorité de la Secrétaire au Commerce comme l’avaient souhaité certains membres de l’ancienne administration et du Congrès. Outre cette annonce, la Secrétaire au Commerce a également désigné Richard DalBello pour endosser le rôle de Directeur pour l’OSC. Ce dernier succède donc à Kevin O’Connell plus d’un an après le changement d’administration.
Avant d’être nommé à ce poste, Richard DalBello a travaillé pendant trente ans dans le spatial, aussi bien au sein de l’administration que de l’industrie. Côté institutionnel, ce dernier a notamment travaillé par deux fois au sein de l’Office of Science and Technology (OSTP), dont une fois en tant que Directeur pour les affaires aéronautiques et spatiales. Plus tôt dans sa carrière, il avait également travaillé pour la NASA et l’Office of Space Commercialization, ancêtre de l’actuel OSC. Côté industrie, Richard DalBello a notamment été Vice President of global engagement pour Virgin Galactic (son dernier poste avant sa nomination à l’OSC), mais aussi Président de la Satellite Industry Association, ou encore Vice President, Legal and Government Affairs chez Intelsat. Dans le cadre de ses fonctions chez Intelsat, Richard DalBello est notamment connu pour avoir contribué à la création de la Space Data Association, une initiative regroupant Intelsat, Inmarsat et SES afin de partager publiquement les données de localisation de leurs constellations. Notons que cette initiative ressemble fortement à l’un des projets dont l’OSC a la responsabilité depuis la publication de la Space Policy Directive-3 (SPD-3) en 2018. Celui-ci est effectivement en train de mettre au point une plateforme visant à offrir aux opérateurs spatiaux civils et commerciaux des données et services de connaissance de l’environnement spatial (SSA). Une version prototype de cette plateforme a été dévoilée en février dernier et devrait être enrichie suite à la publication d’une request for information.
Frank Calvelli confirmé par le Sénat pour superviser la politique d’acquisition des systèmes spatiaux militaires
Xplore Press Release, 12 mai 2021
Cette confirmation intervient plusieurs mois après la nomination en décembre 2021 de Frank Calvelli par le Président Joe Biden. Pour mémoire, Frank Calvelli occupera le poste de Secrétaire adjoint des Forces aériennes pour les acquisitions spatiales, un poste civil indépendant du Space Systems Command (SSC), bureau de l’U.S. Space Force (USSF) dédiée à la politique d’achats.
Politique et Relations internationales
Les États-Unis et la Corée du Sud renforcent leur coopération spatiale militaire
Space News, 26 avril 2022
Le 25 avril dernier, la Corée du Sud et les États-Unis ont signé un accord de coopération spatiale militaire dans le cadre du dernier Space Cooperation Working Group (SCWG) mis en place entre les deux pays. Cet accord prévoit notamment une collaboration entre Washington et Séoul en matière de connaissance de l’environnement spatial, mais aussi de formations et d’entrainement, ou encore d’interopérabilité des opérations. La coopération entre les États-Unis et la Corée du Sud dans le domaine du spatial de défense n’est pas nouvelle. Le SCWG, qui sert d’organe consultatif entre les deux pays sur la sécurité spatiale, est opérationnel depuis 2013. En août dernier, le Chef d’état-major de l’Armée de l’air sud-coréenne et le Chef des opérations spatiales de l’U.S. Space Force (USSF), avaient signé un Memorandum of Understanding prévoyant la création d’un organe consultatif conjoint sur les questions de politique spatiale à la Peterson Air Force Base de Colorado Springs (Colorado).
Le Sénat confirme sa volonté de sélectionner deux alunisseurs pour le programme Artemis
Économie spatiale
La NASA attribue près de 95 M$ à 110 PME dans le cadre du programme SBIR
Parabolic Arc, Satellite Today, 29 avril 2022
Ce financement intervient dans le cadre de la Phase II du programme, au cours de laquelle les entreprises choisies auront deux ans pour développer, démontrer et livrer leurs technologies à la NASA. Les entreprises sélectionnées par la NASA dans le cadre de cette nouvelle phase couvrent un large éventail d’activités, comme le développement d’antennes de télécommunications ou encore celui de panneaux solaires pour soutenir les activités d’exploration lunaire.
Adranos lève 20 M$ dans le cadre d’une levée de fonds de série A
Space News, 26 avril 2022
La startup basée à Denver dans le Colorado, est spécialisée dans la production de moteur de fusées et missiles à propergols solides. Elle fait partie, avec Northrop Grumman et Aerojet Rocketdyne, des rares entreprises américaines présentes sur ce segment d’activité. Adranos souhaite donc devenir un nouvel acteur incontournable sur les marchés de la défense et du spatial, et voit notamment dans les opérateurs de petits lanceurs un marché prometteur.
Sécurité et Défense
L’U.S. Space Force pourrait sélectionner de nouveaux opérateurs de lancements dans le cadre de son programme NSSL
Space News, 28 avril 2022
Pour mémoire, l’U.S. Space Force (USSF) avait choisi d’attribué, en août 2020, la totalité de ses lancements de sécurité nationale à ULA et SpaceX entre 2022 et 2027 (à raison de 60% pour la première et 40% pour la seconde) dans le cadre de la Phase 2 de son programme National Security Space Launch (NSSL).
A l’occasion d’une audition organisée le 27 avril devant le Comité des Forces armées de la Chambre des Représentants, le Chef des opérations spatiales de l’USSF, le Général John Raymond, a toutefois laissé entendre que de nouveaux opérateurs de lancement pourraient être intégrés dans le programme à compter de 2024 pour la Phase 3 de ce dernier. Outre l’instauration d’une plus grande compétition, cette nouvelle phase pourrait être caractérisée par l’achat de nouveaux types de services au-delà des seuls services de lancements traditionnels, comme par exemple les services de transports en orbite.
Le Département de la Défense a estimé à 10 Md$ le budget de ses lancements spatiaux sur les cinq prochaines années, avec 35 missions projetées entre 2023 et 2027.
L’U.S. Space Force souhaite investir plusieurs milliards de dollars pour consolider son architecture de communications classifiées
Space News, 1er mai 2021
L’U.S. Space Force (USSF) prévoit de solliciter près de 8 Md$ sur cinq ans pour développer deux projets de constellations de communications classifiées en orbite géostationnaire :
- 5 Md$ pour le programme Evolved Strategic Satcom (ESS) dédié aux communications stratégiques, notamment au profit des forces nucléaires. Pour l’heure, le programme met en compétition plusieurs entreprises – Boeing, Lockeed Martin et Nothrop Grumman – afin de permettre à l’USSF de s’assurer une diversité de fournisseurs. Les trois entreprises sont appelées à soumettre leur prototype d’ici 2025, date à laquelle de nouveaux contrats seront attribués.
- 3 Md$ pour le programme Protected Tactical Satcom (PTS) dédié aux communications tactiques. Pour l’heure, Boeing et Northrop Grumman ont été sélectionnées pour développer des prototypes PTS prévues au lancement en 2024 pour des démonstrations en orbite. Boeing a également été désignée maître d’œuvre pour concevoir le système sol Protected Tactical Enterprise Service (PTES).
Pour mémoire, ces deux programmes ont vocation à renforcer les capacités du système Advanced Extremely High Frequency (AEHF) actuel.
L’U.S Space Force sélectionne 125 consortia d’entreprises pour imaginer des concepts de services en orbite
Space News, 2 mai 2022
Cette décision a été prise dans le cadre d’Orbital Prime, un programme STTR (Small Business Technology Transfer) lancé en novembre 2021 par l’U.S. Space Force (USSF) pour faire la démonstration de technologies dites « OSAM » (« on-orbit servicing, assembly and manufacturing »). Les 125 groupements d’entreprises et instituts de recherche choisis bénéficieront chacun de 250 k$ pour proposer leurs concepts missions et projets de conception sur une période de 5 mois. Les équipes qui seront sélectionnées pour la suite du processus recevront jusqu’à 1,5 M$ pour développer une version prototype de leur technologie.
L’U.S. Space Force partage ses premières données SSA sur sa plateforme cloud Unified Data Library
Space News, 22 avril 2022
La Unified Data Library (UDL) est une plateforme développée par la société Bluestaq sous l’autorité de l’U.S. Space Force (USSF) afin de rassembler et partager diverses sources de données de connaissance de l’environnement spatial indépendamment de leur niveau de classification. Jusqu’à présent, l’UDL était uniquement alimenté par des données d’origine civile ou commerciale. Le 22 avril, l’USSF a toutefois indiqué que les données collectées par sa Space Fence – un système de radars dédié à la surveillance de l’orbite basse – avait été intégrées au sein de son catalogue. Il s’agit donc des premières données d’origine militaire à être mise à disposition des 3 500 utilisateurs de l’UDL. Ceux-ci comprennent majoritairement des acteurs institutionnels américains, mais des discussions sont en cours pour ouvrir l’UDL à des partenaires étrangers afin de permettre le partage d’informations.
La DARPA poursuit ses efforts dans le domaine de la propulsion nucléaire
Space News, 4 mai 2022
Le 4 mai dernier, la Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA) a publié un nouvel appel d’offres dans le cadre de son programme Demonstration Rocket for Agile Cislunar Operations (DRACO) qui vise à faire la démonstration d’un moteur nucléaire thermique en orbite cis-lunaire.
L’année dernière, l’agence avait accordé, dans le cadre de la Phase 1 de ce programme, un contrat à la société General Atomics pour développer des concepts préliminaires de moteurs à propulsion nucléaire.
Elle avait également sélectionné les entreprises Blue Origin et Lockheed Martin pour concevoir un vaisseau spatial capable d’accueillir de tels systèmes de propulsion.
Le nouvel appel d’offres de la DARPA concerne désormais les Phases 2 et 3 du programme. Celles-ci devront permettre le développement, la production et l’assemblage de ce moteur nucléaire thermique en vue de mener une démonstration en orbite à horizon 2026. Cet appel d’offres sera ouvert à la concurrence et permettra à la DARPA de sélectionner des entreprises n’ayant pas nécessairement participé à la Phase 1.
Les États-Unis et la Corée du Sud renforcent leur coopération spatiale militaire
Cf. Politique et Relations internationales
Frank Calvelli confirmé par le Sénat pour superviser la politique d’acquisition des systèmes spatiaux militaires
Cf. Personalia
Connaissance de l’environnement spatial
L’Office of Space Commerce s’extrait de la tutelle du NESDIS et se voit doté d’un nouveau directeur
Cf. Personalia
Observation de la Terre
La société Planet rejoint le programme Third Party Mission de l’ESA
Parabolic Arc, 25 avril 2022
Le programme Third Party Mission permet à l’ESA de recueillir des données issues de satellites opérés par diverses entités tierces, publiques ou privées. L’Agence compte à ce jour 50 missions dans le cadre de ce programme. En avril dernier, l’ESA a conclu un accord avec la société d’imagerie américaine Planet afin que celle-ci rejoigne le cercle des Third Party Missions et puisse distribuer ses données d’imagerie de haute résolution pour des applications non-commerciales dans le cadre du programme Earthnet. Celui-ci complète les missions d’observation de la Terre de l’ESA en offrant aux scientifiques européens un accès cohérent aux données des Third Party Mission via des interfaces standardisées.
Avec cet accord, la société américaine vient donc approfondir ses liens déjà étroits avec le continent européen. Celle-ci possède effectivement plusieurs stations sol ainsi qu’un centre de contrôle mission en Europe et y développe une partie de ses composants. Elle contribue également au programme Copernicus de l’Union européenne.
Exploration habitée
Artemis-1 : le SLS devrait subir de nouveaux tests en juin avant un lancement en août au plus tôt
Space Policy Online, 5 mai 2022
Space News, 6 mai 2022
Suite à trois reports dus à l’apparition d’anomalies au niveau du lanceur, de sa plateforme de lancement mobile et de son pas de tir, la NASA avait pris la décision de suspendre le test de remplissage sans allumage (wet dress rehearsal) du Space Launch System (SLS) et de ramener ce dernier au sein du Vehicle Assembly Building (VAB). Dans un briefing en date du 5 mai, la NASA a annoncé que des progrès avaient été accomplis dans la réparation des dysfonctionnements détectés, laissant envisager un retour du SLS sur son pas de tir d’ici la fin du mois de mai et une reprise du wet dress rehearsal à horizon du début ou de la moitié du mois de juin. L’Administrateur associé pour les systèmes d’exploration, Jim Free, a laissé entendre que plusieurs tentatives pourraient être nécessaires à la NASA pour conduire son test de remplissage. Une fois ce dernier accompli, le lanceur devra de nouveau être ramené au sein du VAB avant son lancement effectif sur le pas de tir Launch Complex 39B. A ce jour, la première fenêtre de tir envisagée s’étend du 26 juillet au 9 août, bien que la NASA ait indiqué ne considérer que la seconde partie de cette fenêtre, début août. A noter que le lancement de la mission Artemis-1 devra être coordonné avec d’autres lancements, comme celui de la mission Psyché à destination de l’astéroïde du même nom et dont le lancement par un Falcon Heavy est prévu début août sur une très courte fenêtre de tir.
Le Sénat confirme sa volonté de sélectionner deux alunisseurs pour le programme Artemis
Space News, Space Policy Online, 5 mai 2022
Le 8 juin 2021, le Sénat avait adopté en séance plénière son projet de loi d’autorisation de la NASA dans le cadre du U.S. Innovation and Competitiveness Act (USICA). Ce projet de loi d’autorisation contenait, entre autres, une disposition exigeant de la NASA qu’elle sélectionne deux fournisseurs d’alunissage au titre de son programme Artemis. Pour soutenir cet effort de mise en concurrence, les sénateurs s’étaient par ailleurs accordés pour que 10 Md$ soient alloués au programme Human Landing System (HLS) sur les cinq prochaines années.
Le 4 mai dernier, le Sénat a eu l’occasion de réaffirmer son soutien à cette solution à deux alunisseurs dans le cadre de discussions anticipant les négociations à venir avec la Chambre des Représentants au sujet de l’USICA. Les Sénateurs ont effectivement rejeté la proposition faite par le Sénateur Bernie Sanders (I-Vt) de ne conserver qu’un seul alunisseur. Celui-ci estimait que la solution à deux alunisseurs revenait à favoriser les entreprises des deux hommes les plus fortunés de la planète : Elon Musk et Jeff Bezos. La majorité des Sénateurs présents ont toutefois rappelé l’importance pour les États-Unis de bénéficier de résilience et de redondance dans le cadre du programme HLS et ont voté majoritairement (à 78 contre 17) pour maintenir la compétition entre deux fournisseurs.
Des négociations doivent désormais être entamées entre le Sénat et la Chambre au sujet du texte USICA. La Chambre, qui avait adopté un projet équivalent, n’y avait toutefois pas incorporé de dispositions relatives à la NASA. Pour mémoire, la dernière loi d’autorisation de la NASA remonte à 2017.
Sciences de l’Univers
La NASA et le DLR mettent fin au programme SOFIA
Space News, Parabolic Arc, 29 avril 2022
Les deux agences ont décidé de cesser les opérations du télescope aéroporté SOFIA (Stratospheric Observatory for Infrared Astronomy) le 30 septembre prochain. Cette décision fait notamment suite à la publication du Decal Survey d’Astrophysique dans lequel l’Académie des sciences américaine avait estimé que les apports scientifiques du télescope n’étaient pas suffisants pour justifier le coût de son maintien en opération. Ce choix s’inscrit également dans le sillage de plusieurs demandes formulées en ce sens par la NASA, et toutes ignorées par le Congrès. L’accord trouvé avec le DLR devrait toutefois permettre de débloquer la situation et de cesser le financement de ce programme par le Congrès.
À noter que l’arrêt du programme SOFIA ne traduit pas un affaiblissement de la coopération entre l’Allemagne et les États-Unis qui prévoient de conduire un atelier conjoint cet été pour identifier de nouveaux projets de coopération scientifique.
Lanceurs et Spatioports
Rocket Lab se rapproche d’une récupération effective de son premier étage
Space News, 2 mai 2022
Le 2 mai dernier, la société américano-néo-zélandaise Rocket Lab a procédé avec succès au lancement de 34 satellites par son micro-lanceur Electron depuis son Launch Complex 1 situé en Nouvelle-Zélande. Ce lancement a été suivi de la première tentative de récupération par hélicoptère de son premier étage. Environ quinze minutes après le décollage du lanceur, le premier étage est entré dans le champ de vision de l’hélicoptère Rocket Lab’s Sikorsky S-92 qui est parvenu à agripper son parachute à l’aide d’un crochet. Néanmoins, quelques minutes plus tard, le pilote de l’hélicoptère a été contraint, pour des raisons encore étudiées par l’entreprise, de relâcher le booster qui a finalement été récupéré par bateau à l’instar des trois précédents lancements de l’entreprise. Rocket Lab s’est toutefois félicitée de ce succès et a indiqué souhaiter étudier les circonstances de ce premier essai pour parvenir à une récupération complète de son premier étage lors d’un prochain test dont la date n’est pas encore fixée.
Malgré cet échec relatif, Rocket Lab est parvenue à déployer avec succès ses 34 charges utiles à une altitude de 520 km. Parmi les satellites clients à bord, figuraient 24 satellites Spacebee de l’entreprise américaine Swarm Technologies, trois satellites prototypes de la société E-Space, quatre smallsat d’Alba Orbital, le satellite BRO-6 de la française Unseenlabs, ou encore un démonstrateur de technologie d’élimination de débris de la société Aurora Propulsion Technologies.
A quelques mois du lancement de son Vigoride, Momentus obtient sa licence FCC
Satellite Today, Parabolic Arc, 29 avril 2022
Le 29 avril dernier, la société Momentus a annoncé avoir reçu de la Federal Communications Commission (FCC) une licence l’autorisant à utiliser des fréquences radioélectriques pour communiquer avec son véhicule de transfert orbital Vigoride dont le premier vol est prévu dans le cadre de la mission rideshare Transporter-5 de SpaceX.
Après deux opportunités de vol manqués pour des raisons de sécurité nationale, l’obtention de cette licence est une bonne nouvelle pour l’entreprise. Celle-ci n’est toutefois pas suffisante puisque Momentus doit encore recevoir une autorisation de la part de la Federal Aviation Administration (FAA) pour permettre le lancement de son Vigoride. S’il est validé, ce lancement devrait non seulement permettre à Momentus de déployer plusieurs satellites en orbite, mais aussi et avant tout de tester les capacités de son véhicule de transfert.
Constellations
SpaceX poursuit le déploiement de sa constellation et remporte un contrat pour déployer celle de Satellogic
Space News, 25 avril [1] et 4 mai [2] 2022
Space.com, 6 mai 2022
Le 6 mai, SpaceX a lancé 53 nouveaux satellites Starlink depuis Space Launch Complex 39A (SLC-39A) du Kennedy Space Center (Floride). Récupéré avec succès par le « bateau-drone » au large de l’Atlantique, le premier étage du Falcon est le troisième à avoir été réutilisé 12 fois, permettant à SpaceX d’égaler une nouvelle fois son propre record.
Depuis le début du déploiement de la constellation Starlink en 2019, SpaceX atteint avec ce nouveau lancement un total de 45 lancements dédiés à sa constellation. Sur l’année 2022, ce lancement était d’ailleurs le 10ème consacré à Starlink sur un total de 18 lancements opérés par SpaceX.
A ce jour, l’entreprise totalise 2 439 satellites Starlink lancés, dont 2 164 encore opérationnels :
- Version v0.9 : 60 satellites lancés dont 56 désorbités
- Version v1.0 : 1 678 satellites lancés dont 142 désorbités
- Version v1.5 : 701 satellites lancés dont 46 désorbités
Le déploiement de la constellation s’accompagne de la signature de nouveaux contrats par SpaceX. En effet, quelques semaines après la conclusion de son premier contrat de connectivité en vol avec la société de jets privés JSX, SpaceX a signé partenariat avec la compagnie aérienne Hawaiian Airlines, faisant de celle-ci la première compagnie grand public à offrir des services Starlink à son bord. Hawaiian Airlines prévoit de commencer à installer ses terminaux Starlink à compter de l’an prochain, à l’issue de leur certification par SpaceX.
Outre le déploiement de sa propre constellation, SpaceX s’apprête à contribuer au lancement de la constellation d’imagerie de la société argentine Satellogic. Les deux sociétés ont effectivement signé un contrat le 4 mai dernier pour le lancement de 68 satellites à partir de 2023. Ce n’est pas la première fois que Satellogic a recours aux services de SpaceX puisque celle-ci était déjà présente sur les missions rideshare Transporter-2 et 4 de l’opérateur de lancement.
Capella Space lève 97 M$ en série C
Space News, 25 avril 2022
Avec ce nouveau tour de table, l’entreprise de San Francisco a ainsi levé plus de 190 M$ depuis sa création en 2016. Ce financement lui permettra de consolider ses activités alors que son chiffre d’affaires a doublé en un an et que l’intérêt porté aux données d’imagerie SAR a été renforcé par la guerre en Ukraine. Capella espère désormais agrandir sa constellation de 7 satellites et développe actuellement une nouvelle génération de satellites. Si la collecte de données reste son activité principale, Capella souhaite également diversifier ses capacités d’analyse de données avec notamment le lancement récent de nouveaux outils d’automatisation. Avec déjà 160 employés, cette levée de fond devrait également permettre d’agrandir ses effectifs.
Télécommunications
AST SpaceMobile obtient une licence expérimentale de la FCC
Satellite Today, 28 avril 2022
Space News, 3 mai 2022
Le 2 mai dernier, la Federal Communications Commission (FCC) a attribué à l’opérateur AST SpaceMobile une licence expérimentale lui permettant de tester, à raison de 5 minutes par jour, les capacités de son satellite BlueWalker 3. Prévu au lancement cet été à bord d’un Falcon 9 de SpaceX, BlueWalker 3 est une version réduite et prototype des satellites BlueBird qui composeront la constellation de connectivité cellulaire que l’entreprise souhaite déployer à partir de 2023. Grâce à la licence octroyée par la FCC, BlueWalker 3 permettra notamment à AST SpaceMobile de configurer son architecture et d’étudier les services qu’elle sera en mesure d’offrir à ses clients. À noter que cette licence n’est qu’une première étape et que la société devra encore obtenir de nombreuses autorisations pour fournir un service opérationnel aux États-Unis comme dans le reste du monde. En attendant, AST SpaceMobile continue de conclure des partenariats avec divers opérateurs mobiles terrestres afin qu’ils offrent à leurs clients ses propres services une fois ceux-ci opérationnels. Dernièrement, la société a ainsi conclu un Memoramdum of Understanding avec l’opérateur philippin Globe Telecom qui permettrait à AST de toucher un marché de près de 87 millions d’utilisateurs.
Station spatiale internationale et Vol habité en orbite basse
Chassé-croisé sur la route de la Station spatiale internationale
Space News, 25 [1], 26 [2], 27 [3], 28 [4] avril et 6 mai [5] 2022
Plusieurs allers et venues ont rythmé l’agenda de l’ISS ces dernières semaines. Fait notoire, celle-ci ont toutes été opérées par SpaceX pour le compte de la NASA ou de la société de tourisme spatial Axiom Space, attestant la maturité acquise par SpaceX dans le transport d’astronautes vers et depuis l’ISS.
Après un séjour de 17 jours à bord de la station, l’équipage de la mission touristique Axiom-1 a amerri au large des côtes de Floride le 25 avril dernier. De mauvaises conditions météorologiques en mer avaient eu pour effet de décaler ce retour, prévu initialement huit jours après leur arrivée sur l’ISS le 8 avril. Notons que de telles circonstances de retard avaient été prévues dans le cadre du contrat conclu entre la NASA et Axiom Space, permettant à cette dernière de ne pas payer de frais supplémentaires.
Le retour de la mission Axiom-1 a été suivi, moins de deux jours plus tard, par le lancement de la mission Crew-4. Emportant trois astronautes de la NASA et une spationaute de l’ESA, cette mission a été lancée le 27 avril à 3h52 EST depuis le Kennedy Space Center (Floride) sur un Falcon 9 dont le premier étage avait déjà volé trois fois. L’équipage de Crew-4 s’est amarré à la Station moins de 16h après leur lancement, et sera présent à bord jusqu’au mois de septembre. L’arrivée de Crew-4 a signé le retour de la mission Crew-3 dont l’équipage est revenu sur Terre le 6 mai à 00h43 EST après plus de six mois passés dans l’ISS.
Le calendrier de l’ISS ne devrait pas se désemplir dans les mois à venir. Les missions Crew-5 et MS-22 sont ainsi prévues pour le mois de septembre prochain, avec un possible échange de sièges Soyouz/Dragon. Pour mémoire, la NASA et Roscosmos négocient depuis plusieurs mois un accord permettant de tels échanges dans le but d’assurer une présence continue d’astronautes américains et cosmonautes russes à bord de l’ISS. Celui-ci est à ce jour toujours entre les mains du Ministère russe des affaires étrangères. Malgré les tensions générées par la guerre en Ukraine, la NASA se veut toutefois optimiste et estime que cet accord pourrait être validé par le Ministère russe à horizon de mi-mai avant une revue finale des deux parties.
Contrat conclu entre les Émirats Arabes Unis et Axiom pour la mission Crew-6
Space News, 30 avril 2022
Space Policy Online, 29 avril 2022
La société Axiom Space et le Mohammed bin Rashid Space Centre (MBRSC) ont annoncé le 29 avril avoir signé un contrat permettant à un astronaute émirati de prendre part à la mission Crew-6 prévue au lancement au printemps 2023 pour une durée de six mois. Grâce à ce contrat, les Émirats Arabes Unis seront la première nation spatiale non partenaire de la station spatiale internationale (ISS) à réaliser une mission de longue durée à bord de celle-ci.
À noter que le contrat a été passé directement entre le MBRSC et Axiom (et non pas entre le MBRSC et la NASA) en contrepartie du siège que la société privée avait offert à la NASA sur un vol Soyouz en mars 2021 pour permettre à l’astronaute américain Mark Vande Hei de participer à la mission MS-18. L’intermédiation de la société Axiom avait été rendue nécessaire par la décision de la NASA de ne plus acheter de siège Soyouz grâce suite à la certification de la capsule Crew Dragon.
Boeing s’apprête à effectuer le second test de sa capsule Starliner
Space News, 5 mai 2022
Plus de deux ans après l’échec du premier vol d’essai sans équipage de sa capsule CST-100 Starliner (OFT-1) en décembre 2019, Boeing s’apprête à procéder à son second vol test (OFT-2) le 19 mai prochain. Lancée par une fusée Atlas V d’ULA depuis le Kennedy Space Center (Floride), la capsule de Boeing devra s’amarrer à la Station spatiale internationale (ISS) afin, non seulement d’y apporter 225kg de cargo, mais aussi de démontrer ses capacités à transporter des astronautes en toute sécurité à son bord. Initialement programmé pour le mois d’août 2021, ce second vol test sans équipage avait été annulé suite à l’apparition d’anomalies au niveau des valves du système de propulsion ayant nécessité plusieurs réparations.
Ce nouveau vol d’essai est donc crucial pour Boeing qui accumule un retard certain vis-à-vis de son rival SpaceX qui a déjà procédé au lancement de quatre équipages d’astronautes institutionnels depuis la certification de sa capsule en 2020, ainsi que plusieurs vols touristiques.
Dans l’hypothèse où le vol OFT-2 était concluant, Boeing pourrait procéder à un premier vol test habité (Crew Flight Test – CFT) dès la fin de l’année.
Tourisme spatial
Chassé-croisé sur la route de la Station spatiale internationale
Cf. Station spatiale internationale et Vol habité en orbite basse
Technologie
La NASA attribue près de 95 M$ à 110 de PME dans le cadre du programme SBIR
La DARPA poursuit ses efforts dans le domaine de la propulsion nucléaire
Lancements à venir
Date |
Mission | Client | Orbite | Lanceur | Entreprise |
Site |
10 mai |
Starlink | SpaceX | LEO | Falcon 9 Block 5 |
SpaceX | Vandenberg (Californie) |
17 mai |
Starlink | SpaceX | LEO | Falcon 9 Block 5 |
SpaceX |
Cap Canaveral (Floride) |
19 mai | Starliner OFT-2 | Boeing | LEO | Atlas V | ULA |
Cap Canaveral (Floride) |
25 mai | Transporter 5 | Multiples | LEO | Falcon 9 Block 5 |
SpaceX |
Cap Canaveral (Floride) |