Le laboratoire Biosphère 2 à l’Université d’Arizona étudie l’impact du changement climatique sur les forêts tropicales

Biosphère 2, situé à Tucson en Arizona, fait partie de la University of Arizona depuis 2011, et permet de faire le lien entre les expériences en laboratoire et les observations du changement climatique dans le monde réel. Sa mission est de servir de centre de recherche, de sensibilisation et d’enseignement sur les enjeux de la planète Terre, ses écosystèmes vivants et sa place dans l’univers.

Les installations Biosphère 2 sont constituées de plusieurs bâtiments étanches en surpression situés sur un terrain de 1,4 ha dans le désert de Sonora ; les surfaces vitrées et l’architecture futuriste en font un lieu tout à fait exceptionnel. Cinq biomes ont été conçus pour simuler différents milieux, dont l’un reproduit une forêt tropicale (sur 1900 m2). Grâce à ce terrain d’expérimentation exceptionnel, une récente étude publiée dans la revue Nature Plants suggère que les forêts tropicales pourraient être plus résistantes aux augmentations de température prévues dans le cadre du changement climatique mondial qu’on ne le pensait auparavant. Selon les auteurs – une équipe internationale dirigée par des scientifiques du Department of Ecology and Evolutionary Biology de la University of Arizona, les études conduites avec Biosphère 2 pourraient contribuer à l’amélioration des modèles de prévision climatique .

Si les biologistes connnaissent depuis longtemps la photosynthèse, par contre la diminution, à un certain seuil de température, de la capacité des plantes à transformer le dioxyde de carbone et l’eau en biomolécules, en utilisant l’énergie du soleil, n’a pas encore d’explication. Les chercheurs ont comparé les données recueillies à Biosphère 2  avec des mesures réalisées sur les sites naturels de la forêt tropicale, au Mexique et en Amazonie Brésilienne. La forêt tropicale de Biosphère 2 est probablement la plus chaude du monde, car enfermée sous un dôme de verre. Les températures peuvent atteindre 40 degrés Celsius, soit environ 6 degrés Celsius de plus que les températures maximales actuelles des forêts tropicales naturelles, et dans la fourchette des températures possibles en 2100, en fonction de l’éfficacité des mesures limitant le changement climatique. Malgré cette température très élevée dans la forêt tropicale de Biosphère 2, l’activité de photosynthèse des plantes ne diminue pas drastiquement comme anticipé.

L’équipe de recherche, en ajustant le taux d’humidité au sein de l’infrastructure, a permis de mettre en avant le rôle d’un comportement biologique de base des plantes : lorsqu’il y a moins d’humidité dans l’air, les plantes réagissent en limitant l’ouverture de leurs stomates qui sert à absorber le dioxyde de carbone. Plus les stomates restent ouverts longtemps, plus le dioxyde de carbone peut pénétrer dans la feuille, mais plus l’air qui entoure la plante est sec, plus l’eau s’échappe par les ouvertures, ce qui oblige la plante à trouver un équilibre entre l’absorption de dioxyde de carbone et la perte d’eau. La réduction de la productivité photosynthétique que des études précédentes avaient observée face à des températures plus chaudes est donc probablement due au fait que les plantes limitent le temps pendant lequel elles gardent leurs stomates ouverts lorsqu’elles sont confrontées à un air plus sec, dans un effort pour préserver l’eau. Ceci, à son tour, limite la quantité de dioxyde de carbone pouvant entrer dans la feuille, ce qui peut être à l’origine de la baisse de la productivité photosynthétique plutôt que le scénario alternatif, dans lequel la chaleur endommage directement l’appareil photosynthétique.

Les auteurs soulignent que si leurs conclusions suggèrent que les forêts tropicales pourraient être plus résistantes au réchauffement climatique qu’on ne le pensait, cela ne signifie pas pour autant qu’elles ne sont pas vulnérables au changement climatique, car la photosynthèse n’est pas le seul facteur qui influence la santé des forêts.

Scott Saleska, professeur au Department of Ecology and Evolutionary Biology de la University of Arizona et auteur principal de l’article affirme que « Biosphère 2 a donné une occasion unique d’examiner ce qui pourrait se passer lorsque ces forêts seront soumises à un traitement complet du réchauffement climatique », notamment dans la compréhension de l’équilibre que les plantes doivent trouver entre l’absorption de carbone via la photosynthèse et la perte d’eau.

Reconnu internationalement, le laboratoire Biosphère 2 de University of Arizona est un partenaire majeur du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS). Une coopération existe depuis plusieurs années dans le cadre de l’Unité Mixte Internationale iGLOBES (Interdisciplinary and Global Environmental Studies) qui aborde des sujets interdisciplinaires sur les défis globaux liés à l’environnement.

 

Rédactrice : Maëlys Renaud, Attachée adjointe pour la science et la technologie à Los Angeles, [email protected]

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