Les universités américaines face à la récession : l’heure des opportunités pour les universités à but lucratif ?

Le système d’enseignement supérieur américain est, on le sait, d’une très grande diversité, avec près de 4.000 universités accréditées . Parmi les institutions privées accréditées, certaines sont à but lucratif, " for-profit colleges ", catégorie qui inclut par ailleurs un grand nombre d’institutions non accréditées (écoles de secrétariat, d’informatique, etc.). En 2004, 6.7% des 17.7 millions d’étudiants étaient inscrits dans un for-profit college. S’ils ne représentent que 6.7% des étudiants américains, ils accueillent en revanche une proportion substantielle d’étudiants issus des minorités : 16% des étudiants d’origine africaine, 14% des hispaniques contre seulement 4% d’étudiants "caucasiens". Les frais d’inscription dans les for-profit colleges sont en moyenne plus élevés que dans les universités publiques mais moins importants que ceux pratiqués dans les universités privées à but non lucratif. Il n’empêche que certains for-profit colleges sont de plus en plus connus. On peut citer à titre d’exemple l’université de Phoenix. Fondée en 1976, elle a aujourd’hui plus de 200 sites de formation, des formations en ligne dans plusieurs pays et plus de 345 300 étudiants. Elle délivre différents types de diplômes (Master, doctorat…).

Bien que toujours en marge du système universitaire américain en termes de réputation et reconnaissance, les for profit colleges apparaissent cependant bien équipés pour profiter de la récession actuelle au moment où beaucoup, parmi les universités classiques, font face à des coupes budgétaires sévères et que certaines d’entre elles (publiques) se voient même obligées de limiter le nombre de nouveaux étudiants.

Les for-profit colleges ont en effet plusieurs atouts à faire valoir. Tout d’abord, ils ont su répondre à une demande importante et complexe qui est celle des adultes souhaitant suivre des formations dans l’enseignement supérieur. Elles répondent bien aux besoins spécifiques exprimés par le marché du travail et ont aussi su satisfaire les demandes des minorités pour lesquelles l’accès au système universitaire traditionnel reste plus difficile. Leurs programmes accélérés, emplois du temps flexibles, formations en ligne, localisations pratiques et soutien personnalisé attirent de plus en plus d’étudiants. Indicateur de cette tendance favorable, à l’automne 2008, le nombre d’inscriptions dans les 9 principaux for-profit colleges du pays a progressé plus rapidement que le taux de croissance annuel des 3 dernières années tandis que les marges bénéficiaires réalisées devraient être les plus hautes enregistrées depuis 2005.

La crise économique semble renforcer la position de ces universités face au système universitaire classique. Tout d’abord, alors que comme dans toute récession, le nombre de personnes souhaitant suivre des études est en augmentation sensible, beaucoup d’institutions publiques et privées ne sont, soit pas en mesure d’accueillir ces nouveaux étudiants, soit se voient contraintes d’augmenter leurs droits d’inscription. En raison de la crise, les Etats sont amenés à réduire leur soutien financier aux universités publiques. Certaines universités publiques ont d’ores et déjà annoncé qu’elles allaient limiter le nombre de places pour l’automne 2009. C’est le cas parmi d’autres du système des universités publiques de Californie (California State University) qui annonce être prête à refuser 10.000 nouveaux étudiants.

Beaucoup d’universités privées (non for profit), touchées par la raréfaction des dons et par l’effondrement de la valeur de leurs endowments, se voient ainsi dans l’obligation de diminuer les services offerts aux étudiants, de différer les recrutements de professeurs, voire sont contraintes de fermer certains programmes ou de se séparer de professeurs. Face à l’appauvrissement de leurs étudiants ou de leurs familles, elles doivent aussi (pour celles s’étant engagées à cofinancer les études des étudiants nouvellement acceptés) fournir un volume croissant d’aide financière. Pour faire face, ces universités n’ont d’autre solution que d’augmenter leurs frais d’inscription, voire d’augmenter le nombre total d’étudiants pour les plus attractives d’entre elles, mais avec le risque (pour les moins connues d’entre elles) de perdre une part de leur attractivité à l’égard des nouveaux étudiants au bénéfice des universités for profit.

Dans un contexte d’augmentation du nombre d’étudiants candidats, de renchérissement des droits d’inscription dans les universités privées non for profit et d’incapacité des universités publiques à accueillir ne serait-ce qu’autant d’étudiants qu’à la rentrée précédente, les for-profit colleges voient d’un bon oeil se profiler la rentrée 2009. Non seulement leur modèle économique est solide, mais il continue de progresser : augmentation de leur capacité d’accueil, développement de leur système d’enseignement en ligne. Par ailleurs, certaines de ces universités ont mis en place leur propre système de prêts étudiants. Cerise sur le gâteau, la baisse des tarifs publicitaires engendrée par la crise économique leur a permis d’accroître leur visibilité, avec désormais plus d’un milliard de dollars par an dans la publicité.

A noter : Un rapport plus complet est également disponibles sur bulletins-electroniques.com à l’url suivante :
https://www.bulletins-electroniques.com/rapports/smm09_012.htm
Ambassade de France aux Etats-Unis – 12/02/2009 – pdf 6 pages

Pour en savoir plus, contacts :

– "Economic Downturn Brings Prosperity and Opportunities to For-Profit Colleges", Goldie Blumenstyk, The Chronicle of Higher Education, 19 décembre 2008: https://chronicle.com/.
– "Association, accreditation, autorégulation : les règles du marché de l’enseignement supérieur américain", Mission pour la Science et la Technologie, Ambassade de France à Washington, Michel Israël et Marie Parsy, 14 mars 2008 https://www.bulletins-electroniques.com/rapports/smm07_044.htm
– " Les universités américaines dans la tourmente : l’accès à l’enseignement supérieur dans le contexte de la crise financière ", Florence Barnier et Pascal Delisle, 21/11/2008, https://www.bulletins-electroniques.com/actualites/56733.htm
– Site web du American Council on Education: https://www.acenet.edu//AM/Template.cfm?Section=Home
– Site du College Board : https://www.collegeboard.com/
– Site Web du Education Commission of the States (ECS) : https://www.ecs.org/
https://www.elearners.com/guide-to-online-education/online-education-providers.asp#forprofit_vs_notforprofit
Code brève
ADIT : 57730

Rédacteur :

Pascal Delisle ([email protected]), Isabelle Schöninger (isabelle.schoninger@ambafrance-us

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